Incontournable pour la préservation des ressources naturelles et la réduction des impacts sur l’environnement, la valorisation des déchets devient un enjeu majeur pour les industries. Certaines filières se positionnent à l’avant-garde dans ce domaine. Exemples. 

Aujourd’hui plébiscitée, l’économie circulaire vise à changer le modèle de l’économie dite linéaire (extraire, produire, consommer, jeter), fondée sur des ressources supposées infinies et produisant une quantité de déchets a priori illimitée. L’objectif est de limiter le gaspillage des ressources et l’impact environnemental à tous les stades de vie des produits : conception, production, consommation et fin de vie.

Le recyclage et la valorisation des déchets, tout comme le concept d’écologie industrielle – où les déchets des uns deviennent les matières premières des autres – s’inscrivent dans cette perspective plus large. Poussés par les réglementations ou les anticipant, les industriels s’efforcent de relever ce nouveau défi. Au-delà des impératifs écologiques, la création de ressources est aussi devenue un véritable enjeu face à la raréfaction des ressources naturelles et à la hausse des cours des matières premières.

En 2014, selon l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), 17 millions de tonnes de matières recyclées ont été utilisées dans la production française (hors bois, granulats et textiles). Le taux d’utilisation des matières premières recyclées dans l’industrie nationale s’établit à 49%. Dans certains secteurs, elles représentent déjà la majeure partie des matières premières utilisées pour la production. C’est le cas pour l’acier et la fonte (51%), le verre (58%) ou le papier-carton (66%).

Valorisation des déchets : un cycle de vie vertueux pour l’automobile ?

L’automobile figure également parmi les produits industriels les mieux valorisés. Les trois quarts d’un véhicule sont en effet composés de métaux (acier, aluminium, cuivre, etc.) facilement récupérables pour de nouvelles utilisations. Le principal enjeu réside dans le recyclage des autres constituants : mousses, verre, tissus, composants électroniques et surtout plastiques, de plus en plus présents dans les voitures.

Depuis une vingtaine d’années, les constructeurs ont accompli des efforts importants pour améliorer la recyclabilité de leurs modèles, qui atteint aujourd’hui 95% sur les véhicules neufs. Renault, par exemple, qui se présente comme l’un des pionniers de l’économie circulaire, met en avant l’emploi de 30% de matières recyclées dans la fabrication de ses automobiles. Le dernier Espace contient ainsi cinquante kilos de plastique recyclé. Quant au pare-chocs de la Peugeot 208, il est 100% recyclé. Une prouesse technologique réalisée par Plastic Omnium à partir de pièces plastiques endommagées, d’objets électriques et de résidus de broyage.

L’équipementier français Faurecia et le chimiste japonais Mitsubishi Chemical ont également signé un partenariat pour développer et produire ensemble des pièces d’intérieur en bioplastique. Objectif : modifier le polybutylène succinate (PBS), breveté par Mitsubishi et dérivé de la biomasse, afin de le produire à partir de matériaux naturels et de l’adapter aux contraintes de l’automobile. La majorité des constructeurs ont également fait le choix de contrôler la filière recyclage des voitures en fin de vie. Renault et Suez viennent ainsi de s’allier pour récupérer, recycler et revendre les métaux issus des véhicules hors d’usage (VHU). Selon le Comité des constructeurs français d’automobiles (CCFA), le taux de valorisation des vieux véhicules mis à la casse atteint aujourd’hui 83%.

Les cimenteries au cœur de l’économie circulaire et de la valorisation des déchets

valorisation dechets cimentDe son côté, l’industrie cimentière est devenue un acteur majeur et reconnu dans la valorisation des déchets, utilisant certains comme combustibles alternatifs aux énergies fossiles et d’autres comme matières premières de substitution dans le process de fabrication du ciment. La filière transforme en énergie les déchets issus d’autres industries. Et ce, sans risque de pollution ni résidu ultime, grâce à la haute température de combustion. Une valorisation énergétique qui contribue à préserver les ressources naturelles, à limiter les émissions de gaz à effet de serre et à réduire les volumes de déchets.

Aujourd’hui, cette industrie utilise près d’un million tonnes de déchets dotés d’une valeur énergétique (pneumatiques, huiles, etc.). En 2015, le taux moyen de substitution énergétique dans les cimenteries françaises a atteint 38% et devrait franchir la barre des 50% à l’horizon 2020. Pour réaliser cet objectif, la filière mise sur les combustibles solides de récupération (CSR) : meubles, bois, tissus, plastiques, cartons, textiles ou mousses qui ne peuvent pas être recyclés. Grâce à des ateliers dédiés, certaines cimenteries atteignent déjà un taux de substitution de 60% avec en ligne de mire, le cap des 80%.

Outre cette valorisation énergétique, l’industrie cimentière apporte aussi des solutions de valorisation matière : pour économiser les matières premières issues des carrières (calcaire, argile, gypse), elle leur substitue en partie des déchets minéraux issus d’autres industries, comme les résidus dits « laitiers » des hauts-fourneaux de la sidérurgie ou les cendres volantes issues des centrales thermiques à charbon. Un remplacement qui permet de diminuer la quantité de combustible nécessaire mais aussi les émissions de CO2 liées à la décarbonatation inhérente à la fabrication du ciment. En 2015, l’industrie cimentière a ainsi recyclé 2,4 millions de tonnes de déchets minéraux.

Quant au béton, il est 100% recyclable. Une fois séparé d’autres produits, il peut être broyé pour constituer des granulats, utilisés pour la fabrication de nouveaux bétons, de sous-couches de routes, ou pour le remblayage de tranchées. Pour le futur, le projet national de recherche Recybéton vise la réutilisation de l’intégralité des matériaux issus des bétons déconstruits comme constituants de nouveaux bétons.

Le grand défi du recyclage du plastique

L’industrie du plastique mise également sur l’innovation pour relever le défi de l’économie circulaire. Aujourd’hui, selon l’Ademe, sur 3,3 millions de tonnes de déchets plastiques produits dans l’Hexagone, environ 20% sont recyclés, un peu plus de 40% utilisés pour produire de l’énergie et à peu près autant mis en décharge. Les efforts des industriels pour améliorer ces chiffres se heurtent à des freins technologiques et économiques… Mais certains parviennent néanmoins à tirer leur épingle du jeu.

Suez Environnement, par exemple, va doubler sa production de plastiques recyclés en cinq ans (de 140 000 tonnes en 2012 à 280 000 tonnes en 2017). Le groupe recyclait 5% du plastique en 2000. En 2012, il a atteint une moyenne de 30% au sein de ses neuf usines européennes et se fixe aujourd’hui comme objectif un taux de recyclage de 70% à l’horizon 2030. Le laboratoire Plast’Lab, créé par le groupe en Essonne, est chargé de faire la preuve que ces nouveaux plastiques répondent bien aux besoins des industriels. Ce centre de recherches travaille sur quatre types de plastiques : PET (bouteilles plastiques), PP (barquettes alimentaires, bouteilles de shampoing, plastiques automobile), PE (bâches agricoles) et PVC (tuyaux, profilés de fenêtres). Suez a également modernisé son centre de tri situé dans l’Oise, qui se présente désormais comme « le site français le plus performant dans le tri des résines d’emballages ». Une usine ultra-automatisée qui sépare cinq sortes de plastiques issus de 30.000 tonnes d’emballages par an et atteint un taux de valorisation de 90%.

De son côté, Veolia collecte à Rostock, en Allemagne, des bouteilles usagées en PET pour en produire de nouvelles. En recyclant 32 000 tonnes de bouteilles en plastique par an, l’usine assure économiser l’équivalent de 28 000 tonnes de pétrole. Et en Grande-Bretagne, le groupe vient même de créer une usine pour produire du carburant à partir de déchets ménagers en plastique. Mais le recyclage du plastique n’est pas toujours possible. C’est alors la valorisation énergétique qui est privilégiée, avec comme première destination… les fours des cimenteries.