Oui, Youmatter vient de rejoindre le Groupe Kisskissbankbank & Co, filiale de La Banque Postale. Ceci n’est pas une fakenews, et je vais tenter de revenir sur le chemin entrepreneurial qui nous a conduit à poursuivre désormais notre mission au sein de ce groupe.
Si vous souhaitez directement aller au rapprochement avec Kisskissbankbank & Co, RDV plus bas dans l’article 😉
- 2008-2009 : COMMENT JE SUIS ACCIDENTELLEMENT DEVENU CHEF D’ENTREPRISE.
- 2010 : RENDEZ-VOUS EN TERRE INCONNUE.
- 2011-2013 : L’APPEL DE LA RAISON.
- 2014 : LA RESPONSABILITÉ DU DIRIGEANT.
- 2015-2017. LE DOUBLE MODÈLE À L’ŒUVRE.
- 2020. UNE ANNÉE PRESQUE PARFAITE SI ELLE N’AVAIT PAS ÉTÉ AUSSI DIFFICILE.
- 2021. ON FAIT L’BILAN, CALMEMENT (POUR CELLES ET CEUX QUI N’AURAIENT PAS LA REF).
- YOUMATTER ET KISSKISSBANKBANK & CO : QUELLE GRILLE DE LECTURE AVOIR ?
- 2009, 2021, QUELQUES CHIFFRES QUI ME RENDENT FIER.
- BONUS POINT POUR NOS AMIS ENTREPRENEURS ET PERSONNES QUI SOUHAITENT APPORTER PLUS DE SENS DANS LEUR ACTIVITÉ PROFESSIONNELLE : QUELQUES PARTAGES D’ENSEIGNEMENTS PERSONNELS
2008-2009 : comment je suis accidentellement devenu chef d’entreprise.
J’avais 23 ans lorsque j’ai monté cette entreprise, fruit d’un concours de circonstances.
Issu d’un milieu familial éloigné du monde du business et à la personnalité peut-être atypique, j’ai eu beaucoup de mal à « rentrer dans le moule » de l’entreprise classique.
A quoi sert ce que je fais ? Pourquoi faisons-nous ainsi ce que nous faisons alors que nous pourrions mieux le faire ? Comment mon action contribue-t-elle à un avenir plus positif pour notre société ?
Ces questions, vous vous les êtes peut-être déjà posées dans votre activité professionnelle. Pour moi, elles sont rapidement devenues entêtantes au sein de mon premier employeur, sans trouver d’écho positif.
2008. Malgré mon manque d’assurance et d’expérience, je prends les devants et tente de trouver des solutions. Miracle. Je ne suis pas le seul en interne à vouloir agir sur les sujets de développement durable. Newsletters pédagogiques, mises en lumière de bonnes pratiques, mesure des consommations et premières actions concrètes, nous parvenons tant bien que mal à créer et animer bénévolement ce qui aujourd’hui s’appellerait un collectif RSE. Mais faute de soutien et de moyens humains et financiers, le mouvement s’essouffle et renforce mon envie d’aller plus loin sur ces sujets.
2009. Deux chemins commencent à se dessiner.
Un premier, classique, est de reprendre des études pour monter en compétences sur les thèmes du développement durable et travailler au sein d’entreprises qui souhaitent avancer sur ces enjeux. Le problème ? Peu de formations existent sur ces sujets, et… le retour sur les bancs de l’école m’effraie plus qu’il ne m’excite.
Un second chemin, déjà apparu par le passé, refait surface et s’impose progressivement : l’entrepreneuriat.
Des convictions et idées commencent à jaillir dans ma tête autour du développement durable, et parmi celles-ci, la conviction que le numérique et spécifiquement les réseaux sociaux vont accélérer la prise de conscience des citoyens sur les enjeux sociaux et écologiques. À la clé ? Une pression sociale qui amènera notamment le monde économique à plus de transparence sur ces sujets, donc plus d’engagements, donc une réduction de leurs externalités négatives et donc un bénéfice pour tous.
Une idée face à cette conviction me vient et je la propose à une école d’ingénieur : et si on sensibilisait mieux les citoyens aux enjeux sociaux et environnementaux tout en leur permettant de comparer les produits et entreprises de leur quotidien sur des critères sociaux et écologiques ?
Le projet n’est évidemment pas terminé au bout de quelques mois de projet étudiant, je décide de poursuivre la réflexion en gardant en stage l’un des étudiants du projet.
Mais comment faire ?
Une seule voie semble alors possible. Je réunis mes quelques économies et monte l’entreprise en juin 2009 avec 2 000 euros en poche, en parallèle d’un emploi à plein temps.
Fin 2009. Last in, first out. La réduction des investissements des grandes entreprises amène mon ancien employeur à se séparer de collaborateurs.
J’accepte la proposition de quitter l’entreprise, remercie mon ancien employeur et le système social français (Pôle Emploi, Sécurité Sociale…) qui me permettra de subvenir à mes besoins au maximum 15 mois, et décide de me lancer pleinement dans mon projet entrepreneurial.
2010 : rendez-vous en terre inconnue.
Je suis jeune, seul à bord, sans fonds, ni réseau, ni compétences reconnues sur un marché qui n’existe encore pas ou peu. J’ai le combo gagnant du parfait entrepreneur qui va bien galérer.
J’ai la chance d’intégrer un incubateur pour formaliser mon projet et monte deux blogs pour essayer d’exister dans un écosystème du développement durable en émergence. L’un sur les sujets d’entrepreneuriat pour rencontrer de potentiels partenaires, l’autre sur les sujets de développement durable pour m’amener à renforcer mes connaissances sur le sujet et les partager.
La magie du numérique commence à opérer, les premiers lecteurs commencent à arriver et dans le lot, de premières belles rencontres.
Je réalise alors qu’une nouvelle génération d’entrepreneurs commence à émerger sur ces sujets, parmi lesquels microDON, Deways, Kisskissbankbank, Helloasso, Makesense… et que des blogueurs et médias commencent à écrire sur ces sujets, notamment Lucie Gaudens, avec qui nous monterons bientôt un collectif de blogueurs actifs sur les sujets sociaux et environnementaux, mais aussi Marcel Green, ecolo-info, Youphil, Novethic ou encore Consoglobe.
C’est l’effervescence, ça mène à de belles rencontres et amitiés, mais ça ne paie pas mon loyer et mes droits au chômage pour création d’entreprise passent trop vite.
De business plans en business plans et de versions pilotes insuffisantes en versions pilotes insuffisantes, je commence à me rendre à l’évidence. Monter une base de données sociales et écologiques d’entreprises et produits coûte des millions, pour un modèle économique quasi impossible à trouver (Goodguide, ecocompare, Noteo et d’autres s’en rendront compte quelques années et millions d’euros plus tard). Je n’ai pas suffisamment de ressources pour mener à bien le projet tel que je l’avais imaginé.
2011-2013 : l’appel de la raison.
Nécessité faisant loi, le projet prend une nouvelle tournure.
Comment puis-je à la fois assurer la pérennité de l’entreprise tout en contribuant à faire bouger les lignes sur les sujets de développement durable ?
C’est à ce moment-là que commence à émerger ce qui deviendra le double modèle de Youmatter. Le premier consiste à mobiliser les acteurs de l’intérieur, par un accompagnement des entreprises et associations dans leurs démarches de développement durable, au travers de la création et animation de communautés en leur nom, ainsi que par la production de contenus de qualité sur ces sujets pointus. Ce modèle, générateur de revenus, permet de soutenir le second modèle, d’intérêt général, qui consiste à sensibiliser gratuitement un maximum de professionnels et citoyens sur ces enjeux.
Pour chaque euro de chiffre d’affaires généré, une part conséquente de celui-ci sera réinjecté dans l’animation et la production d’un média pédagogique et qualitatif.
Ce projet semble plus à ma portée, et ne tardera pas à avoir ses premiers effets. Une première entreprise me fait confiance pour développer un jeu pédagogique en ligne sur les enjeux du développement durable. Hourra, j’ai un premier client ! Le projet fait un peu de bruit, et d’autres entreprises et associations me font confiance.
Quelle joie mais quelle frustration de ne pas pouvoir partager cette joie avec d’autres qui pourraient faire partie de l’aventure !
Presque 4 ans sont passés, et ma traversée du désert semble toucher à sa fin. Je commence à avoir des clients récurrents, les entreprises commencent à comprendre notre plus value, et je peux enfin recruter une personne en plus de tirer une rémunération de mon travail. C’est l’arrivée de Marine Diers, premier CDI de l’entreprise !
J’étais loin d’imaginer que le meilleur et le plus difficile étaient à venir.
2014 : la responsabilité du dirigeant.
Me voilà maintenant responsable non seulement de mon avenir mais de celui d’une autre personne. On ne parle pas d’une “ressource humaine” ou une charge fixe qui impute un compte de résultat non ; il s’agit d’une vraie personne, avec son fonctionnement, son vécu, ses qualités, ses défauts, ses leviers de motivation, ses envies, ses doutes et ses barrières à franchir. Par mon intervention et le fruit de l’activité de l’entreprise, je peux être à l’origine d’un épanouissement ou d’une catastrophe professionnelle et personnelle.
Seul, je me plantais, ça aurait été douloureux, mais j’aurais a priori facilement pu “revendre” le fruit de mon expérience ailleurs.
Avec des collaborateurs, mon cerveau passe instantanément en mode :
- survie (priorité absolue) : comment conserver une situation financière qui permette d’assurer la pérennité des emplois
- développement (bonus point) : comment, en prenant en compte l’état financier et humain de l’entreprise, développer de nouvelles activités qui soient et génératrices d’emplois pérennes, payés le plus possible aux standards du marché, et portent notre mission d’intérêt général
Gestion de la trésorerie à la centaine d’euros près à +6 mois, boule au ventre lors de chacune des reconductions de contrats, recrutements réalisés au compte goutte, auto-financement de notre croissance…
Peu valorisé dans les médias car peu spectaculaire, ce mode de gestion “en bon père de famille” est aujourd’hui sans nulle doute ce qui a permis à l’entreprise d’assurer sa pérennité depuis 12 ans.
2015-2017. Le double modèle à l’œuvre.
Plus de clients, c’est plus de chiffre d’affaires et donc plus de moyens pour développer nos projets d’intérêt général.
2015 sonne l’arrivée de Clément Fournier dans l’équipe. Son rôle ? Informer et sensibiliser un maximum de citoyens et professionnels par le biais de notre petit média qui comptabilise fièrement 10 000 lecteurs par mois à l’époque.
Comment ? Par de l’information de qualité, fact-checkée, poussée, décryptée, qu’on ne retrouve pas dans les autres médias, et par une envie folle de détrôner sur les moteurs de recherche des sources d’informations moins qualitatives que ce que nous pourrions proposer.
Les résultats se font rapidement sentir : poussé aussi par la COP21, le développement durable, précédemment plutôt au cœur des préoccupations d’équipes RSE, commence à contaminer les autres directions marketing, communication, RH… l’audience double quasiment tous les trimestres pour arriver en 2017 à plus de 100 000 lecteurs par mois issus de partout au sein des entreprises et au delà.
En parallèle, nombre d’entreprises commencent à prendre conscience de l’intérêt de leurs parties prenantes sur ces sujets et souhaitent mieux les informer sur leurs engagements.
2017-2019. Le besoin de comprendre les enjeux écologiques et sociaux, une problématique universelle.
Les sujets commencent à émerger un peu partout, souvent partiels et mal maitrisés, mais ils sont là.
- Les médias et journalistes traditionnels tâtonnent. Un coup climato-sceptiques, un coup techno-solutionnistes, et surtout mal formés, ils commencent à s’accaparer une part des débats.
- Yuka propose une information simplifiée aux consommateurs à partir de 2017.
- En la personne de Greta Thunberg, l’inaction des dirigeants politiques et économiques est pointée du doigt sur les questions écologiques.
- Les conseils d’administration et assemblées générales commencent à aborder réellement ces sujets.
- Cerise sur le gâteau, le collectif Pour un Réveil écologique acte en 2018 le fait qu’un monde économique ne sera désirable auprès des futurs collaborateurs que s’il est plus en accord avec les limites planétaires.
La boucle est bouclée, le sujet est officiellement un sujet de préoccupation chez les jeunes, les collaborateurs, les actionnaires, les dirigeants, les consommateurs et les citoyens.
Il est temps de passer à la vitesse supérieure.
Nous changeons de nom en novembre 2019 pour devenir Youmatter, et embarquer sur ces sujets toutes celles et ceux qui font la société. Nous atteignons fin 2019 300 000 visiteurs par mois en langue française et anglaise, en plus d’accompagner dans leur accélération nombre d’entreprises, associations et réseaux.
Mais pourrons-nous suffisamment répondre à ces demandes de compréhension des enjeux, venues de toute part ?
2020. Une année presque parfaite si elle n’avait pas été aussi difficile.
L’année 2020 aura été atypique à tout point de vue.
Pour la première fois, nous sentons que chacun commence à faire le lien.
Faire le lien entre perte de biodiversité et activité économique (merci les pangolins). Entre protection sociale et système social. Entre mondialisation et interdépendances économiques. Entre équilibre vie personnelle et vie professionnelle. Entre climat et activités humaines.
Mais surtout, avec la convention citoyenne pour le climat, chacun peut constater que bien formée et bien informée, toute personne peut acquérir un bagage de connaissances suffisamment solide pour émettre des propositions crédibles pour le bien collectif et l’avenir de la planète.
Notre légitimité et notre combat, s’ils étaient encore à prouver, sont définitivement acquis.
Notre audience double, pour atteindre près de 600 000 lecteurs par mois.
Mais en interne, c’est le branle-bas de combat. Nombre de missions sont reportées à défaut d’être annulées, il faut réinventer la quasi intégralité de nos prestations et certains contrats sont clairement chahutés. La gestion de la trésorerie à la centaine d’euros près laisse planer un vent d’inquiétude plus que de sérénité.
C’est dur pour tout le monde, mais chacun se serre les coudes, s’entraide, apporte ses idées et contribue à les mettre en œuvre.
Et en quelques mois seulement, les envies de nos prospects et clients évoluent ; ils veulent désormais massivement former et informer leurs collaborateurs et dirigeants aux enjeux de développement durable. Le déclic est fait.
Nous réalisons presque malgré nous notre meilleure année depuis 2009, et signons notre première grande production de formation massive avec le MOOC “Comprendre la crise écologique pour réinventer l’entreprise”, qui sera porté par le C3D, Pour un Réveil Écologique, en partenariat avec l’ADEME, le Collectif Génération Responsable, le Comité 21, le MEDEF, l’ORSE et le UN Global Compact France.
Et comme si les nouvelles originales ne suffisaient pas pour 2020, Lucie Gaudens, désormais directrice de la communication de microDON, dont l’entreprise a dernièrement rejoint le Groupe Kisskissbankbank & Co. aux côtés de Goodeed et Lendopolis, m’annonce que le Groupe souhaite mettre les bouchées doubles en matière d’engagement des citoyens et professionnels sur les sujets que nous traitons, et me propose une rencontre avec leurs équipes.
Je rencontre Mouna Aoun, Secrétaire Générale de KissKissBankBank & Co pour faire connaissance et mieux comprendre leurs ambitions.
2021. On fait l’bilan, calmement (pour celles et ceux qui n’auraient pas la ref).
La situation sanitaire s’apaise progressivement, nous commençons à nous revoir plus régulièrement et à retrouver un lien social trop longtemps mis de côté.
En parallèle, nos échanges avec Vincent Ricordeau, co-fondateur de Kisskissbankbank et président de Kisskissbankbank & Co prennent une autre tournure. Au vu de l’ambition du Groupe et plus généralement du Groupe La Banque Postale au sujet de l’engagement des citoyens sur les questions sociales et écologiques, nous pourrions apporter une brique décisive dans la mise en œuvre de leur stratégie.
Le sujet d’un rapprochement est abordé, et nous amène à réaliser le bilan de ces 12 premières années écoulées.
Sur le plan individuel d’abord, je suis évidemment fier de l’équipe que nous avons créée, des personnes qui sont passées (Rodolphe, Hélène, Charlotte, Emma, Valentine, Solweig, Kelvin, Adèle, André…) et de celles qui sont restées (Marine, Clément, Mélanie, Eléonore, Capucine, Lucie et celles à venir), de l’esprit familial qui en découle, du travail accompli et du nombre de bénéficiaires embarqués sur nos différentes missions (média, clients…). Mais ce furent aussi 12 années éprouvantes, principalement seul devant mes propres doutes et décisions malgré un processus décisionnel interne assez ouvert, et l’épée de Damoclès prête à s’abattre au moindre écart financier de l’entreprise ne m’a jamais quittée. Aussi, le contexte a changé depuis quelques années.
J’ai l’audace de penser que nous avons fortement contribué à faire émerger les sujets écologiques et sociaux sur le devant de la scène. Une excellente nouvelle, et je ne peux que m’en réjouir. Cependant, en face, le nombre d’acteurs sur ces sujets a augmenté. Et si la majorité traite encore mal de ces sujets, nous faisons face à une concurrence croissante qui nous amène à accélérer notre développement pour assurer la pérennité de notre média et de nos activités.
Sur le plan collectif ensuite, l’idée d’un rapprochement permet de dresser un premier bilan au sein de l’équipe.
L’avantage d’une petite entreprise, c’est de pouvoir toucher à tout et d’être très polyvalent. D’être soudés et de bien comprendre l’ensemble des missions de chacun. Mais le modèle n’est pas parfait, loin de là ; nos locaux ne sont pas très spacieux, la taille de notre équipe limite le nombre potentiel de collègues, les opportunités d’évolutions professionnelles sont assez limitées, et faute de ressources sur nombre de sujets (finance, administratif, RH, communication, marketing, technique…), nous ne pouvons financer convenablement nos projets ou agissons parfois de manière trop artisanale, ce qui freine notre développement.
Face à ce bilan, quelles solutions s’offrent alors à nous ?
- Continuer ainsi. Après tout, les perspectives sont positives pour l’entreprise, et nous avons pu rester indépendants jusqu’à maintenant. Mais serons-nous dans la capacité de répondre positivement aux limites actuelles de notre entreprise dans un horizon proche ? La réponse est clairement non. Saurons-nous faire face seuls à une concurrence ou à d’autres évènements externes qui peuvent arriver de tous bords ? Pas si sûr.
- Trouver des financements externes pour financer notre développement. Un financement bancaire ? Déjà fait, mais permet d’atteindre des sommes assez faibles et renforce le sentiment d’épée de Damoclès. Une levée de fonds ? Si l’entreprise va bien, nous ne pouvons prétendre à des taux de croissance et de rentabilité souvent attendus par des fonds d’investissement. Nous n’intéressons donc pas ou peu les fonds.
- Un rapprochement avec une autre structure. Si cette solution avait déjà été évoquée par le passé, un alignement des valeurs et envies mutuelles doit être la clé, et nous devons avoir des garanties fortes sur le fait que notre raison d’être et notre ligne éditoriale demeureront intactes.
Le bilan est assez clair. Il est peut-être venu le temps de nous adosser à plus grand que nous.
Youmatter et Kisskissbankbank & Co : quelle grille de lecture avoir ?
Vendre son entreprise n’est pas un choix facile. Alors comment faire le bon choix ? J’ai analysé Kisskissbankbank & Co ainsi que sa maison mère La Banque Postale et sa propre maison mère le Groupe La Poste selon la grille de lecture suivante :
- Un contexte favorable aux idées et projets nouveaux. Avec la baisse continue du courrier (-6,5% d’envoi de courrier par an en moyenne), le Groupe La Poste et ses différentes filiales doivent se mettre dans une posture d’innovation pour réinventer leurs offres et métiers. Un contexte à la fois difficile mais nécessaire pour non seulement conserver leur utilité publique partout dans les territoires, mais aussi potentiellement développer de nouvelles manières d’accompagner tous les citoyens dans leur vie, indépendamment de leur âge, de leur situation financière ou de leur état physique, sans compromettre leur avenir. Par notre action, nous pouvons contribuer à leur transformation écologique et sociale en interne (collaborateurs) comme en externe (leurs bénéficiaires et clients).
- Un actionnariat bienveillant. Youmatter ne sortira jamais de forte rentabilité. Pourquoi ? La marge générée par l’entreprise est quasi intégralement réutilisée pour financer le média et nos missions d’intérêt général. Savoir que derrière notre repreneur se cache la Caisse des Dépôts et l’Etat et non des fonds privés en recherche de dividendes permet d’inscrire l’entreprise dans le temps long.
- Des valeurs communes. Cohésion des territoires, accélération de la transition écologique, soutien d’une économie locale, solidarité et accompagnement des citoyens peu importe leur situation financière… Tout n’est peut-être pas parfait, mais le terreau pour porter ensemble des sujets qui nous tiennent mutuellement à cœur semble favorable chez Kisskissbankbank & Co, La Banque Postale et chez le Groupe La Poste.
- Le respect de nos différences. Au travers des différents projets développés en interne (Kisskissbankbank, Lendopolis, Hellomerci) ou de rapprochements faits précédemment (Goodeed, microDON), j’ai pu échanger avec chacun et me rendre compte qu’au travers de la création du Groupe Kisskissbankbank & Co, chacune des structures avait su rester suffisamment autonome, et donc agile, tout en pouvant bénéficier de moyens humains, financiers et logistiques plus importants.
- Le respect de nos missions. Accélérer la sensibilisation et la formation de l’ensemble des citoyens sur les questions sociales et écologiques, par des contenus pédagogiques et de qualité ? C’est exactement ce que Kisskissbankbank & Co cherche à développer, et c’est la raison principale de notre rapprochement. Les intérêts sont alignés sur notre cœur de métier.
Serait-il alors possible d’obtenir le confort d’une plus grande structure qui nous permette de renforcer notre influence sur les sujets de transition écologique et sociale auprès des citoyens et acteurs économiques, tout en maintenant un esprit entrepreneurial ? C’est le pari que nous nous sommes lancé mutuellement.
Le 30 novembre annonçait officiellement le rachat de Youmatter par le Groupe Kisskissbankbank & Co. Une nouvelle ère pour nous, pour le Groupe Kisskissbankbank & Co mais aussi pour la sensibilisation et la formation des collaborateurs et citoyens sur ces sujets.
Je reste mandataire social de l’entreprise et directeur de la publication pour porter haut et fort et encore pour longtemps une raison d’être demeurée intacte inscrite dans nos statuts, à savoir “En analysant et en éclairant les débats contemporains et les grands phénomènes qui agitent la société, la Société a pour mission d’accompagner un maximum de citoyens, de salariés, d’étudiants, de sans-emplois, d’associations, d’entreprises et de réseaux professionnels dans leur montée en compétence et réflexions sur les enjeux sociaux et environnementaux pour qu’ils puissent mieux s’en saisir. En ce sens, la Société entend générer un impact social, sociétal et environnemental positif et significatif dans l’exercice de ses activités.”
Ce rapprochement va enfin ouvrir de nouveaux horizons : par une ouverture de nos réseaux entre structures et une mutualisation des ressources, nous pourrons mieux développer nos activités. Par un apport de nos connaissances, méthodologies et savoirs, nous pourrons développer avec Kisskissbankbank & Co des manières encore plus efficaces d’embarquer les citoyens et professionnels sur les sujets de transition écologique et sociale. Et enfin, par une présence au sein du Groupe La Banque Postale et in fine La Poste, nous pourrons contribuer en interne à la transformation durable de leurs activités.
Aujourd’hui, à titre personnel, mais aussi pour les collaborateurs de Youmatter, je suis heureux de pouvoir poursuivre notre développement au sein du Groupe Kisskissbankbank & Co.
Notre avenir sera peut-être plus calme et moins chahuté. Plus professionnel et moins artisanal. Moins fun pour certains mais plus rassurant pour d’autres. Mais une chose est certaine, après 12 merveilleuses années au sein de cette entreprise qui m’aura fait grandir autant personnellement que professionnellement, mon envie de faire bouger les lignes sur les sujets écologiques et sociaux reste intacte, les idées continuent de fuser, et ce n’est pas prêt de s’arrêter. Sauf que nous pourrons désormais avoir les moyens de notre ambition, et réaliser aux côtés de toutes ces structures des projets encore plus ambitieux en s’appuyant sur nos forces respectives.
2009, 2021, quelques chiffres qui me rendent fier.
- plus de 20 millions de lecteurs mobilisés sur ces sujets par de l’information de qualité
- Plus de 30 stagiaires, alternants et recrutements réalisés, et aujourd’hui une équipe de 7 personnes au top niveau
- plus de 400 000 euros reversés à l’Etat en charges sociales et impôts sur les sociétés pour soutenir notre système social
- des centaines de professionnels de la RSE et dirigeants accompagnés chaque année sur ces sujets au travers de notre intervention au sein du C3D, d’Entreprise et Progrès, et d’entreprises et associations telles que Expanscience, Bonduelle, Nespresso, Planète Mer…
- chaque année, 10 à 15% de notre chiffre d’affaires affecté au maintien et développement du média et d’autres missions d’intérêt général (intervention dans des écoles, intervention dans des conférences…)
Bonus point pour nos amis entrepreneurs et personnes qui souhaitent apporter plus de sens dans leur activité professionnelle : quelques partages d’enseignements personnels
- Avant d’entreprendre sur ces sujets, pensez d’abord à agir au sein de votre emploi et entreprise actuels. Vous êtes souvent moins seuls que vous le pensez, et la mise en commun créera une dynamique de groupe forcément bénéfique pour tous (même si la conclusion aboutit à changer de job/entreprise). Désormais, des collaborateurs se mobilisent en interne sur ces sujets. Regardez du côté de Les collectifs, le printemps écologique, Alumni for the Planet et si vous êtes étudiant, évidemment Pour un réveil écologique ou encore Shift your Job, réalisé par les shifters du Shift Project.
- Les sujets écologiques et sociaux sont sérieux, et les connaissances sont désormais disponibles (entre information et formation). Ne sous-estimez pas le pouvoir de la montée en compétence sur ces sujets avant de foncer tête baissée dans une idée qui aura peut-être un impact plus négatif que positif sur les sujets que vous souhaitez adresser.
- L’entrepreneuriat est un marathon de résilience et d’humilité. Si vous êtes de nature impatiente et avez du mal à revenir sur vos décisions, l’entrepreneuriat n’est peut-être pas fait pour vous, sauf si vous commencez avec une équipe et des moyens financiers importants.
- Ne créez pas une entreprise dans l’espoir de vous enrichir. 40% des entreprises auront disparu au bout de 5 ans et mis bout à bout, l’entrepreneuriat vous paiera dans une très grande majorité des cas moins qu’au sein de votre carrière actuelle. Créez une entreprise dans l’espoir d’améliorer positivement des éléments que vous n’avez pas pu changer sans passer par l’entrepreneuriat.
Des questions ? Des interrogations ? Un coup de gueule ? Je suis à votre disposition par e-mail sur pysanchis arobase youmatter.world et sur Linkedin pour répondre à vos sollicitations.