Crues, inondations, averses… Tout cela est-il la conséquence du réchauffement climatique ? Illustration avec la crue exceptionnelle qui a frappé le Loiret ce 1er juin 2016. Vous allez enfin comprendre pourquoi il pleut plus et plus souvent à cause du réchauffement climatique.

Ce matin du 1er juin 2016, le Loiret s’est réveillé les pieds dans l’eau. Le Loing, affluent de la Seine enregistre alors sa plus grande crue depuis 1910, une crue « centennale ». On sait d’ores et déjà que cette crue aura des conséquences sociales et économiques fortes, il se peut même que la crue s’étende à la Seine et à la zone très urbanisée de l’Île de France.

Mais cette crue est-elle une simple anomalie météo ponctuelle, ou y’a-t-il des causes plus profondes ? Analysons les liens entre la crue de 2016 et le changement climatique

Crues, précipitations et réchauffement climatique

Les spécialistes du climat et des phénomènes météorologiques ont compris depuis plusieurs années les liens qui unissent le cycle de l’eau et le changement climatique. Spontanément, lorsqu’on pense à un monde qui se réchauffe, on pense à un monde plus sec, plus désertique. D’ailleurs, lorsque les journaux parlent de changement climatique, ils illustrent souvent leurs articles par des images de sols desséchés et arides (oui, nous sommes coupables nous aussi). Mais en fait, au niveau global, on aurait plutôt tendance à observer le phénomène inverse. Un monde plus chaud c’est d’abord un monde plus humide.

Pour le résumer de façon simple, voici comment le phénomène fonctionne d’après l’Environmental Protection Agency américaine. La terre est couverte de 70% d’eau. Lorsque les températures augmentent, cette eau s’évapore plus. Mais cette eau ne disparaît pas, elle continue à exister sous forme de vapeur d’eau dans l’atmosphère. Et au bout d’un moment, cette vapeur d’eau finit fatalement par retomber, notamment sous forme de pluie.

Les conditions pour des précipitations importantes étaient toutes réunies ce printemps. L’Administration Nationale Océanique et Atmosphérique américaine (NOAA) qui publie des rapports mensuels sur les températures mondiales, notait depuis décembre que l’Europe du Nord-Ouest connaissait ses périodes les plus chaudes depuis des décennies. Le mois de Décembre était le plus chaud depuis 1900, le mois de Février également, et le mois d’Avril le 4ème mois d’Avril le plus chaud depuis 1910. Sur l’ensemble de la planète, ce début d’année a été le plus chaud de l’histoire, avec des températures de 1.5 degrés supérieures à la moyenne pré-industrielle. Notamment, la NOAA a constaté durant ce début d’année la successions de températures records dans certaines parties de l’Atlantique Nord et autour du Groenland. L’évaporation accrue dans ces zones a pu contribuer à la constitution de masses d’air très humides qui se sont ensuite déplacées sur l’Europe du Nord.

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En conséquence, l’agence notait également que la zone Europe du Nord-Ouest vivait aussi ses périodes les plus humides, avec une hausse significative des précipitations. Ainsi la Finlande ou le Danemark ont vécu ce printemps leurs périodes les plus humides depuis un siècle. La France a également vécu des précipitations beaucoup plus fortes que d’ordinaire. Météo-France notait en avril un cumul de précipitations entre 1.5 et 2 fois supérieur aux normes de saison sur l’ensemble de la diagonale sud-ouest / nord-est. Or c’est précisément dans la zone centre/nord-est que s’alimentent les affluents de la Seine comme le Loing.

Avec cette augmentation des précipitations, ce sont naturellement les fleuves qui sont montés. Et les épisodes de pluie des derniers jours de mai ont servi d’élément déclencheur à un phénomène qui s’annonçait depuis décembre, lentement mais sûrement.

Crues, inondations, changement climatique : vers une augmentation ?

La crue que l’on observe aujourd’hui dans le Loiret pourrait donc être le symptôme d’un changement plus profond au niveau climatique et météorologique en France. En effet, ce type d’évènements devrait devenir de plus en plus fréquent statistiquement, au fur et à mesure que les températures vont continuer à monter. C’est d’autant plus vraisemblable qu’en France, l’impact du changement climatique sur les températures est en moyenne plus fort qu’ailleurs. D’après un rapport de l’Observatoire National des Effets du Réchauffement Climatique, les températures en Europe du Nord, et donc en France durant le 20ème siècle ont subi une augmentation 30% plus élevée que sur le reste du globe en moyenne.

Cela signifie que les températures augmentent très vite (de l’ordre de 0.20 à 0.35 degrés par décennie en moyenne depuis 100 ans) et donc que l’évaporation océanique notamment est forte. Mais le problème est également significatif dans les massifs montagneux, où l’on a constaté entre 1900 et 2004 une augmentation moyenne des températures de 0.14 degrés par décennie. Or c’est aussi en montagne, via la fonte des glaciers et des neiges d’altitude que s’alimentent les fleuves.

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Logiquement, les épisodes de crues et d’inondations devraient donc se multiplier dans les prochaines décennies, sous la pression conjuguée de la fonte des neiges/glaces et de l’évaporation et de l’humidification des masses d’air. On observe d’ailleurs déjà le phénomène dans le Sud-Est de la France avec les fameux épisodes cévenols. Ces inondations qui affectent régulièrement les Cévennes dans le Sud de la France sont dues au déplacement des masses d’air chaudes et humides liées à l’évaporation au dessus de la mer Méditerranée vers les zones plus froides du Massif Central autour du Mont Lozère. À cause du réchauffement des températures moyennes, ces épisodes météorologiques sont de plus en plus forts et de plus en plus fréquents, car l’évaporation en mer est plus importante. Ainsi, dans un rapport daté de 2015, on observait depuis 1950 une augmentation de 30% de la quantité de précipitations dans la zone, et une multiplication par 3 de la fréquence des pluies cévenoles extrêmes.

 

Au final, il est probable que les épisodes de crues et d’inondations que l’on observe actuellement soient en partie déclenchés par des évènements liés au réchauffement climatique. Aussi contre-intuitif que cela puisse paraître, réchauffement climatique peut donc rimer avec plus de pluie et plus d’humidité. Bien sûr, ce n’est pas vrai partout, et on observe au contraire une diminution des précipitations sur l’Ouest du pays.

 

Mais la crue du Loiret est une bonne illustration de ce que signifie, à moyen terme, l’accélération du réchauffement climatique dans la vie quotidienne des français. Cela montre qu’il est plus que temps de prendre des mesures drastiques pour réduire nos émissions de gaz à effet de serre, car non, le réchauffement climatique n’est pas un problème « lointain » et sans importance. Il a des conséquences graves, aujourd’hui, et ici.