L’ORSE, en partenariat avec l’IFA et PwC vient de lancer son baromètre de la RSE dans les conseils d’administration. Résultat ? Un bilan mitigé, qui montre que les administrateurs peinent encore à s’emparer des sujets sociaux et environnementaux.
La Loi PACTE a consacré une nouvelle définition de l’entreprise, qui se doit désormais d’être gérée en prenant en compte les enjeux sociaux et environnementaux en plus du seul intérêt économique et financier. Sur le plan conceptuel, cette évolution majeure devrait avoir l’effet de consacrer la place centrale de la RSE dans le monde de l’entreprise.
Pour en avoir le coeur net, l’ORSE (Observatoire de la RSE) en partenariat avec l’IFA (Institut Français des Administrateurs) le cabinet de conseil PwC ont sondé les conseils d’administration sur leur manière d’intégrer ou non la RSE à leurs prises de décision et publient donc un baromètre sur la place de la RSE dans les conseils d’administration. Alors, que peut-on tirer de cette première édition du Baromètre de la RSE dans les conseils d’administration ? Un bilan plutôt médiocre : la RSE peine encore à intégrer pleinement les prises de décision dans les CA. Creusons les chiffres.
La RSE dans les conseils d’administration : toujours pas
Pour réaliser ce baromètre, l’ORSE, l’IFA et PwC ont interrogé 200 membres de conseils : les dirigeants de sociétés françaises membres de l’IFA, les administrateurs représentant les salariés (ARS) et les administrateurs représentant les salariés actionnaires (ARSA) membres des organisations syndicales adhérentes de l’ORSE. Plusieurs questions leur ont été posées, notamment sur leur degré d’implication dans la RSE en général, et sur différents sous thèmes : climat, biodiversité, équité homme-femme, etc. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que les conseils d’administration sont encore très loin de prendre sérieusement en charge les questions RSE.
D’abord, moins de 22% des interrogés affirment que leur conseil est pleinement associé à la définition de la stratégie RSE de l’entreprise, à travers la formulation d’axes, la consultation puis la validation du plan d’action RSE. En d’autres termes, l’écrasante majorité des conseils d’administration n’ont qu’une implication minimale dans la définition et la mise en place de la politique de responsabilité sociale et environnementale de leur organisation, puisqu’ils ne sont impliqués qu’à titre consultatif ou de validation. 8% des conseils affirment même qu’ils ne sont pas du tout impliqués dans la formulation ou la validation de la stratégie RSE.
Quand on creuse les différents items de la RSE, les résultats ne sont pas tellement meilleurs. Moins de 60% des conseils concernés disent discuter de la DPEF (Déclaration de Performance Extra-financière), alors que son approbation est normalement une prérogative des conseils d’administration. Lorsqu’on demande à ces conseils ce que la prise en compte de la DPEF a changé à leur perception de la RSE dans leur organisation, la majorité (58%) répond « pas de grand changement », « aucun changement » ou « ne sait pas ».
La raison d’être de l’entreprise, le climat et les parties-prenantes : ignorés par les administrateurs
Même constat pour la raison d’être de l’entreprise. La raison d’être, qui est supposée la boussole qui définit et précise le projet stratégique de l’organisation et sa contribution à l’intérêt général, n’est un sujet d’implication réelle que pour 18% des conseils. 10% seulement des conseils concernés disent que la raison d’être est systématiquement prise en compte dans la prise de décision. Une boussole qu’on oublie de regarder, donc.
Entre autre chiffres, on retiendra aussi que 6.8% des conseils seulement disent prendre systématiquement en compte les attentes de leurs parties prenantes dans la définition de la stratégie RSE de l’entreprise. Ou que seuls 6.1% des conseils déclarent se poser systématiquement la question de l’impact climatique lorsqu’ils prennent des décisions stratégiques. On ne s’étonnera donc pas que les émissions de CO2 des entreprises françaises soient en hausse constante, malgré les accords internationaux signés par la France sur le sujet.
Une implication minimale sur l’engagement social et environnemental
Clairement, pour des conseils d’administration réellement impliqués dans la stratégie d’impact social et environnemental de leur organisation, on repassera. Mais d’une certaine manière, ce constat est logique, car rien ne pousse les administrateurs ou les dirigeants à assurer le service minimum en matière d’engagement social et environnemental.
Sur la question des rémunérations, par exemple, les chiffres sont criants : 86% des sondés déclarent que les critères RSE concernent moins de 20% de la part variable de la rémunération des dirigeants. Les dirigeants n’ont donc à l’heure actuelle toujours pas d’incitation financière à se préoccuper des impacts sociaux et environnementaux de leur entreprise.
Et d’ailleurs, les administrateurs représentant les salariés ressentent ce déficit d’implication : 15% de ces administrateurs représentants des salariés estiment que les conseils ne sont pas du tout impliqués dans la stratégie RSE de leur organisation (deux fois plus que pour l’ensemble des sondés). 62% estiment que le temps consacré à ces sujets dans les conseils est insuffisant (contre 48% pour l’ensemble des sondés). Il y a donc un décalage entre la perception des administrateurs et dirigeants et celle des représentants des salariés sur ce sujet.
Face à ce constat d’échec, on ne peut donc que souscrire aux recommandations formulées dans le rapport : mieux former les conseils d’administration aux enjeux RSE, renforcer le dialogue entre les différentes parties prenantes de l’entreprise, et mettre la RSE au coeur des prérogatives du CA.
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