La 63ème session de la Commission de la Condition de la Femme (CSW63) de l’ONU, avec pour thème prioritaire les systèmes de protection sociale, l’accès aux services publics et les infrastructures durables au service de l’égalité des sexes et de l’autonomisation des femmes et des filles, s’est ouverte le 12 mars dernier, au siège de l’ONU à New York. L’ouverture des débats a été l’occasion pour 15 femmes d’influence de lancer un appel pour encourager une participation accrue des femmes à l’exercice du pouvoir.
Les postes à responsabilités encore trop peu confiés aux femmes
Dans la sphère politique, le nombre de femmes au sommet de l’Etat reste plus que limité : alors qu’il y a plus de 190 Etats dans le monde, en 2018, seuls 21 d’entre eux étaient dirigés par des femmes. Les résultats ne sont guère plus encourageants dans le milieu des affaires. En effet, en France l’année dernière, seulement 2% de femmes étaient à la tête des sociétés du CAC 40, contre 6% au Royaume-Uni et 8% aux Etats-Unis selon le rapport Route to the Top 2017.
C’est pourquoi 15 femmes, leaders dans le monde politique – parmi lesquelles figure entre autres cinq cheffes d’Etats et de gouvernement, la cheffe de la diplomatie européenne, la Présidente de l’Assemblée générale de l’ONU et sa vice-présidente – ont appelé leurs homologues masculins à en faire davantage pour permettre aux femmes de prendre part aux décisions mondiales.
« Il n’y aura pas de plus grand bond en avant pour l’humanité que la réalisation d’une véritable égalité pour les femmes et la reconnaissance véritable de leur potentiel, de leur valeur et de leur force » ont-elles déclaré, insistant sur le fait que : « le leadership des femmes est plus que jamais nécessaire » pour surmonter les différentes crises auxquelles le monde doit faire face.
Cet appel résulte du constat que les progrès en matière d’accès des femmes aux postes à responsabilités, tant dans le domaine public que privé, sont peu satisfaisants. Alors qu’en 2015, il était prévu que la parité dans l’accès aux fonctions à hautes responsabilités serait atteinte à l’horizon 2050, compte-tenu de la tendance actuelle : « il nous faudra 107 ans pour l’atteindre » déplore la Présidente de l’Assemblée générale de l’ONU et ancienne ministre équatorienne, María Fernanda Espinosa Garcés, précisant que : « Nous sommes confrontées à un revers et l’événement d’aujourd’hui est essentiel pour renverser cette situation ».
Dans ce contexte, Maria Fernanda Espinosa Garcés, après avoir énoncé les difficultés auxquelles doivent faire face les femmes au pouvoir – notamment la résistance au sein de leur parti, les critiques sur leur tenue vestimentaire et les intimidations – a rappelé que l’égalité des sexes et la participation des femmes à la vie politique est une réelle opportunité, qui renforce la stabilité économique et les processus de négociations de la paix. En effet, lorsque des femmes participent à la négociation de tels accords « la possibilité que l’accord dure plus de quinze ans augmente de 35% ».
Les huit mesures préconisées pour permettre aux femmes d’accéder au pouvoir
Ainsi, l’appel «Femmes au pouvoir – un appel à agir » liste huit mesures destinées à renforcer l’égalité homme-femme au sein des hautes fonctions publiques et privées. Ces mesures sont, en résumé, les suivantes :
- Renforcer la capacité des femmes à participer à la vie politique ;
- Travailler avec les femmes influentes du monde entier pour qu’elles puissent accéder aux hautes fonctions politiques ;
- Renforcer et créer des synergies parmi les réseaux qui favorisent l’accès à la vie politique des femmes ;
- Promouvoir des cadres juridiques permettant aux femmes d’accéder à la vie politique sans discrimination ;
- Elaborer des mesures pour lutter contre la violence à l’égard des femmes politiques sous toutes ses formes ;
- Adopter des stratégies qui garantissent la participation des femmes à l’économie et à la société ;
- Donner la priorité aux dispositifs d’éducation des filles et à l’autonomisation économique des femmes ;
- Créer un environnement dans lequel l’égalité des sexes est respectée.
Aussi, alors pour la première fois dans l’histoire, la parité est au sein du Conseil de l’ONU, les progrès à réaliser en matière d’accès des femmes aux postes à responsabilité restent donc nombreux. « Plus que jamais, nous devons unir nos forces, agir vite et agir maintenant, pour le bien de l’humanité tout entière », ont conclu les 15 signataires de l’appel.
L’appel « Femmes au pouvoir – un appel à agir » a depuis lors déjà recueilli le soutien de 600 personnalités politiques, du monde des affaires et de la société civile.
Les signataires de l’appel « Femmes au pouvoir – un appel à agir » sont :
- María Fernanda Espinosa Garcés, Présidente de l’Assemblée générale des Nations Unies ;
- Kolinda Grabar-Kitarović, Présidente de la Croatie ;
- Kersti Kaljulaid, Présidente de la République d’Estonie ;
- Dalia Grybauskaitė, Présidente de la Lituanie ;
- Bidya Devi Bhandari, Présidente du Népal ;
- Paula-Mae Weekes, Présidente de la République de Trinité-et-Tobago ;
- Katrín Jakobsdóttir, Première Ministre de l’Islande ;
- Sheikha Al Mayassa bint Hamad bin Khalifa Al Thani, Présidente des Musées du Qatar ;
- Mary Robinson, ancienne Présidente de l’Irlande, Présidente de la Fondation Mary Robinson – Justice climatique et Présidente des Elders ;
- Federica Mogherini, Haute représentante de l’Union Européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité et Vice-Présidente de la Commission européenne
- Marta Lucía Ramírez, Vice-Présidente de la République de Colombie ;
- Marina Pendeš, Ministre de la défense de Bosnie-Herzégovine ;
- Diene Keita, Ministre de la coopération et de l’intégration africaine de la République de Guinée ;
- Alenka Ermenc, Générale de division et cheffe d’état-major général des forces armées slovènes ;
- Muniba Mazari, artiste, ambassadrice humanitaire et nationale d’ONU Femmes au Pakistan.
Crédit image : femmes pouvoir sur Shutterstock