Si la compréhension du concept de « biens communs » peut paraître évidente, la gestion de ressources partagées est pourtant le fruit d’une organisation assez complexe dans les communautés humaines.

Définition : Qu’est-ce que sont les « biens communs » ?

Les biens communs désignent des ressources partagées, accessibles à un groupe ou à une communauté plutôt qu’à des propriétaires individuels. Ce sont des ressources naturelles ou sociales qui sont utilisées et gérées collectivement. Les biens communs peuvent inclure des éléments tels que l’eau, l’air, les forêts, les pâturages, les océans, les connaissances partagées, les logiciels open source, des services, etc.

Ces ressources ont deux particularités : la rivalité et la non-exclusion. La rivalité signifie que l’utilisation d’une partie des biens communs par une personne limite la quantité ou la disponibilité pour les autres. La non-exclusion signifie que l’accès à ces ressources n’est pas restreint, ou du moins, n’est pas facilement exclu pour les membres de la communauté.

La gestion des biens communs est souvent un défi complexe. Les utilisateurs doivent trouver des moyens de coopérer, de partager et de réguler l’utilisation de ces ressources afin de prévenir leur épuisement ou leur détérioration. Les théories des biens communs étudient les mécanismes et les incitations qui favorisent une gestion durable et équitable de ces ressources, afin de garantir leur préservation à long terme pour les générations présentes et futures. De ce fait, les communs sont des éléments fondateurs de nombreuses politiques environnementales.

 

Origine du concept

La théorie des communs est une approche développée par la lauréate du prix Nobel d’économie Elinor Ostrom pour étudier la gestion durable des ressources (eau potable, minerais, bois, terres). Elle remet en question l’idée traditionnelle selon laquelle la mise en commun de certaines ressources est vouée à l’échec en raison de l’incapacité de l’Homme à se restreindre et de sa tendance à l’épuisement et à la surexploitation. Ostrom affirme pourtant le contraire, les communautés seraient capables de gérer les ressources communes.

 

En finir avec la tragédie des communs

Dans un article sorti en 1968, Garret Hardin, un écologiste américain, avançait l’idée selon laquelle la présence de plusieurs utilisateurs ayant accès à une même ressource entraîne une situation connue sous le nom de « tragédie des communs », pour laquelle aucune solution technologique ne peut être trouvée. En utilisant l’exemple des pâturages pour illustrer sa thèse, Hardin soutenait que chaque éleveur ajouterait continuellement une bête supplémentaire à son troupeau tant que cela servirait son intérêt personnel, sans prendre en compte les coûts de cette action pour les autres éleveurs partageant les mêmes ressources communes.

Ainsi vient le point de bascule. Cette situation aboutit finalement à l’épuisement et à la destruction totale des pâturages, et donc l’épuisement de nombreuses ressources liées à ces espaces. Selon Hardin, il n’existe qu’une seule solution pour éviter cette tragédie, celle de diviser la terre en parcelles privées ou de mettre en place une régulation venant de l’État.

Cette thèse servira de justification à de nombreuses politiques de gestion étatique, mais surtout à la privatisation des ressources et des écosystèmes, promouvant ainsi le droit de propriété pour le bien commun.

Elinor Ostrom se place en contradiction directe avec la thèse d’Hardin, et c’est même elle, appuyée par des études empiriques approfondies menées sur divers types de ressources communes, tels que les pâturages, les forêts, les zones de pêche et les systèmes d’irrigation, que la tragédie des communs sera finalement abandonnée.

Elle a observé que dans de nombreux cas, les communautés locales ont développé des institutions et des règles informelles pour réguler l’accès, l’usage et la gestion des ressources communes.

 

Les principes clefs des Communs

La théorie des communs d’Ostrom repose sur quelques principes clefs :

  • Elle met l’accent sur l’importance de la participation et de l’engagement des utilisateurs des ressources dans le processus de prise de décision. Elle soutient que les règles doivent être élaborées de manière collective et adaptées aux besoins spécifiques de chaque communauté.
  • Ostrom souligne également l’importance de la conception de règles appropriées pour éviter la surexploitation des ressources. Les règles doivent tenir compte des caractéristiques spécifiques de la ressource et de son environnement, et que ces dernières devraient être flexibles pour permettre des ajustements en fonction des changements dans les conditions.
  • L’économiste met en évidence l’importance de la surveillance et de la sanction des comportements non coopératifs. Selon sa théorie, les communautés doivent mettre en place des mécanismes de surveillance efficaces et des sanctions proportionnées pour dissuader les individus de violer les règles établies.
  • Enfin, la théorie des communs d’Ostrom souligne également l’importance de la « polycentricité », c’est-à-dire la possibilité d’avoir plusieurs niveaux de gouvernance et d’action collective, adaptés à différentes échelles de gestion des ressources. Elle soutient que les solutions ne doivent pas nécessairement provenir d’une autorité centrale, mais peuvent émerger à différents niveaux, des communautés locales aux institutions internationales.

 

Quelles importances pour la transition écologique ?

Après avoir observé de nombreuses communautés dans le monde, Ostrom arrive à la conclusion qu’il existe une grande variété d’expériences dans la gestion de la propriété commune. Certaines communautés sont capables de concevoir des règles et de s’appuyer sur des normes sociales pour imposer l’utilisation durable des ressources, tandis que d’autres n’y parviennent pas.

La théorie des communs d’Elinor Ostrom met en évidence le potentiel des communautés locales pour gérer durablement les ressources communes. Elle propose un ensemble de principes et de recommandations pour concevoir des systèmes de gouvernance appropriés qui favorisent la coopération, l’adaptation et la durabilité des ressources communes. Cette approche a eu un impact significatif dans de nombreux domaines, de l’environnement à la gouvernance mondiale, et continue d’influencer les politiques et les pratiques de gestion des ressources naturelles.

Approfondir : Comprendre le réchauffement climatique : définition, causes, dangers

 

Exemple de gestion des communs dans le monde

Parmi les réussites des projets de communs dans le monde on peut retrouver une liste non exhaustive :

Les Ateliers communs ;

Les jardins communautaires ;

Les habitats participatifs et communs ;

Les logiciels libres (Linux, OpenOffice) ;

Les outils numériques (Wikipedia).