Après le Brexit, un nouveau mouvement politique prend forme au Royaume-Uni : le Clexit. L’idée : faire sortir le pays de la COP21 et des traités internationaux sur le climat, au moment où le monde a le plus besoin de cohésion sur ce sujet.
Moins de deux mois après le Brexit, et après avoir retiré le réchauffement climatique des priorités ministérielles nationales, la Grande-Bretagne débat d’une nouvelle sortie : celle de la COP21. Au moment du Brexit, nous avions tenté d’imaginer sur e-RSE.net à quoi ressemblerait la politique européenne en matière de développement durable après une sortie de l’Union-Européenne par la Grande-Bretagne. Le constat que nous faisions, relayant l’avis de nombreux experts, était qu’après le Brexit, la politique environnementale britannique serait fragilisée, affectant du même coup les efforts européens en matière d’environnement.
Un mois plus tard, Theresa May, nommée à la tête du gouvernement britannique, annonçait la suppression du secrétariat d’Etat chargé de la lutte contre le réchauffement climatique, pour le suborner au département des affaires industrielles. Symboliquement, cela ouvrait la porte à une disparition du réchauffement climatique des priorités de l’agenda politique Outre-Manche.
Certains n’ont pas tardé à s’engouffrer dans cette porte, en demandant purement et simplement le retrait du Royaume-Uni (et des autres pays) des traités internationaux sur le changement climatique, et notamment de la COP21. Le nom de ce mouvement ? Clexit, pour COP21 et exit. C’est Christopher Monckton, consultant et polémiste réputé pour ses positions climato-sceptiques, qui a lancé l’idée et qui préside Clexit. Leur slogan est simple : « Leading the great escape ».
Sortir de la lutte contre le réchauffement climatique pour privilégier l’économique ?
L’idée du groupe est on ne peut plus claire : faire pression sur les gouvernements et les institutions publiques, et créer un mouvement populaire dans le but de mettre un coup d’arrêt à la politique de lutte contre le réchauffement climatique. Officiellement, le but de la manoeuvre est de permettre aux entreprises et au secteur privé de retrouver leur dynamisme en mettant fin aux prétendues limites posées par la COP21 et les autres traités sur leurs activités.
Selon la logique du Clexit, la COP21 ou encore le Protocole de Montréal « étranglerait les économies avancées » avec des limitations « inutiles », des taxes carbones « contre productives » et des politiques trop coûteuses. Les politiques climatiques auraient d’ores et déjà « tué la vraie industrie, en enrichissant l’énorme, artificielle et parasitaire industrie climatique […] », mais aussi ruiné les fonds publics via des subventions pour les « technologies défaillantes des énergies renouvelables ». Retrouver l’intégralité de la déclaration sur le site web : clexit.net.
Clexit : climato-scepticisme, rejet de la science, rejet de la protection de l’environnement
Le groupe rassemble en effet de nombreuses figures connues du climatosceptisme. Le président Christopher Monckton est ainsi réputé pour être le climatosceptique le plus cité par ses pairs malgré son absence de formation scientifique et les multiples désinformations scientifiques qu’il fait circuler sur le sujet du climat. On peut aussi citer Marc Morano, lobbyiste de la lutte contre les politiques climatiques, régulièrement financé par ExxonMobil et l’industrie pétrolière et du charbon, ou encore Vis Forbes, géologue australien et Chairman de la Carbon Sense Coalition, dont l’objectif est de défendre publiquement « le rôle du charbon sur la terre et dans l’atmosphère », affilié à tous les grandes compagnies d’exploitation du charbon (Burton Coal, Dalrymple Bay Coal Terminal, South Blackwater Coal Mine…).
Clexit est donc un rassemblement hétéroclite de personnalités ayant trois points communs : leur affiliation aux grands groupes pétroliers et aux industries du charbon, leur rejet de la science et des faits établis par la science et leur rejet de toutes les politiques de protection de l’environnement.
Clexit : contre l’urgence du changement climatique
Malgré tout, leur argumentation et leur mouvement devrait avoir du mal à éclore. En effet, l’urgence du réchauffement climatique est unanimement acceptée, aussi bien dans le milieu scientifique (97% des scientifiques valident l’origine humaine du changement climatique et la dangerosité de ses effets), que dans le milieu politique puisque plus de 160 pays ont d’ores et déjà signé l’Accord de Paris sur la COP21.
Tout indique que le réchauffement climatique est à la fois l’enjeu économique et écologique de notre siècle : outre les dégâts (inondations, incendies) liés au changement climatique, on estime que le réchauffement pourrait, si on ne fait rien, coûter à nos sociétés environ 5 500 milliards d’euros, soit environ 3 fois le PIB annuel de la France. Le réchauffement climatique est également considéré par les experts en sécurité mondiale comme le premier risque pour la sécurité internationale, devant le terrorisme.
Crise économique, problèmes sociaux, multiplication des catastrophes écologiques : le coût réel du réchauffement climatique est pratiquement impossible à définir tellement il est élevé. À ce titre, Clexit semble être un vrai anachronisme politique, à contre courant de toutes les preuves avancées depuis une cinquantaine d’année par la communauté scientifique. Malgré tout, ce mouvement prouve une chose : le réchauffement climatique, malgré les efforts de sensibilisation mis en place partout dans le monde, ne fait pas encore partie des préoccupations de tous les citoyens.