Les conflits, l’environnement et la désinformation sont les principaux risques dans les deux ans qui viennent, selon la 20e édition du Global Risks Report du Forum économique mondial de Davos. Mais à plus long terme, ce sont les défis écologiques qui sont clairement prédominants selon les 900 experts (académiques, dirigeants politiques, économiques et société civile) interrogés pour nourrir l’étude. Plus largement, ce rapport toujours très attendu par les décideurs révèle un paysage mondial de plus en plus fracturé.
Le forum de Davos s’ouvre aujourd’hui sous le signe de la coopération. Et celle-ci va être plus que nécessaire si l’on en croit la dernière édition du Global Risk Report, publié chaque année par le Forum Economique mondial depuis 20 ans. « Qu’il s’agisse de conflits ou de changements climatiques, nous sommes confrontés à des crises interconnectées » qui « mettent le système mondial à rude épreuve comme jamais auparavant », assure ainsi Mark Elsner, chef de l’Initiative sur les risques mondiaux du Forum économique mondial.
Une aggravation des risques environnementaux depuis 2006
« Au cours des deux dernières décennies, les risques environnementaux ont régulièrement consolidé leur position en tant que principale source d’inquiétude à long terme. L’enquête de cette année sur la perception des risques mondiaux montre que le sentiment d’inquiétude s’accroît également à court terme », souligne Saadia Zahidi, managing director du World Economic Forum, en préface du rapport.
C’est le cas concernant les événements météorologiques extrêmes, aggravés par le changement climatique. Les inondations meurtrières de Valence, le cyclone Chido qui a dévasté Mayotte ou les incendies qui ravagent Los Angeles le montrent pleinement. Mais aussi de la perte de biodiversité, de l’effondrement des écosystèmes et des points de basculement climatique qui pourraient modifier le climat global de manière telle qu’il n’y aurait plus de retour en arrière (comme l’effondrement des calottes glaciaires ou la déforestation de l’Amazonie). « Il est urgent de mettre en œuvre des solutions », appelle-t-elle.
A horizon 10 ans, les risques environnementaux sont aussi ceux qui présentent la détérioration la plus importante. Mais ce sont les jeunes qui en ont le plus conscience, précise le rapport. C’est particulièrement le cas pour la pollution que les moins de 30 ans considèrent comme le troisième risque le plus grave en 2035, un rang plus élevé que tous les autres groupes d’âges.
La menace de la désinformation s’enracine
Par ailleurs, comme l’an dernier, le risque de mésinformation et de désinformation est au plus haut sur le court terme. Un risque aggravé par l’utilisation croissante des plateformes numériques et le volume de plus en plus important de contenus générés par l’IA, souligne le rapport. Et cela risque de s’amplifier avec la nouvelle stratégie de « populisme informationnel » des géants des réseaux sociaux comme X et son IA Grok en libre service ou de Méta qui a annoncé la suppression de son programme de vérification des informations aux États-Unis.
Or la désinformation est une « menace persistante pour la cohésion sociétale et la gouvernance en érodant la confiance et en exacerbant les divisions au sein des nations et entre elles », souligne le rapport. Ainsi, sur un échantillon de 47 pays, seulement 40% des répondants disent donner crédit à la plupart des informations qu’ils reçoivent, rapporte le Global Risk Report. La désinformation favorise également l’inaction environnementale, d’autant qu’elle est de plus en plus tolérée dans certains médias généralistes dans plusieurs pays du monde (France, Etats-Unis…), comme le montre l’association Quota Climat dans un rapport sur la désinformation climatique.
Collaborer ou faire face à une instabilité accrue
Alors que l’IA générative, qui peut se révéler une redoutable machine à mésinformation et désinformation via les deepfakes mais aussi les biais algorithmiques ou les hallucinations, les experts ne semblent pourtant pas y voir un risque de court terme. Pour Grace Atkinson Insights Specialist, Global Risks du World Economic Forum, cela « soulève la question de savoir si nous ne sous-estimons pas la vitesse à laquelle les effets négatifs de l’IA pourraient se faire sentir sur nos sociétés ou si nous en sommes encore loin ». Au niveau environnemental on sait déjà que celle-ci aggrave le réchauffement climatique et consomme une eau précieuse qui va se raréfier…
Face à ces menaces, « les dirigeants mondiaux ont le choix entre favoriser la collaboration et la résilience ou faire face à une instabilité aggravée », estime Mirek Dušek, directeur général du Forum économique mondial. Pilule rouge ou pilule bleue, laquelle choisirons-nous ?
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