Droits Humains : vers une nouvelle donne internationale ?

Anthony Ratier - Chargé de mission Droits Humains/ODD

Global Compact France

Après des études en sciences politiques et en affaires européennes à Bordeaux et Bruxelles, Anthony Ratier a travaillé dans le domaine international et de la RSE pour la société civile, un partenaire social, une SSII, la Commission Européenne. Fort de plus de 10 ans d'expérience dans la RSE et les instances internationales, Anthony Ratier a rejoint le Global Compact France en tant que Chargé de Mission Droits Humains et Objectifs de Développement Durable

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Genève, capitale des Droits Humains ? On pourrait se poser la question tant consécutivement, aux mois d’octobre et novembre, les Droits de l’Homme ont occupé les débats au sein des Palais des Nations. Anthony Ratier, Responsable Droits Humains/ODD au Global Compact France, revient sur la mise en place du Traité International relatif aux violations des droits humains.

En premier lieu, du 23 au 27 octobre s’est tenu la troisième session de négociation pour mettre sur pied, dans le cadre de l’ONU, un Traité International contraignant portant sur les entreprises transnationales et les Droits humains.

À l’initiative de l’Équateur et de l’Afrique du Sud, le Conseil des droits de l’Homme (CDH) de l’ONU a en effet adopté, en juin 2014, une résolution visant à élaborer un instrument international contraignant relatif aux violations des droits humains par les entreprises transnationales. Cette résolution a ainsi mis en place un groupe intergouvernemental de travail (GIGT) afin de mettre en place juridiquement un tel Traité.

Dans tous les cas les négociations semblent diviser : une majorité des pays du Sud en soutiennent le principe, avec l’appui des ONG, tandis que les pays dits « développés », avec l’Union Européenne en tête, y sont opposés ou absents comme les États-Unis, l’Australie, le Canada.

Avec la loi sur le devoir de vigilance, la France demandée en soutien

Pour autant, comme dans toute négociation la position des acteurs peut évoluer notamment celle de l’Union européenne. La France avec la loi sur le devoir de vigilance est particulièrement en pointe dans les discussions : ainsi dans une lettre ouverte datée du 18 octobre 2017, 242 députés français ont demandé au président de la République de soutenir publiquement le traité lors des négociations onusiennes. Le Ministre de l’Europe et des Affaires Étrangères, Jean-Yves Le Drian, a également indiqué la « nécessité » que la France y « participe de manière active et assidue ».

© UN Photo/Cia Pak, 03 October 2017, United Nations, New York

Un document au contenu riche et évolutif

Le contenu du document de travail rédigé par l’Équateur, qui sert de « base » au contenu du Traité, s’apparente pour une grande partie à celui de la loi française et comporte :

  • Un cadre général composé d’un préambule et les objectifs du Traité ;
  • Un champ d’application qui précise les droits à protéger et les acteurs sujets à l’application du Traité ;
  • Les obligations des différents acteurs (États, entreprises transnationales, organisations internationales, etc.)
  • les mesures de prévention prévues pour améliorer la situation actuelle ;
  • la responsabilité juridique des différentes parties ;
  • les moyens d’accès à la justice, via des recours efficaces et appropriés ;
  • les juridictions concernées ;
  • un certain nombre de mécanismes de mise en œuvre, de promotion et de suivi du traité, ainsi que des dispositions générales.

Bien sûr le contenu du document devrait évoluer au fil du temps et certaines voix dans le milieu des affaires s’interrogent sur la mise en œuvre d’un droit international contraignant.

Les discussions de cette fin du mois d’octobre, riches et réunissant plus de 101 États ont abouti à l’adoption du rapport de la session et à la poursuite des négociations. La prochaine étape en 2018 résidera dans l’élaboration d’une ébauche de traité par le président du groupe de travail onusien. Lentement mais sûrement le processus avance et les entreprises françaises ne seront pas prises au dépourvu avec leur expérience de la loi sur le Devoir de Vigilance.

Le Forum des Nations unies sur les entreprises et les droits de l’homme

Par ailleurs, du 27 au 30 novembre aura lieu, toujours à Genève, le Forum des Nations unies sur les entreprises et les droits de l’homme. Ce Forum est la plateforme mondiale qui permet de faire le bilan annuel et de partager des leçons sur les efforts pour mettre en pratique les Principes directeurs de l’ONU relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme.

Le thème principal de l’édition 2017 du Forum est « Réaliser l’accès aux recours ». Le programme comprend également des séances qui s’adressent à un public novice et des discussions sur les tendances en matière des politiques générales qui abordent la question du rôle du mouvement pour les entreprises et les droits de l’homme dans les contextes politiques et sociétaux à travers le monde. Nous serons bien évidemment présents aux côtés de nos amis des réseaux locaux de la Suisse, du Japon, de la Russie et de l’UN Global Compact de New York, ainsi que nos entreprises adhérentes et nos partenaires comme Entreprises pour les Droits de l’Homme (edh) ou le PCN France. L’occasion de se rencontrer et d’échanger autour de la loi sur le devoir de vigilance, le lien Droits Humains et (Objectifs de Développement durable) ODD, le troisième pilier des Principes directeurs de l’ONU relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme et bien sûr le projet de Traité contraignant sur Entreprises et Droits Humains.

L’ensemble de ces discussions, de ce bouillonnement autour des Droits Humains marque dans tous les cas un véritable tournant avec une approche non seulement tournée vers la prévention des risques mais surtout vers l’accès à la justice et des voies de recours plus faciles pour les personnes ou les communautés face à une problématique liée aux droits humains.

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