Et si l’on utilisait la géo-ingénierie pour modifier le climat et lutter contre le réchauffement climatique ? Si l’idée a de quoi séduire en théorie, il faut garder à l’esprit que ces stratégies peuvent être dangereuses.

Une étude publiée dans la revue Nature Communications décrypte ces dangers et les risques que l’on pourrait courir à utiliser la géo-ingénierie pour lutter contre le réchauffement climatique. Explications.

Les effets secondaires de la géo-ingénierie

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L’étude, publiée dans la revue Nature en novembre 2017 a tenté de modéliser l’effet que pourrait avoir la géo-ingénierie climatique sur les écosystèmes atmosphériques. Pour cela, elle a étudié l’une des formes les plus communément étudiées de géo-ingénierie climatique : la pulvérisation d’aérosols de sulfate dans l’atmosphère. En se stabilisant dans l’atmosphère, ce type d’aérosols forme des molécules de SO4 qui ont pour propriété d’être réflexives : elles réfléchissent donc les rayons du soleil.

Théoriquement, cette méthode permet de bloquer certains rayons solaires avant qu’ils ne pénètrent l’atmosphère, ce qui aurait un gros avantage du point de vue climatique. En effet, cela limiterait la quantité d’énergie qui entre dans le système atmosphérique, ce qui limiterait à la fois le réchauffement et l’effet de serre.

Le problème, c’est que l’atmosphère est un écosystème complexe : lorsqu’un équilibre est perturbé localement, une série de réactions en chaîne peuvent se produire et avoir des conséquences à un autre endroit ou globalement. Par exemple, l’étude montre qu’effectivement, en pulvérisant des aérosols dans l’atmosphère de l’hémisphère Nord, on pourrait lutter contre certains phénomènes liés au réchauffement climatique localement. Ainsi, on pourrait faire diminuer l’entrée d’énergie de rayonnement solaire dans l’atmosphère localement et diminuer la fréquence des cyclones sur l’Atlantique. Mais en contre partie, cela contribuerait à aggraver les sécheresses et les déficits de pluviométrie sur l’hémisphère Sud, notamment sur les régions du Sahel et du Sud du Sahara. L’étude montre aussi que des stratégies de géo ingénierie mises en place dans l’hémisphère Sud pourraient au contraire augmenter la fréquence des tempêtes tropicales ou des cyclones dans l’hémisphère Nord.

La difficile maîtrise des interactions climatiques

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En résumé : en modifiant l’atmosphère à un endroit, on perturbe les circulations atmosphériques à d’autres endroits ce qui entraîne des phénomènes dangereux et relativement difficiles à prévoir sur d’autres régions. Comme le système atmosphérique est complexe et que les interactions entre les phénomènes sont extrêmement fortes, des modifications même minimes de certains facteurs peuvent engendrer des effets considérables. Ici, un simple changement de l’énergie emmagasinée par les masses d’air via la géo-ingénierie pourrait modifier les relations de pression / dépression, la circulation et l’humidité des masses d’air. Et cela pourrait être très risqué.

Cela illustre parfaitement la difficulté que l’on aurait à maîtriser les interactions climatiques dans le cadre de la géo-ingénierie. En effet, s’il est théoriquement possible de contrer certains effets du réchauffement climatique dans certaines régions avec la géo-ingénierie, il est pour l’instant très difficile de prévoir quelles conséquences de telles stratégies pourraient avoir sur d’autres régions du monde, ou à plus long terme.

L’appel à la prudence des scientifiques sur la géo-ingénierie

Au final, les chercheurs à l’origine de l’étude appelle à la prudence à propos de l’utilisation de telles options. Selon eux, il faut à tout prix éviter que des actions de géo-ingénierie soient prises unilatéralement par certains Etats ou dans certaines régions, afin d’éviter les dommages collatéraux dans d’autres régions.

Globalement, seule une connaissance plus aboutie des phénomènes climatiques pourrait permettre de mettre en place des stratégies de géo-ingénierie efficaces. Et même avec cette connaissance, il n’est pas certain qu’il soit possible techniquement de mettre en oeuvre ce type de solutions sans créer au final plus de problème que cela n’en résoudrait.