Comme chaque mois, les données satellites qui analysent la santé de l’Arctique et de l’Antarctique nous renseignent sur l’évolution de notre climat. Et ce mois-ci, les données sont plutôt alarmantes ! La glace arctique et antarctique vient de battre (largement) un record : celui du niveau de glaciation le plus bas jamais enregistré.

La fonte des glaces arctiques en accélération

Ces dernières années, les données notaient déjà une forte diminution de la quantité moyenne de glace en arctique. En 2012, le niveau des glaces avait atteint son plus bas niveau jamais enregistré ce qui poussait, déjà à l’époque, les spécialistes à s’inquiétaient des conséquences de cette fonte des glaces.

Et cette année, les scientifiques ont encore de quoi s’inquiéter : 2016 vient de battre très largement le record de 2012. La glace en Arctique a perdu environ 20% de sa surface cette année par rapport aux années de référence (moyenne calculée sur la période 1981 – 2010). Il n’y a plus que 8.6 millions de km2 de glace en arctique, contre près de 10.7 millions de km2 en temps normal. Par rapport à 2007, l’Arctique a perdu une quantité de glace équivalente à la surface d’un pays comme l’Irak… Et par rapport aux années de référence, la région a perdu une surface de glace équivalente à celle du Mexique.

On le sait, à la fin de l’été et au début de l’automne, la glace arctique est à son plus bas niveau annuel. Pendant les mois d’été et jusqu’en septembre, la glace fond avant de se reconstituer progressivement pendant l’hiver quand les températures diminuent. Mais depuis quelques années, on constate deux choses : d’abord, la glace fond de plus en plus chaque été, et ensuite, elle se reconstitue de moins en moins facilement pendant l’hiver. Cette année, le phénomène est particulièrement marqué. Alors que l’on s’approche du début de l’hiver, la glace se reconstitue lentement. Et c’est plutôt logique ; les études les plus récentes sur les températures terrestres montrent que l’Arctique est désormais plus de 6 degrés au dessus des niveaux préindustriels…

La diminution de la glace arctique
La diminution de la glace arctique

Le pôle Sud en danger : la fonte des glaces antarctiques

Mais un constat est peut-être encore plus alarmant… La glace antarctique diminue également ! Jusqu’à maintenant, la glace antarctique ne diminuait pas d’années en années. Elle avait même tendance à remonter à cause d’une multitude de facteurs locaux (climatiques et géographiques) qui accéléraient la formation de glaces maritimes autour du continent antarctique en hiver. La particularité géographique et climatique de l’Antarctique avait jusque là plus ou moins épargné les glaces de la région d’une vraie diminution tendancielle.

Mais cette année, même les glaces du pôle Sud semblent menacées. La quantité de glace dans cette région est largement en dessous des niveaux moyens des années de référence…

 

La diminution de la glace Antarctique
La diminution de la glace Antarctique

Globalement, la glaciation est à un niveau extrêmement bas, et même si les taux de croissance de la glace ont retrouvé des niveaux « normaux » avec la baisse des températures ces derniers jours aux pôles, la glace n’atteindra vraisemblablement pas un niveau normal au coeur de l’hiver. Au niveau global, la fonte conjuguée de la glace en Arctique et en Antarctique nous amène à des niveaux jamais atteints de diminution de la surface glaciaire.

La fonte des glaces au niveau global
La fonte des glaces au niveau global

Pourquoi les pôles se réchauffent plus que le reste de la Terre ?

Cette fonte brutale est le signe que le réchauffement s’accélère. On le voit particulièrement bien sur les pôles, car ces zones se réchauffent plus rapidement que le reste de la planète.

Ce phénomène (qu’on appelle parfois amplification polaire) est en grande partie dû à deux phénomènes : d’abord la diminution de l’albédo. Comme la glace est blanche, elle a tendance à renvoyer les rayons du soleil (et la chaleur) vers l’atmosphère. C’est l’albédo. Quand la glace fond, l’albédo diminue, donc la chaleur augmente et c’est un cercle vicieux qui s’installe. Ensuite, le deuxième facteur à l’oeuvre, découvert plus récemment est lié à l’accumulation d’énergie vers les pôles (notamment au nord) à cause de la structure des courants marins et aériens de l’atmosphère. En résumé, la structure complexe des courants marins, des déplacements de masses d’air dans l’atmosphère, entraîne une accumulation plus importante de l’énergie vers les pôles et notamment au nord.

Les pôles se réchauffent donc plus vite que le reste du monde, et cela en fait de bons indicateurs des conséquences possibles du réchauffement climatique et de son intensité.

Fonte des glaces aux pôles
Fonte des glaces aux pôles

Les conséquences de la fonte des glaces

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, ces fontes impressionnantes ne sont pas qu’une question de survie des ours polaires. Ce sont des données vraiment inquiétantes. En effet, la fonte des glaces a des conséquences très importantes sur l’éco-système global, sur les courants marins, sur la composition des eaux océaniques… Si la fonte de l’Antarctique se confirme dans les années à venir, ce sont potentiellement 30 millions de km3 de glace qui seront menacés de fonte. Si la totalité de ces glaces d’eau douce fondait, le niveau de la mer monterait de près de 60 mètres. Mais ce n’est pas tout : la fonte des glaces, que ce soit en Arctique ou en Antarctique pourrait (en conjonction des autres perturbations climatiques) modifier les cycles océaniques : plus d’évaporation en haute mer, donc des risques météos plus importants, diminution de la salinité des courants, notamment des eaux de surface de l’Atlantique Nord… Une perturbation durable des courants océaniques et des cycles de l’eau affectera nécessairement les sociétés humaines, avec une augmentation de l’incidence des inondations, mais aussi un bouleversement de la circulation des masses d’air, donc de la probabilité de tempêtes et d’évènements météo extrêmes.

Il est encore difficile d’évaluer si cette tendance forte de fonte sera durable ou si elle se rétablira, mais une chose est sûre : en matière de climat, des conséquences sérieuses commencent déjà à apparaître. Et pendant ce temps là, l’écologie est encore un sujet largement absent des débats politiques, à 6 mois seulement de l’élection présidentielle et des législatives 2017.