Loin des caricatures habituelles, les fêtes de fin d’année « écolos » ne doivent pas être perçues comme des événements moroses, bien au contraire. Dès cette année, la convivialité devra être au cœur des festivités.
Les fêtes de fin d’année approchent au grand bonheur d’une partie des ménages pour qui ces festivités représentent une tradition et un moment de convivialité et de partage. Mais ces périodes nous ramènent aussi à notre condition de consommateurs. Noël c’est aussi la démesure, la consommation de masse, la surconsommation…
Certains pourraient répliquer que les fêtes de fin d’année ne sont que quelques jours dans une vie. Et ils auraient peut-être raison. Si on regarde les chiffres donnés par l’Agence de la Transition Écologique (ADEME) dans une étude réalisée en collaboration avec Goodwill et ObSoCo, Noël et le Nouvel An ne représentent que 1% des émissions annuelles d’un français moyen. Dit comme ça, cela semble peu.
Et chaque année, les mêmes critiques reviennent pour discuter du caractère polluant des cadeaux, du sapin, des décorations…
Réduire un seul % de pollution quitte à réduire les fêtes de fin d’années tant appréciées à un événement morose, sans joie, ni couleur. Une seule guirlande par ménage pour orner un sapin en plastique, un cadeau fabriqué à la main, des fêtes de préférence en “visio”, un steak de soja et des lentilles pour le repas…
Bienvenue dans le monde de demain que proposent les écolos.
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Des fêtes de fin d’année polluantes
Penser comme cela, c’est néanmoins retourner le problème. C’est faire abstraction d’abord de la crise écologique actuelle. Les fêtes de fin d’année sont polluantes, et chaque gramme de gaz à effet de serre (GES) émis dans l’atmosphère nous éloigne de nos engagements pris envers la nature. Les cadeaux, les déplacements, les repas, les décorations, et les déchets produisent 6 294 kilotonnes d’émissions d’équivalent CO2 chaque année, soit 215 kilogrammes eq CO2 par ménage et 94 kilogrammes eq CO2 par personne. Les émissions d’une seule personne correspondent à un peu plus de 400 km parcourus en voiture.
Car outre les déplacements, le deuxième secteur d’émissions de GES lors des fêtes qui représentent 25 % des émissions totales, ce sont bien des cadeaux (57% des émissions totales) et de l’alimentation (15% des émissions totales) d’où proviennent la majorité des pollutions, le reste étant plutôt anecdotique (2% pour la décoration et 1% pour les déchets).
Noël n’est aujourd’hui pas plus une fête traditionnelle qu’une célébration de la consommation de masse par les industriels. Pourquoi ne pas faire du Black Friday une fête annuelle où l’on se retrouverait gaiement pour partager un bon repas après avoir acheté le dernier smartphone haut de gamme ou le parfum à la mode ?
Alors oui, 1%, cela semble peu. Mais ce n’est pas comme si le reste de l’année la consommation était plus responsable. Pointer du doigt certaines dérives délétères des fêtes de fin d’année n’est pas un appel à les rendre moins joyeuses, moins entraînantes, moins conviviales.
C’est un appel à questionner nos modes de consommation à l’aune d’une crise sans précédent pour les sociétés humaines. Le sondage réalisé pour l’étude de l’Ademe menée avec 1252 répondants souligne ainsi que sur environ 300 millions de cadeaux offerts chaque année, au moins 12 millions sont jugés par celles et ceux qui les reçoivent comme inutiles, et que 83% des personnes interrogées considèrent que la quantité de plats est excessive par rapport au nombre de convives.
En gros, on consomme trop et souvent pour rien.
Passer de la surconsommation à des fêtes durables et conviviales
Malgré une actualité chargée sur la crise climatique, moins d’un cinquième des Français pense réellement aux impacts environnementaux lors des fêtes. L’étude révèle un blocage majeur : le manque de connexion entre les festivités et les enjeux écologiques, laissant la question environnementale en marge des préoccupations festives. Pire, les repas végétariens et les cadeaux « fait maison » sont plutôt combattus dans la société française. L’écologie est perçue comme liberticide, autoritaire, sans plaisir.
Ce constat est une faiblesse depuis longtemps identifiée par les mouvements écologistes. L’écologie n’a pas encore réussi à conquérir les imaginaires, à rendre attrayante et désirable cette société plus écologique. À la rendre plus « conviviale », au sens que lui donne le philosophe et penseur de l’écologisme Ivan Illich, c’est-à-dire, développer une société frugale dont les fondations ne reposent plus sur un système productiviste de consommation de masse et de surconsommation, mais sur un système durable de partage et d’entraide.
Comme le rappelle le philosophe français Thierry Paquot dans un article de la revue en ligne Topophile, « Il y a donc deux convivialités, l’une qui se veut « sympathique » et l’autre, plus exigeante, qui réclame un « art de vivre » caractérisé par la survie, l’équité et l’autonomie créatrice ».
Cet art de vivre redéfinit les codes des fêtes de fin d’année. Va-t-on perdre cette chère convivialité « sympathique » en offrant moins de cadeaux ? En privilégiant un smartphone reconditionné au lieu d’un produit neuf ou un voyage en train à la place d’un voyage en avion ? En cuisinant un repas végétarien au lieu d’un assortiment “Terre et mer” ?
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La réussite des fêtes de fin d’année dépend-elle vraiment de cela ?
Faire l’expérience de cette forme de convivialité durable permet de relativiser les potentielles pertes entraînées par cette transformation que doit entamer la société. Ce monde plus « écolo” n’est pas plus ou moins triste que celui dans lequel nous vivons actuellement. Seulement, il permet au contraire de son pendant capitaliste de réduire rapidement l’impact des activités humaines sur l’environnement.
La consommation responsable, les écogestes ou le boycott ne pourront pas résoudre à eux seuls la crise environnementale, c’est certain. Mais ils permettent d’influer sur les stratégies d’entreprise qui, en réponse aux mouvements des marchés, devront adapter leurs activités si elles veulent continuer d’exister.
Photo de Lucie Liz sur Pexels.