Qu’est-ce que sont les Principes directeurs de l’OCDE ? Qui en est à l’origine ? A qui sont-ils destinés ? Comment peuvent-ils être mis en oeuvre ?
Définition des Principes directeurs de l’OCDE
Les Principes directeurs de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) sont une série de recommandations des gouvernements des Etats membres de l’OCDE – dont la France – à destination des sociétés transnationales qui exercent leur activité sur le territoire d’un des Etats partis ou adhérent aux Principes directeurs. Ils constituent à ce jour un cadre de référence destinés à encadrer les activités des entreprises.
En effets, les Principes directeurs de l’OCDE sont la norme la plus ancienne qui traite de la responsabilité sociétale des entreprises, leur première version datant de 1976. Depuis lors, ils ont fait l’objet de cinq révisions dont la dernière a eu lieu en mai 2011.
Présentation de l’OCDE et des Etats partis aux Principes directeurs
Présentation de l’OCDE
L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) est une organisation internationale dont l’objet est de permettre à ses Etats membres de réfléchir aux problèmes économiques, sociaux et environnementaux qui découlent de la mondialisation. En pratique, l’OCDE publie régulièrement des études, qu’il s’agisse d’analyses, de statistiques ou encore de prévisions et recommandations sur les politiques publiques.
Cette organisation a succédé en 1960 à l’Organisation européenne de coopération économique (OECE) créée en 1948 et destinée à assurer la mise en œuvre du Plan Marshall entre les Etats européens à la sortie de la Seconde Guerre Mondiale.
Elle comprend aujourd’hui 36 Etats membres et collabore avec de nombreux autres Etats démocratiques ayant développé une économie de marché.
Les Etats ayant adhéré aux Principes directeurs de l’OCDE
Pour en revenir aux Principes Directeurs, les 36 Etats membres de l’OCDE y ont adhéré, ainsi que 13 Etats non membres, ce qui porte le nombre d’adhérents à 49 Etats suite à l’adhésion de l’Ukraine et du Kazakhstan en 2017.
Contenu des Principes directeurs de l’OCDE
Concrètement, les Principes directeurs prennent la forme d’un document de recommandations non contraignantes pour les entreprises disponible sur le site de l’OCDE. Il donne cependant un cadre à suivre pour les organisations se voulant socialement responsables. Les mesures prescrites sont relatives :
- A la publication des aspects significatifs des activités des entreprises, de leur situation financière, de leurs résultats, de leur actionnariat et de leur système de gouvernement d’entreprise.
- Au respect des droits de l’Homme ;
- Au respect des conventions relatives à l’emploi et aux relations professionnelles ;
- Au respect du droit de l’environnement ;
- A la lutte contre la corruption, la sollicitation de pots-de-vin et d’autres formes d’extorsion ;
- Aux intérêts des consommateurs ;
- A la compatibilité des pratiques des organisations avec les politiques scientifiques et technologiques des pays dans lesquelles elles opèrent ;
- Au respect du droit de la concurrence ;
- Au respect de la fiscalité des pays dans lesquelles elles sont implantées.
La mise en œuvre des Principes Directeurs par les Points de contact nationaux
En 2001, pour assurer la mise en œuvre des Principes directeurs, l’OCDE a développé les Points de contact nationaux (PCN) pour la conduite responsable des entreprises. En 2017, tous les Etats adhérents aux Principes directeurs de l’OCDE à l’exception de la Tunisie avaient mis en place un tel Point de contact.
Le but premier des Points de contact nationaux est d’assurer l’information et la promotion des Principes directeurs à l’égard des entreprises et de la société civile.
Par ailleurs, les Points de contact ont une fonction de médiation et de conciliation, en cas de problèmes survenant entre des entreprises et la société civile (ONG, syndicats, particuliers) au sujet de l’application des Principes directeurs. S’il ne s’agit en aucun cas d’une juridiction pouvant rendre des décisions, les PCN peuvent cependant donner des avis sur l’application des Principes directeurs. Certains avis et rapports ont d’ailleurs eu des retentissements notables dans la presse, altérant l’image de certaines entreprise.
Exemples d’affaires et avis notables du PCN France
Le Point de contact France est présidé par la Direction générale du Trésor du Ministère de l’Economie et des Finances. Il est composé de trois parties : l’Etat, six syndicats et une organisation patronale (le MEDEF). Très actif, il a publié à ce jour plus de trente rapports et avis.
Le rapport faisant suite à l’effondrement du Rana Plaza
Parmi les rapports notables, on peut notamment citer celui faisant suite à l’effondrement du Rana Plaza en 2013. L’effondrement de cette usine textile, située au Bangladesh, a causé la mort de 1138 ouvriers du textile et a suscité l’émoi de la communauté internationale. En effet, l’usine servait de lieu de confection textile pour de nombreuses grandes marques implantées en Occident et a mis en lumière les conditions de travail déplorables des travailleurs du textile.
Suite à cet accident industriel, le PCN France a édité un rapport sur l’application des Principes directeurs de l’OCDE dans la filière textile-habillement, consécutivement à sa saisine par la Ministre du commerce extérieur. Ce rapport très détaillé a été établi en juin 2013 et a permis de mettre en lumière les risques accrus de violation des droits de l’Homme dans le secteur de l’habillement notamment en cas de sous-traitance en chaîne, fait trop fréquent dans ce domaine. Dans la foulée, le PCN italien a établi un rapport similaire en 2014.
Ces deux documents ont alors servi à l’élaboration du Guide sectoriel de l’OCDE sur le devoir de diligence applicable aux chaînes d’approvisionnement responsables dans le secteur de l’habillement et de la chaussure d’avril 2018.
La saisine du PCN France pour l’installation d’éoliennes par EDF au Mexique
Comme autre affaire notable, cette fois en cours, on peut citer la saisine du PCN France en février 2018 par plusieurs communautés indigènes du Mexique pour vérifier le respect des Principes directeurs de l’OCDE par l’entreprise EDF dans le cadre d’un projet de parc éolien, car il n’avait pas fait l’objet d’une consultation citoyenne préalable.
En effet, conformément aux Principes directeurs, les entreprises dont le siège se trouve dans un des pays membres de l’OCDE doivent mettre en œuvre des diligences raisonnables pour respecter les droits humains. En l’espèce, le reproche essentiel fait à l’entreprise est l’absence de consentement libre, préalable et éclairé des populations indigènes vivant sur le territoire des deux communes mexicaines concernées, ainsi que l’absence d’informations transmises à la population sur le déroulement du projet. Le Point de Contact France a accepté de se saisir de la question en juin 2018, la réponse est toujours attendue, surtout de l’autre côté de l’Atlantique.
Les Principes directeurs de l’OCDE constituent donc un véritable cadre à destination des entreprises qui se veulent plus responsables. Pour le justiciable – citoyen, syndicat ou ONG – leur mise en oeuvre possible auprès des Points de contacts nationaux offre en outre une opportunité pour mettre les entreprises face à leur responsabilité.