Euro 2016 et environnement : quel est l’impact environnemental d’une compétition comme l’Euro ? À quel point la compétition pollue-t-elle notre planète ? Que font les autorités du football pour réduire cet impact ? Retour sur quelques chiffres qui vont vous surprendre.
Le 10 juin, l’équipe de France de Football ouvrira face à la Roumanie l’Euro 2016. Au programme, 51 matchs entre 24 équipes dans 10 stades partout en France. La compétition va durer plus de 31 jours et attirer en France près de 2.5 millions de spectateurs. Les coûts et les recettes de cet évènement monstre sont estimés en milliards de dollars, et la France ainsi que l’UEFA estiment que la compétition aura un impact économique positif.
Mais qu’en est-il de l’impact environnemental de ce type d’évènements ? La gestion d’une compétition de si grande ampleur a-t-elle des effets négatifs sur la pollution et sur l’environnement ? Et surtout, que font les organisateurs pour que l’Euro 2016 soit le plus écolo possible ? Avant de profiter des matchs, tentons d’évaluer l’impact environnemental de la plus grande compétition de foot européenne.
L’impact environnemental d’un match de football à l’Euro 2016
Comme on peut s’en douter, un évènement d’une si grande ampleur rime forcément avec un impact environnemental fort. Éclairer les stades, les chauffer ou les climatiser, entretenir les pelouses : tout ça utilise de l’énergie, de l’eau et des ressources. Retransmettre les matchs à la télévision et sur Internet également. Transporter les spectateurs sur les différents lieux veut aussi dire consommer du carburant. Et c’est sans compter sur la production de déchets dans les stades, l’alimentation et la consommation de boissons durant l’évènement… Au final, les retombées environnementales d’un évènement comme l’Euro 2016 sont énormes.
Toutefois, il est difficile de quantifier exactement l’impact carbone de telles rencontres, car les stades ne fournissent généralement pas ce type de données. On peut toutefois faire des approximations. Prenons par exemple le Stade de France, qui accueillera 7 matchs durant la compétition. Si l’on en croit la première version du rapport RSE du Stade de France, l’enceinte qui a vu le sacre de l’équipe de France en 1998 accueille chaque année 1.8 millions de spectateurs pour 27 manifestations par an en moyenne. Pour cela, le Stade a consommé en 2012 11.5 millions de kWh d’électricité, 76 000 litres de fuel domestique, et 10.5 millions de kWh de gaz naturel.
Si l’on convertit ces chiffres en termes de CO2 émis, on obtient 1035 tonnes de CO2 par an pour l’électricité, 62 tonnes de CO2 par an pour le fuel, et 582 tonnes de CO2 par an pour le gaz naturel. Si l’on considère que 20 % de ces impacts sont imputables directement aux soirs de matchs ou de concerts (ce qui est probablement en dessous de la réalité), cela correspondrait environ à 13 tonnes de CO2 par évènement donné au Stade de France. C’est l’équivalent de 13 avions faisant l’aller retour entre Paris et New York.
Si les matchs ayant lieu dans ce stade pendant l’Euro correspondent à cette moyenne, cela voudrait dire que les 7 matchs ayant lieu au Stade de France émettraient à eux seuls 91 tonnes de CO2. Cela représente plus de 550 000 km en voiture, soit l’équivalent de 27 allers retours Paris-Bangkok. Rien que pour éclairer le stade un seul soir de match, il faudrait environ 100 000 kWh d’électricité, soit l’équivalent de la consommation de près de 20 ménages pendant 1 an. Et pour avoir l’impact de l’Euro dans son ensemble, il faudrait encore ajouter les 41 autres matchs ayant lieu pendant la compétition dans les autres stades.
En 2007, les organisateurs de la Coupe du Monde de Rugby (une compétition d’une importance équivalente) qui avait lieu en France avaient demandé une étude d’impact environnemental. Les résultats sont plutôt proches de ces données puisque l’empreinte énergétique de l’évènement était de 4 700 000 kWh pour 48 matchs, soit environ 9 tonnes de CO2 émises à chaque match.
Mais il faudrait encore ajouter à cette consommation énergétique la quantité d’eau utilisée pour entretenir les pelouses (36 000 000 de litres d’eaux sont utilisés chaque année pour entretenir les pelouses du Stade de France, soit environ 720 000 douches), les ressources pyrotechniques utilisées dans les stades, ou encore les déplacements des joueurs entre leurs camps de base et les stades.
L’impact environnement du sport, c’est surtout les spectateurs
Mais tout cela n’est rien face à l’impact environnemental… des spectateurs ! En effet, durant une compétition comme l’Euro, ce qui pollue le plus, ce ne sont ni les installations pharaoniques des stades ni les canettes de bières produites pour les soirs de matchs. Ce sont en effet les fans qui polluent le plus durant un évènement comme l’Euro. D’abord, parce que ce sont eux qui consomment et produisent des déchets : des quantités astronomiques de déchets sont produites pendant les matchs (cup, emballages, canettes…). En 2007 pendant la coupe du monde de rugby, on a produit 778 tonnes de déchets dans les stades soit l’équivalent de la production de déchets en 1 an de plus de 2000 français. L’affluence pour l’Euro 2016 promettant d’être encore plus forte, le chiffre devrait lui aussi être élevé.
Mais surtout, ce qui a un impact environnemental énorme durant un évènement sportif comme l’Euro 2016, ce sont les déplacements des spectateurs. En effet, entre les spectateurs des différents pays qui vont venir en France, puis des déplacements des spectateurs entre les différents stades en France (Paris, Bordeaux, Lyon, Marseille, Nice ou encore Saint-Etienne), l’empreinte carbone devient vite gigantesque. Selon le Bilan Carbone réalisé pour la Coupe du Monde de Rugby en 2007, 84% des émissions de CO2 de l’évènement étaient liées aux déplacements des spectateurs, soit environ 480 000 tonnes de CO2 ! Entre les déplacements en avion, en train ou en voiture, pour des centaines de milliers voire des millions de spectateurs, les compteurs montent très rapidement.
Et si en plus on s’attarde sur l’impact environnemental de la diffusion d’un tel évènement (dans les fanzones, à la télévision ou en streaming sur Internet), les chiffres deviennent vraiment vertigineux. Avec des dizaines (voire des centaines) de millions de téléspectateurs, et des centaines de milliers de spectateurs réunis derrière les écrans géants des fanzones, la consommation d’énergie s’alourdit encore. Et c’est sans compter sur la diffusion en streaming qui est extrêmement coûteuse en termes énergétiques et environnementaux (pour plus d’informations, voir notre infographie « L’impact environnemental d’Internet« )
Sport et développement durable : les efforts du secteur
Le monde du sport, conscient de l’impact environnemental de ce genre d’évènements met malgré tout en place de plus en plus d’initiatives pour améliorer son bilan écologique.
D’abord, pour l’Euro 2016 deux stades particulièrement vertueux en termes écologiques ont été choisis : le stade Allianz Riviera à Nice et le stade Geoffroy-Guichard à Saint-Etienne. Le premier est l’un des seuls stades « à énergie positive » de France, équipé de plus de 7 000 m2 de panneaux solaires. Il produit donc 1500 MWh par an ce qui lui permet d’être « neutre » en termes énergétique et en fait le stade le plus écolo de l’Euro. Le deuxième, le Stade des verts, porte plutôt bien son nom puisqu’il est de son côté équipé de 2 600 m2 de panneaux photovoltaïques. Le Stade Océane du Havre, lui aussi à énergie positive, aurait également pu être choisi pour ses qualités écologiques, mais sa capacité de 25 000 places était insuffisante pour un évènement de cette ampleur.
De leur côté, les autres stades (comme le Stade de France) ont mis en place un certain nombre de stratégies afin de résoudre leurs impacts environnementaux. Le Stade de Saint-Denis a ainsi élaboré une stratégie de réduction de ses déchets grâce aux eco-cups, ainsi qu’un programme de récupération des invendus alimentaires avec l’Association Chaînon Manquant, qui a récolté en 2014 près de 2000 repas pour les plus démunis. Le Stade a également mis en place un programme de soutien à la reforestation pour tenter de compenser ses émissions de CO2.
D’une manière générale, le monde du sport s’attache à être plus responsable. L’UEFA a ainsi développé plusieurs programmes afin d’atténuer son impact environnemental, en demandant notamment aux stades accueillant les matchs de mettre en place des politiques d’optimisation énergétique ou de réduction des déchets. Lorsqu’on observe les promesses faites il y a un an dans le rapport RSE préliminaire de l’Euro 2016 de l’UEFA, on se rend compte que beaucoup n’ont pas été tenues : le stade de Bordeaux n’a finalement pas de panneaux solaires, ni celui de Lyon… En revanche certains objectifs sont intéressants : un taux de recyclage annoncé à 50%, une stratégie d’approvisionnement responsable, un tournoi sans tabac…
Si le sport et en particulier l’Euro 2016 sont loin d’être green, on voit quand même que des efforts sont faits par les acteurs du secteur pour que sport rime avec durable. Avant de vous rendre au stade pour profiter de la beauté du sport, n’oubliez donc pas vous non plus de penser (un peu) à l’écologie !
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