Et si l’on vous disait que par votre mode de vie, vous entretenez des formes modernes d’esclavage ? Combien d’esclaves travaillent pour vous ? Faites le test, et surtout, agissez pour mettre fin à ces pratiques.

Officiellement proclamée le 27 avril 1848 à Paris par le décret Schoelcher, l’abolition de l’esclavage reste un moment marquant dans l’histoire des Droits de l’Homme. Aujourd’hui encore, chaque année au mois de mai (le 10 mai en métropole, 27 mai en Guadeloupe, 22 mai en Martinique, 10 juin en Guyane, 20 décembre à la Réunion, 27 avril à Mayotte), on commémore cette journée qui a marqué la fin de l’esclavage institutionnel et légalisé en France. (Au passage, cliquez ici si vous souhaitez savoir pourquoi il existe plusieurs dates de commémoration de cette abolition.)

Mais plus de 150 ans plus tard, l’esclavage a-t-il vraiment disparu ? Pas vraiment. Jusque dans les années 1980, il existait encore des pays où l’esclavage était légal (c’était le cas notamment de la Mauritanie, qui fût le dernier pays à officiellement abolir cette pratique). Mais aujourd’hui encore, il existe des personnes en état de servitude totale, des esclaves modernes.

Quand notre mode de vie fait travailler des esclaves

Dans le monde, il existe encore près de 30 à 45 millions de personnes en état d’esclavage selon les différentes estimations. Les pays les plus touchés sont surtout des pays de la péninsule sud-est asiatique (l’Inde, la Chine, le Pakistan, la Birmanie, la Thaïlande …) et les pays d’Afrique centrale (République Démocratique du Congo, Nigeria…)

Cela paraît donc être une réalité lointaine, et on peut se demander quel est le rapport avec nous ou notre mode de vie. Pourtant, c’est bien essentiellement pour nous que travaillent ces esclaves. En effet, on estime que l’écrasante majorité de ces personnes en situation d’esclavage ou de travail forcé participent à la chaîne de production de grandes multinationales, bien souvent européennes ou nord-américaines, dont les produits sont consommés… surtout dans les pays développés !

Lorsque vous consommez des produits de grande consommation, de grandes marques, des produits de la vie quotidienne, il est donc probable que des esclaves aient participé à leur production.

Le travail forcé dans notre consommation quotidienne

De nombreux secteurs sont touchés par cette traite moderne d’être humains. Pensez-à votre t-shirt par exemple, non seulement il est probablement fabriqué dans l’un des pays les plus touchés par l’esclavage (Chine, Bengladesh, Pakistan) mais il est probablement fabriqué avec du coton, qui lui aussi provient de pays où l’esclavage est répandu. Par exemple, la culture et la récolte du coton en Ouzbékistan (l’un des plus grands producteurs mondiaux) est fréquemment dénoncée par les ONG internationales car elle implique la traite d’être humains et en particulier d’enfants.

Mais ce n’est pas tout : vos équipements électroniques et high tech (comme votre smartphone) ne pourraient probablement pas exister sans le travail d’esclaves. Par exemple, votre téléphone contient du coltan (un métal composite) dont 60 à 80% des réserves mondiales sont situées dans les régions autour de la République Démocratique du Congo, et dont la production est régulièrement pointée du doigt pour son implication dans l’esclavage moderne.

On pourrait ajouter à cette liste un certain nombre de productions alimentaires (café, soja, chocolat, céréales, produits de la pêche…), mais aussi de produits de la vie courante comme les produits d’hygiène (dont beaucoup contiennent du mica, dont la production impliquerait le travail forcé de dizaine de milliers d’enfants en Inde), ou des produits aussi diverses que l’informatique ou les bijoux qui contiennent des métaux ou pierres rares.

Et à tout ça, il faudrait rajouter tous les ouvriers qui sont impliqués dans la fabrication de ces équipements dans les pays considérés comme les usines du monde. Au final, de nombreux éléments de notre consommation impliquent le travail d’esclaves. Et sans doute plus que vous ne l’imaginez !

Combien d’esclaves travaillent pour vous ? Faites le test, et agissez en conséquences

Pour vous rendre compte de la façon dont votre mode de vie participe à cette traite moderne, l’association Made in a Free World a mis au point un outil dédié à cette question. L’outil se base sur les différentes études existantes sur l’esclavage moderne pour estimer comment votre mode de vie, vos achats, vos habitudes, participent à la perpétuation de l’esclavage, c’est à dire votre « Slavery Footprint » (empreinte esclavage). Grâce à cet outil, vous pouvez donc savoir comment changer votre consommation et comment agir pour ne plus soutenir cette réalité.

Le test est disponible ici : Slavery Footprint Test.

Voici le résultat de votre rédacteur préféré :

esclaves style de vie

Que faire pour éviter de participer à l’esclavage moderne ?

Alors bien sûr, il est difficile d’éviter totalement de participer à ce type de commerces. En effet, comme nous l’avons vu, l’écrasante majorité de ce que nous consommons implique le travail forcé d’individus. Mais il est toutefois possible de faire progresser la cause de la lutte contre l’esclavage moderne. D’abord en arrêtant ou en évitant de supporter les entreprises qui sont publiquement condamnées pour leur manque de transparence sur ces questions. De nombreuses multinationales ont été publiquement condamnées par de grandes ONG pour la gestion de leur supply chain, à vous de vous renseigner pour les connaître et les éviter. Ensuite, soutenir les réglementations qui visent à limiter ce type de pratiques, comme la toute dernière Loi de Vigilance, qui rend les entreprises en partie responsables du respect des lois tout au long de leur supply chain. Il est aussi possible de soutenir les entreprises qui portent réellement des pratiques de sourcing et d’approvisionnement éthiques (il en existe de plus en plus).

Mais cela signifie qu’il faut devenir un acteur de sa consommation, et ne pas se contenter de prendre ce qu’il y a sur les étals sans se demander d’où ils viennent et comment ils ont été produits. Parce qu’en achetant sans savoir, nous donnons de fait notre bénédiction à ce type de pratiques. Pour changer les choses, pour que notre consommation ne participe pas à soutenir ce type de pratiques, il faut prendre conscience de notre rôle. Il faut accepter que consommer, c’est en partie faire des choix.