L’artiste Raul Lemesoff, basé à Buenos Aires, a transformé un vieux tank en bibliothèque itinérante : une « arme d’instruction massive » pour combattre l’ignorance et faciliter l’accès à la culture. Poèmes, romans, biographies… À bord de son tank, une ex Ford 1979 Falcon complété par 900 ouvrages provenant de dons privés, R.Lemesoff parcourt le pays pour offrir des livres gratuitement aux passants, auxquels il ne demande qu’une seule chose : promettre de lire.
L’artiste participe actuellement à la campagne Feels good to be you, lancée par la célèbre marque de boisson gazeuse 7Up, qui met en avant des personnalités exceptionnelles, sources d’inspiration dans le monde entier. En utilisant l’approche et l’esthétique militaire, l’artiste réussit à délivrer un message de paix lorsqu’il traverse les zones rurales et urbaines argentines à la rencontre des populations. Raul ne traverse pas uniquement les grandes villes du pays. Il sillonne la campagne, où beaucoup d’enfants ne sont pas scolarisés. “My missions are very dangerous. I attack people in a very nice and fun way“ explique l’artiste.
Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme. L’aphorisme que l’on prête à Lavoisier prend ici tout son sens. Alors… Art Car ou Book Tank ?
La culture comme bien commun de l’humanité : vers un quatrième pilier du développement durable ?
Les trois dimensions fondamentales du développement durable (économie, environnement, social) ont placé l’homme au centre de sa problématique. En laissant de côté d’autres besoins tout aussi fondamentaux, que sont l’accès à l’éducation et à la connaissance, aux ressources culturelles de l’humanité et, pour chaque individu, la possibilité de développer sa créativité. Raul Lemesoff fait parti de ces artistes qui estiment qu’il est temps d’affirmer avec force l’idée que le développement culturel est tout aussi essentiel pour notre avenir commun. Alors pourquoi ne pas compléter l’approche du développement durable en y intégrant une dimension culturelle ? La culture ne favoriserai-t-elle pas le lien social ?
« La diversité des cultures, patrimoine de l’humanité, tout comme le patrimoine naturel qu’est la biosphère, doit être protégée afin d’être transmise aux générations futures. Elle doit même être enrichie par une dynamique d’échanges inter-culturels et de création, qui permette à chaque être humain de construire son rapport aux autres, son rapport à notre monde. Dans une société fondée sur la notion de développement durable, chaque individu devrait pouvoir accomplir sa propre vie et non pas la subir. Pour cela, il devrait pouvoir accéder à une éducation initiale et à une implication tout au long de sa vie dans un processus de formation continue et d’enrichissement culturel, pouvant emprunter les biais les plus variés. Tout être humain, à tous les échelons de la société, se verrait offrir la possibilité de devenir producteur / acteur de culture et de dépasser le stade de simple consommateur de divertissements. De la sorte, le fonds culturel de l’humanité s’enrichirait en permanence et le processus de civilisation se renforcerait », affirme la Commission Française du Développement Durable.
Il est donc indispensable pour l’avenir de l’humanité de maintenir et développer des pratiques culturelles libres, diverses et accessibles à tous. C’est la condition pour qu’un modèle de société, que l’on pourrait qualifier de durable, puisse trouver son sens.
Selon le référentiel de l’Unesco, la culture est comprise comme « l’ensemble des traits distinctifs, spirituels et matériels, intellectuels et affectifs qui caractérisent une société ou un groupe social, et qui englobent, outre les arts et les lettres, les modes de vie, les façons de vivre ensemble, les systèmes de valeurs, les traditions et les croyances ». La culture est un droit fondamental, apportant les outils critiques indispensables du libre arbitre.
Ivan Renar – ardent promoteur de la politique culturelle et président de l’École Supérieure d’Art du Nord-Pas de Calais – à ses élèves : « En ce début de siècle tourmenté où personne ne sait plus parler à la foule et quel but lui donner et que lui dire demain, comme disait le poète Louis Aragon, et par ces temps de barbarie ordinaire, où l’on a parfois l’impression de tâter l’avenir avec une canne blanche, avec ces terrifiants pépins de la réalité, dont parlait le Jacques Prévert de notre enfance, comment ne pas percevoir à quel point l’art et la culture sont déterminants pour construire nos vies ? (…) La culture, n’est ni un luxe, ni un superflu, elle est de première nécessité. Dans un monde où l’on assiste à l’offensive de « l’argent absolu », comme on disait monarchie absolue, l’enjeu de la culture, de la création artistique, comme de l’enseignement artistique, c’est bien d’éclairer la richesse des hommes et des femmes. Et l’homme est notre patrimoine le plus précieux. »
Où trouver plus de ferveur commune et sans esprit de compétition, que lorsqu’une salle est debout pour applaudir des artistes. C’est un partage, hors de toute discipline, hors de toute hiérarchie, hors de tout rapport de force, un partage enfin en toute liberté. Alors n’ayons pas peur de la création. Inventons, imaginons.