Malgré sa réputation souvent négative en matière de responsabilité d’entreprise, la Chine est un pays où la RSE est en pleine évolution. Et elle pourrait bien être un pays incontournable de la RSE à l’avenir. Découvrez pourquoi.

Lorsqu’on parle de l’économie chinoise, on pense souvent à des ouvriers mal payés, aux produits Made in China bon marchés et de mauvaise qualité. Pourtant cette réalité est entrain de changer. La Chine est une économie de plus en plus mature, à la croissance toujours rapide. Alors qu’il y a 15 ans seules 9 entreprises chinoises faisaient partie des 500 plus grosses entreprises mondiales, elles sont désormais 95. Pour rester compétitifs, les exécutifs chinois se penchent sur toutes les nouvelles tendances, et ils sont de plus en plus conscients de la nécessité de développer des normes de production saines socialement, écologiquement, et en alignement avec les standards internationaux de la RSE.

La RSE en Chine : l’émergence d’une réglementation RSE

La RSE est une pratique récente en Chine. Il y a 10 ans, les entreprises chinoises considéraient que leur seule responsabilité envers la société était de contribuer à la croissance économique. La preuve de cette absence de considération pour la RSE ? Entre  1999 et 2005, seuls 22 rapports RSE ont été publiés par des entreprises chinoises. Le changement a lieu en 2006 lorsque la RSE fait son entrée dans le droit des sociétés chinoises. Cette année là, les législateurs chinois, pour faciliter l’intégration des sociétés chinoises sur le marché mondial ont  ajouté au droit certaines dispositions notamment sur les reportings RSE.

Cette nouvelle réglementation a lancé un mouvement parmi les leaders des entreprises d’Etat (State-Grid, SinoPec, CNPC) qui ont commencé à publier leurs rapports RSE et à s’intéresser à la question. 3 ans plus tard en 2009, près de 1600 rapports RSE chinois avaient été publiés.

Le Séisme au Sichuan et le développement de la philanthropie d’entreprise

En 2008, un autre évènement a contribué à l’avènement et au développement de la RSE en Chine : le séisme de 2008 dans le Sichuan. Cette catastrophe a considérablement modifié la perception du public chinois vis-à-vis du rôle de l’entreprise face aux crises sociales. Alors que bon nombre d’entreprises chinoises et internationales ont fait des donations et ont participé à l’effort humanitaire, le public a mis la pression sur les entreprises qui n’avaient pas participé en lançant des opérations de boycott.

Cet épisode a marqué un vrai changement d’état d’esprit vis à vis de l’entreprise et de sa responsabilité dans le pays. La population, les acteurs privés et les entreprises ont alors pris conscience que l’entreprise avait un rôle à jouer dans la société et devait être solidaire. On a observé depuis le développement d’une culture de la philanthropie d’entreprise, qui a progressivement évolué pour devenir des programmes d’éducation et de lutte contre la pauvreté soutenus par les entreprises.

La croissance de la classe moyenne : facteur de développement de la RSE en Chine

RSE chine classe moyenne

Ces nouvelles tendances ont été largement facilitées par le développement de la classe moyenne. Même si il y a augmentation des écarts entre riches et pauvres en Chine, l’énorme croissance économique a conduit à l’émergence d’une classe moyenne. Les citoyens de la classe moyenne, plus conscients de leur position sociale, se sont mis à exiger de meilleures conditions de vie, des produits plus sûrs et un environnement plus sain. Les entreprises ont ainsi été poussées à veiller à ce que leurs produits soient de bonne qualité, notamment pour les produits laitiers et les aliments pour bébé qui ont souvent posé problème dans l’Empire du Milieu.

L’environnement est aussi une question de plus en plus problématique et un nombre croissant de citoyens consciencieux et d’ONG exigent des politiques gouvernementales plus fortes et de meilleures pratiques des entreprises. Au fur et à mesure que le pouvoir d’achat des consommateurs chinois augmente, leur capacité à faire le tri entre les entreprises « responsables » ou non augmente. Et les efforts des entreprises se développent pour maintenir leurs parts de marché.

Les médias sociaux et l’avènement de la RSE en Chine

Malgré la censure, les citoyens chinois ont trouvé à travers les réseaux sociaux un moyen d’exprimer leurs préoccupations et leurs attentes de consommateurs. Internet et les réseaux comme comme Weibo, QQ et WeChat, ont permis, par exemple, de diffuser au public le « Silent Spring chinois », le scandale sur la pollution atmosphérique et le smog. Ce sont aussi ces réseaux qui ont permis de dénoncer l’attitude de Jack Ma Yun, le fondateur d’Alibaba, critiqué par les internautes pour ne pas donner aux victimes de l’explosion Tianjin.

Une RSE pilotée par l’Etat chinois

Autre facteur contribuant au développement de la RSE dans le pays : le rôle directeur du gouvernement. Dans un pays où le gouvernement est si omniprésent, notamment à travers le Parti Communiste Chinois (PCC), il n’est pas étonnant qu’il ait une influence sur les pratiques de RSE. D’une part, les entreprises dont les dirigeants ont un lien avec le Parti sont plus enclines à adopter des pratiques RSE. En effet, ces structures très bureaucratiques sont très surveillées et ont tout intérêt à se plier aux exigences gouvernementales. Et d’autre part, d’une manière générale, les entreprises suivent l’agenda du gouvernement. Ainsi, lorsque le PCC a lancé un programme de reforestation, une grande majorité d’entreprises ont sauté sur l’occasion pour investir dans ce genre d’initiatives.

RSE en Chine

La Chine, la RSE et le développement des énergies vertes

Le rôle du gouvernement est aussi très visible sur la question de la lutte contre le changement climatique. Comme la croissance économique ralentit, la Chine est à la recherche de nouvelles façons de se développer. Il est clair que le pays ne peut pas continuer à croître indéfiniment en se basant sur des industries qui détruisent son environnement, et détruisent sa réputation intérieure et internationale. La Chine a donc lancé un impressionnant programme d’investissements dans les nouvelles technologies, notamment énergétiques et environnementales. Le pays a désormais plus de capacité éolienne que l’UE et il construit des villes entièrement fournis par l’énergie photovoltaïque. En fait, il est en train de devenir le principal exportateur de technologies vertes bon marché et a contribué à une grande croissance dans les emplois verts. Les entreprises suivent à fond ce modèle et se mettent à développer des énergies plus vertes. La Chine a également créé un système de « Cap and Trade » entre les 7 villes comme un prototype pour un système national plus vaste viable sans doute début 2017.

L’importation de la RSE dans les entreprises chinoises

Enfin, le développement de la RSE en Chine est également une question d’image. Le pays est régulièrement sous le feu de la critique internationale, notamment pour son néo-colonialisme, en particulier en Afrique où elle est accusée de piller les ressources naturelles. Mais elle est également critiquée pour les pratiques de ses entreprises en matière de propriété intellectuelle et de dumping. Pour préserver la réputation de ces entreprises, et face à la concurrence d’autres pays d’Asie du Sud-Est notamment, la RSE semble un outil indispensable.

Les entreprises chinoises adoptent donc les réglementations et les normes RSE des pays dans lesquelles elles s’intègrent. C’est le signe que les entreprises s’adaptent, et qu’elles pourraient importer ces normes et donc l’assimilation de la RSE en Chine.

La Chine : un futur géant de la RSE mondiale ?

La Chine n’en est qu’à ses balbutiements en matière de RSE, et il y a beaucoup de place pour l’amélioration des normes RSE dans le pays. Mais le paysage socio-économique changeant de la Chine peut fournir un environnement favorable pour le développement des pratiques de responsabilité sociale. L’envergure économique du pays en fera dans les décennies à venir un acteur incontournable de la RSE, à la fois au niveau de la définition des normes et de leur application.

Quelques questions se posent, cependant : Quel sera le rôle du gouvernement dans ce développement ? Et dans quelle mesure l’opinion publique peut-elle influer sur les décisions stratégiques prises par les entreprises ? Est-ce que la Chine va vraiment être la superpuissance d’énergie verte de l’avenir ?

 

Alors à votre avis, la Chine est-elle un pays d’avenir pour la RSE ?

 

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