Le temps se refroidit, la neige tombe tandis que les vitrines s’animent pour attirer le chaland : pas de doute, les fêtes de fin d’année sont là ! En France, et dans bien d’autres pays, il est de tradition de se réunir autour d’un repas. Et à cette occasion, si certains optent pour un gibier ou une viande, d’autres préfèrent choisir des fruits de mer, coquillages ou poissons. Mais comme dans toute alimentation se pose la question du bon choix des produits : comment protéger les ressources de l’océan sans se priver d’y goûter ? Si certains pensent que c’est impossible, moi je vais vous donner les clefs pour vous faire plaisir, sans impacter les ressources marines les plus en danger. Jetons un oeil aux stars de Noël !

Pour Noël, choisir les coquilles Saint Jacques, pas les pétoncles !

Ils sont les stars des entrées de Noël ou du nouvel an : les coquillages restent une valeur sûre. Parmi les bivalves se trouve la coquille Saint-Jacques. On parle bien de Pecten Maximus, la vraie coquille et non les noix de pétoncles ou autres espèces que vous pouvez trouver à des prix défiant toutes concurrence, en particulier au rayon surgelé… Mais dont l’origine n’est ni française, ni même vraiment connue !

Cette pêche a longtemps dû composer avec le braconnage (merci aux Anglais !), la destruction des milieux de vie de la coquille et la prédation d’espèces invasives comme la Crépidule, en baie de Saint Brieuc.

La saison de la coquille Saint-Jacques a débuté cette année entre mi octobre et début novembre selon les zones, ce qui en fait le produit parfait pour les fêtes de fin d’année. Sa pêche en France est dorénavant extrêmement réglementée, soumise à des quotas précis, des jours de pêche, des licences et une surveillance aérienne de la part des Affaires Maritimes. Ceci permet de gérer la ressource au plus près des stocks. Le résultat est bien visible cette année, les zones de la baie de Seine et de Saint Brieuc, qui fournissent la plus grosse partie du marché national, confirment « une belle abondance ».

Qui dit abondance dit prix en baisse : vous devriez pouvoir en trouver à des prix inférieurs aux années précédentes chez votre poissonnier. C’est le bon exemple d’une pêche gérée durablement pour la préservation de la ressource : autant de raisons de lui faire une place dans nos menus. Mon conseil : quitte à n’en prendre que quelques unes, privilégiez ces noix aux pétoncles surgelées, largement moins chers mais ne relevant absolument pas d’un achat responsable.

Trouvables entre 5 et 7 euros le kilos de coquilles, un repère est utile : 5 kg de coquilles donnent environ 1 kg de noix (le muscle qui est dans la coquille). Ah et pour la petite histoire, le corail, qui régale les fins gourmets, est l’organe reproducteur de l’animal !

Poisson à Noël : choisir des produits d’eau douce

Dans la catégorie poissons, l’immanquable de Noël, présent sur une grande partie des tables françaises, c’est bien sûr le saumon. Et comme chaque année, les études pleuvent avant la période des fêtes : le saumon d’aquaculture norvégien est nuisible pour l’environnement par ses impacts sur la qualité de l’eau des fjörds, le saumon d’aquaculture intensive chilienne est décimé par une maladie, et cette année, le saumon bio est plus concentré en métaux lourds que celui d’élevage intensif !

Alors comment choisir si vous voulez vraiment du saumon ? Relativiser ces études peut être une bon commencement. Oui, un saumon bio est plus riche en métaux lourds, mais largement sous les taux en vigueur en France : 10 fois moins que le taux légal, pour la référence la plus contaminée. D’ailleurs, ce taux serait dû à leur alimentation, plus riche en poissons que ceux d’aquaculture intensive ! On peut comparer leur contamination aux antibiotiques : on sait déjà que les taux du bio sont largement inférieurs aux poissons d’aquaculture intensive, tout comme leur impact sur l’environnement. Personnellement, je préférerais toujours un poisson bio, d’aquaculture, celle-ci impactant moins le milieu qu’une pêche au chalut.

Variez les poissons et les origines, c’est le meilleur moyen de se faire plaisir et de limiter l’impact des pollutions, les bienfaits d’un poisson de qualité (riche entre autres en Oméga 9) compensant largement ces inconvénients. Mais pour combien de temps ?

Une autre solution peut être d’opter pour un poisson d’eau douce, comme la truite, le brochet, le Black-Bass, la perche ou le sandre. Ces espèces sont présentes dans nos cours d’eau et font l’objet d’élevage biologique ou d’une pêche respectueuse du milieu. On a trop tendance à l’oublier !

Huîtres pour Noël : à (quasi) volonté, comment choisir ?

Les consommateurs commencent à être avertis : l’huître est un produit fragile, extrêmement dépendant de la qualité de son environnement. De ce fait, la profession d’ostréiculteur est en crise, principalement à cause des mortalités qui touchent toutes les côtes françaises. On peut évoquer plusieurs causes pour ces mortalités : une qualité d’eau qui varie énormément (température, pollution, surcharge des parcs à huîtres) et la présence d’un virus et d’une bactérie qui tuent même les jeunes huîtres.

Pour certains, c’est la présence d’huîtres « triploïdes » qui en est responsable, en poussant à la surproduction. En effet, ces huîtres disposant de 3 séries de chromosomes (quand les huîtres « diploïdes » traditionnelles n’en ont que deux) ne perdent pas de temps à se reproduire, ce qui leur permet d’être élevées toute l’année en évitant les périodes de « laitance », qui indisposent le consommateur. Selon leurs détracteurs, cet animal contribuerait ainsi à transmettre des maladies qui frappent normalement pendant l’été, une saison où les huîtres traditionnelles n’étaient pas commercialisées. Diploïdes ou triploïdes, le consommateur ne peut le savoir en l’absence d’étiquetage : seule la durée d’élevage les différencie, la triploïde prenant 2 ans pour atteindre sa taille adulte contre 3 ans pour l’huître traditionnelle.

Suite à cette crise, la France est passée d’une production de 160 000 tonnes dans les années 90 à 90 000 cette année, qui reste bien meilleure que les précédentes. Raison de plus pour soutenir nos ostréiculteurs qui luttent pour fournir un animal de grande qualité, et vivant !

Une bourriche d’huître se conserve au frais pendant 14 jours maximum, sans ruptures de la chaîne du froid. En cette période proche de Noël, les vols se font de plus en plus courant, obligeant les exploitants de parcs à rivaliser d’imagination : faîtes attention à l’endroit ou vous achetez votre bourriche.

Concernant les tailles, plus elle est importante plus le produit est cher (taille maximale n°1, pour les plus petites vous pouvez trouver du 4). Les fins gourmets trouvent les huîtres de Bretagne plus iodées, avec du caractère, alors que les affinées en claires du bassin Charentais sont plus fines et délicates. A vous de vous faire votre avis !

Crustacés à Noël : attention à la provenance

Crevettes, bouquets, gambas, langoustines, crabes, araignées voire homards et langoustes… la variété ne manque pas et la qualité non plus ! Les clefs d’un achat responsable sont la connaissance de la provenance, de la saison et de l’espèce. Concernant les crustacés en général, c’est en poissonnerie que le meilleur choix se fera. Votre poissonnier pourra vous fournir en crevettes (fraîches et sauvages) d’origine française, pouvant même disposer d’un label de qualité ou d’origine. Au rayon surgelé, vous ne trouverez que des crustacés d’élevage intensif en provenance d’Asie, pas forcément synonyme de respect des écosystèmes ou des mêmes qualités sanitaires. Et il reste toujours cette technique du trempage, qui devrait dissuader tout consommateur d’aller faire un tour au rayon « fruits de mer surgelé »…

La pêche française de la langoustine s’est nettement améliorée sur le plan de la sélectivité (diminution des prises accessoires). L’abondance de la ressource cette année lui permet d’être vendue à un prix inférieur aux années précédentes (dans les 20 euros le kilo).

Pourquoi ne pas oser l’inconnu ?

Et si vous osiez faire un pas dans l’inconnu en découvrant le Berlingot de mer ou la méduse ? Ces espèces invasives sont un vrai danger pour la biodiversité océanique. En régulant les populations de rascasses volantes ou de crépidules, vous participez au développement d’une nouvelle filière de pêche responsable, visant à restaurer un équilibre perdu dans les écosystèmes marins, par la faute de l’Homme et de ses activités.

Ainsi, les Berlingots de mer ont été introduits en France par les péniches du débarquement en Normandie de Juin 1944. En Baie de Saint Brieuc, elles impactent principalement le développement des coquilles Saint-Jacques par leur nombre et leur rapidité de reproduction. Ouvrir une nouvelle filière permet à la fois de transformer une plaie écologique en ressource exploitable mais aussi de sauvegarder un écosystème littoral déséquilibré.

Oui, votre estomac est bien un outil de lutte écologique !