Un mois à peine après le référendum sur le Brexit, la nouvelle direction britannique est déjà en place. Ses premières décisions annoncent d’ores et déjà une période difficile pour la protection de l’environnement et la lutte contre le changement climatique. Sans l’Europe, le climat va-t-il passer au second plan de la politique britannique ?
Le 23 juin 2016, le Royaume-Uni annonçait après un référendum son intention de sortir de l’Union Européenne. Nous vous parlions alors des conséquences potentiellement néfastes que la sortie de l’Union Européenne pourrait avoir sur la politique environnementale du Royaume, désormais dispensé de suivre la règlementation européenne.
Trois semaines seulement après l’annonce du Brexit, Theresa May était intronisée nouvelle Premier Ministre du Royaume-Uni, chargée de gérer la sortie de l’UE et de remettre le pays sur de bons rails. Et parmi ses premières décisions, Theresa May annonçait la suppression du département d’état lié à la lutte contre le changement climatique.
Le nouveau leadership de la Grande-Bretagne est-il en train de mettre la lutte contre le changement climatique au second plan ? En tout cas, les politiques et les experts de tous bords s’inquiètent d’un état d’esprit peu cohérent avec les engagements de la COP21.
Le climat : un problème qui passe après le business ?
La fermeture du département de lutte contre le changement climatique pourrait être significative d’une volonté de changer de paradigme vis-à-vis de l’environnement, et notamment de ne plus considérer le changement climatique comme une priorité stratégique.
6 mois à peine après la COP21, où tous les pays du monde se sont engagés à faire de la lutte contre le changement climatique une priorité absolue, il n’y a plus de département entièrement dédié aux questions climatiques dans le cabinet de Theresa May. Au contraire, ces fonctions ont été transférées au département « Business, énergie et stratégie industrielle ». Ce changement, dans un pays qui subit les incertitudes économiques post-brexit, serait le symptôme que la problématique environnementale passe désormais après les questions économiques. Un réflexe qui peut sembler naturel, mais que beaucoup d’experts jugent dangereux.
Plusieurs responsables politiques britanniques ont d’ores et déjà commenté et critiqué cette décision : le Green Party, le parti écologiste britannique a qualifié cette décision de très inquiétante, alors que plusieurs responsables politiques l’ont décrite comme « stupide », « terrible » ou « plus qu’idiote ». D’après Ian Johnston, spécialiste des questions environnementales pour The Independant, la volonté affichée par Theresa May est claire : se concentrer sur l’économique pour éviter la récession, quitte à couper les budgets jugés secondaires comme le changement climatique. La suppression du département sur le changement climatique et son intégration dans le cabinet de la « Stratégie industrielle » augure donc probablement une réduction significative des budgets alloués à la lutte contre le changement climatique. Surtout, ce déplacement indique que les priorités changent : business d’abord, climat ensuite. Quand on sait que c’est justement « le business » et les grandes entreprises qui causent en grande partie le changement climatique, cela a de quoi inquiéter.
Les objectifs définis sous le gouvernement de David Cameron en matière climatique (une réduction de 57% des émissions de CO2 par rapport aux niveaux de 1990 en 2030) auront certainement des difficultés à être tenus dans ces conditions. Or, on sait que le changement climatique pourrait à court et moyen terme devenir un facteur déterminant de crises économiques…
Le département de l’environnement, dirigé par une climato-sceptique ?
Il ne reste donc aujourd’hui qu’un seul organe dédié entièrement à la question du développement durable dans le cabinet de Theresa May : le département Environnement, alimentation et affaires rurales. Mais même pour ce département, les signaux envoyés par la nouvelle direction politique britannique ne sont pas très clairs. C’est en effet une responsable politique connue pour avoir tenu des positions ambigües sur le changement climatique qui a été nommée à la tête du Secrétariat d’Etat à l’Environnement.
En 2012 et 2016, elle avait en effet voté contre les projets de loi britanniques proposant d’instaurer des cibles de réduction des émissions de CO2. A sa nomination au département de l’énergie en 2015, elle s’était même officiellement interrogée sur la véracité du changement climatique. Elle avait en outre voté contre les propositions d’allouer un budget à la recherche sur le stockage du carbone, mais avait voté pour la vente des forêts domaniales britanniques.
Bref, à priori, on peut s’inquiéter que la principale responsable des questions environnementales en Grande-Bretagne soit une responsable politique n’ayant jamais vraiment soutenu ni la protection de l’environnement, ni la lutte contre le changement climatique. Cela semble en tout cas être le signe qu’après le Brexit, le climat et l’environnement passent bien, comme nous l’avions écrit le 23 juin dernier, au second plan dans la stratégie britannique.