Quel est vraiment l’impact environnemental et sanitaire de tous les emballages alimentaires que nous retrouvons dans nos supermarchés ? Comment limiter ce gaspillage ? Quelle est la responsabilité des industriels et des consommateurs dans ce problème ?
Les anecdotes les plus ahurissantes se sont succédées dans les médias ces derniers temps, montrant les dérives des industries agro-alimentaires sur la question des emballages. Des bananes pré-pelées et emballées ? Des oranges emballées dans du plastique ? Une clémentine épluchée vendue dans une boîte ? Autant d’exemples qui ont déchaîné la colère des internautes au point qu’on a même parlé de « scandale ». À la suite de ces polémiques, nous avons décidé d’enquêter pour vous sur l’impact de ces emballages.
Quel est l’impact des emballages alimentaires sur l’environnement ? Et sur notre santé ? Découvrez la vérité sur les « scandales » des emballages alimentaires.
Comment les emballages de notre alimentation affectent l’environnement ?
A première vue, lorsque l’on voit tous les packaging et emballages divers qui accompagnent les aliments que l’on achète, notamment dans les supermarchés, on a comme l’impression d’un immense gaspillage. Pour manger un yahourt, il faut désormais ouvrir un paquet en carton, puis détacher son pot de yahourt en plastique, retirer l’opercule, et enfin manger.
Du point de vue environnemental, il est certain que ces emballages ont un impact significatif. Ils sont en effet le plus souvent composés de cartons, auxquels sont ajoutés des plastiques et autres matières en aluminium. Quand on sait que la plupart des plastiques sont des dérivés d’hydrocarbures, et quand on connait les impacts environnementaux de l’extraction de l’aluminium, et la quantité d’énergie nécessaire à la fabrication de ces emballages, on peut légitimement se demander si tout cela vaut vraiment la peine.
Il est difficile de savoir quel est réellement l’impact environnemental des emballages alimentaires, puisque les quantités d’emballage utilisées ou les matériaux utilisés sont différents pour chaque produit. Néanmoins, une étude menée par deux chercheurs américains sur notre système alimentaire montre qu’en moyenne, les emballages représentent moins de 5% des émissions de gaz à effet de serre d’un aliment.
En comparaison, la production de l’aliment en lui même et son transport représentent 83% et 11% des émissions de gaz à effet de serre respectivement. Pour le dire autrement, si nous achetions nos aliments sans aucun emballage, nos émissions de CO2 ne seraient réduites que de 4-5% maximum. En termes d’émissions de gaz à effet de serre, l’impact des emballages alimentaires n’est donc pas aussi élevé que l’on croit !
Néanmoins, les emballages alimentaires ont d’autres effets néfastes sur l’environnement. Par exemple, les emballages plastiques, lorsqu’ils sont mal gérés et mal recyclés, finissent généralement dans la nature où ils induisent de gros dégâts notamment sur les animaux. Dans l’océan notamment, on compte désormais des centaines de milliers de tonnes de plastiques qui détruisent la biodiversité. La production des emballages a aussi des effets néfastes en termes de pollution. Par exemple, la production d’aluminium contribue à l’émission de perfluorocarbures ou de dioxide de souffre, qui est impliqué dans les pluies acides. La fabrication des emballages plastiques utilise également énormément d’eau, d’énergie et d’autres produits chimiques. Par exemple, une étude récente montrait qu’il fallait 3 litres d’eau pour fabriquer… une bouteille d’eau d’un litre. Malgré une empreinte carbone relativement faible, les emballages alimentaires restent donc une plaie pour l’environnement, notamment lorsqu’ils sont mal traités et recyclés.
Les emballages alimentaires : pourquoi c’est utile ?
Malgré ces impacts environnementaux non-négligeables, il y a une chose importante à garder à l’esprit : les emballages sont très utiles, y compris du point de vue environnemental. Le rôle principal d’un emballage alimentaire est de permettre de mieux conserver notre nourriture. Du point de vue environnemental, c’est absolument fondamental. En effet, le gaspillage alimentaire est extrêmement nocif pour notre environnement : nous jetons chaque année près de 2.5 milliards de tonnes de nourriture.
Dans les pays en développement, d’après la FAO, près de la moitié de la nourriture gaspillée est perdue entre la production et la commercialisation. En grande partie, ces pertes sont dues à de mauvaises condition de conservation : mauvais packaging notamment, mais aussi mauvaise gestion de la chaîne du froid. Si les industries alimentaires dans les pays en développement avaient de meilleures conditions d’emballage de leurs produits, ils pourraient réduire ce gaspillage de façon très importante.
Dans les pays industrialisés, le gaspillage alimentaire a déjà été largement réduit par l’utilisation de packaging adaptés pendant les transports. Mais il reste du travail, notamment au niveau du consommateur. 55% du gaspillage alimentaire en France a lieu en bout de chaîne, après la vente, notamment chez les consommateurs. C’est donc au consommateur de faire attention, et dans ce domaine, les emballages peuvent être particulièrement utiles. Une étude menée par Denkstatt, une société de conseil en performance environnementale, montre que l’adoption d’emballages individualisés permettait de diviser le gaspillage alimentaire jusqu’à 2 à 10 fois.
Aussi contre-intuitif que cela puisse paraître, 3 filets de poulet emballés dans 3 emballages différents sont donc plus écolo (en termes d’émissions de CO2) que 3 filets de poulet emballés dans une seule boîte en moyenne, car les emballages individuels permettent de moins gaspiller. En effet, le plus gros des impacts environnementaux de notre nourriture réside dans sa production. Lorsque la nourriture est jetée, c’est donc une perte nette en termes environnementaux. Et c’est sans compter les émissions de méthane qui ont lieu lors de la dégradation des déchets alimentaires.
De la même façon, une étude menée par la société Bel montrait que les fromages vendus en portion individuelles étaient 40% moins gaspillés que les fromages vendus à la coupe. On a donc souvent tendance à pointer du doigt les emballages alimentaires, mais ils sont très utiles pour nous éviter de jeter.
L’impact des emballages alimentaires sur notre santé
Mais il y a un autre problème à prendre en compte à propos des emballages : leur impact sur notre santé. En effet, emballer nos aliments dans du plastique, du polystyrène ou de l’aluminium n’est pas sans conséquence sanitaire.
Les plastiques notamment, sont souvent suspectés de contenir des matières et des produits dangereux. Il y a une quinzaine d’années, les phtalates faisaient polémique pour leurs effets délétères sur la santé. Ils seraient en effet impliqués dans des problèmes hormonaux, notamment de stérilité masculine. À priori, l’utilisation des produits contenant des phtalates susceptibles de contaminer les aliments est interdite en Europe par la réglementation REACH. Mais certains suspectent encore les bouteilles d’eau en plastique souple d’être une source de contamination (une suspicion qui n’a pas pu être validée par les études scientifiques à ce jour). Et hors des emballages alimentaires, on retrouve encore des phtalates un peu partout dans l’industrie plastique.
Autre produit polémique : le bisphénol A. Il est suspecté d’affecter la reproduction, le métabolisme des sucres et des graisses, de provoquer des maladies cardio-vasculaires et des cancers hormonodépendants. D’après la réglementation européenne, la dose journalière à ne pas dépasser pour éviter de mettre en danger sa santé est de 0,05 mg/kg de poids corporel par jour. Le problème, c’est que le bisphénol A est présent dans de très nombreux contenants alimentaires. On a souvent entendu parler des biberons, mais on trouve des traces de bisphénol dans la plupart des emballages en polycarbonate (un plastique rigide) : des bacs de réfrigérateurs aux pichets d’eau en passant par les boîtes hermétiques. Le marquage des contenants alimentaires n’était pas obligatoire à ce jour, difficile de savoir quels emballages sont en polycarbonate. Le bisphénol est également présent dans les revêtements de certaines boîtes de conserves.
Pour se repérer plus facilement et éviter au maximum l’utilisation de matériaux contenant du bisphénol, reportez-vous à cet article publié par l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail).
Globalement, les emballages alimentaires sont souvent suspectés de mener à des contacts avec des produits nocifs pour la santé, ou dangereux s’ils sont absorbés en trop grande quantité. C’est le cas de l’aluminium qui pourrait mener à des surdoses d’aluminium dans le corps, elles-mêmes impliquées dans divers maladies neurologiques comme Alzheimer. Même le verre est suspecté de mener à des contaminations au plomb…
D’un autre côté, les emballages alimentaires sont notre allié le plus sûr pour éviter la contamination de nos aliments par des bactéries potentiellement mortelles ou la dégradation de leur fraîcheur. Les emballages sont donc ceux qui nous protègent le plus sûrement des intoxications alimentaires et autres maladies liées à la conservation de la nourriture.
Comment limiter le gaspillage des emballages alimentaires ?
Au final, la question des emballages alimentaires est souvent abordée de façon très dichotomique. Entre les industriels du secteur qui n’en finissent plus de louer leurs bénéfices, et les discours de certains consommateurs avertis qui ne parlent que des dangers et des problèmes liés aux emballages, il est difficile de s’y retrouver. Comme toutes les autres problématiques environnementales et sanitaires, tout n’est pas tout blanc ou tout noir. Les emballages alimentaires, malgré leurs impacts négatifs sur l’environnement et parfois sur la santé, sont indispensables aujourd’hui compte tenu de notre système alimentaire et de nos habitudes de consommation. Côté industriels, il y a donc un vrai effort à faire pour réfléchir à des packaging plus écologiques, mieux recyclables et sans matières dangereuses. Ils doivent aussi faire en sorte de ne pas suremballer des produits qui n’en ont pas besoin.
Mais si nous avons tant besoin d’emballages alimentaires, c’est aussi parce que nous, consommateurs, avons pris la mauvaise habitude d’acheter notre nourriture sans réfléchir vraiment à sa conservation. C’est cela qui mène au gaspillage et à ce besoin d’emballer et de sur-emballer. La responsabilité du consommateur est donc aussi de changer ses habitudes : acheter plus de produits frais, sans emballages et mieux gérer ses stocks afin d’éviter le gaspillage alimentaire.
Alors, seriez-vous vraiment prêts à pour une vie moins emballée ?
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