La COP27 s’est achevée en Egypte, avec quelques avancées, mais surtout avec la sensation que les acteurs internationaux n’ont pas encore pris la mesure des changements à mettre en oeuvre.

En ce mois de novembre 2022 se tenait la COP27, grande réunion internationale visant à accélérer la lutte contre le réchauffement climatique à l’échelle globale. Cette COP, qui devait s’attaquer à des enjeux cruciaux comme la justice climatique, la place des énergies fossiles ou la sobriété, arrivait juste après la sortie du dernier rapport du GIEC, qui annonçait encore l’aggravation de la crise climatique.

Il s’agissait donc de prendre des mesures radicales face au réchauffement climatique. Mais alors, que retenir de cet Accord ? Quelles sont les avancées, les points qui ont bloqué ? Que retenir de la COP27 ?

Des avancées sur les pertes et dommages et l’adaptation

L’enjeu de la justice climatique devait animer les négociations de la COP27, et c’est peut-être le seul point positif de cette COP en Egypte : le sujet a été au coeur des débats. Cela faisait des années que les pays du Sud, plus pauvres et plus durement frappés par les conséquences du réchauffement climatique, réclamaient une aide financière des pays du Nord dans la transition écologique. Les pays du Nord quant à eux, bien qu’ils aient plus largement contribué aux émissions globales, freinaient depuis longtemps concernant ce financement. Le Fond Vert, décidé à Copenhague pour réunir les financements des pays riches en ce sens, n’avait été que très partiellement financé.

Mais ces dernières années, le vent a tourné et la COP27 a été le symbole de ce basculement. De plus en plus d’Etats développés ont pris des engagements pour accompagner les pays du Sud dans le financement de leur adaptation climatique et des « pertes et dommages ». L’accord retenu avec la COP27 confirme la tendance : un Fond spécial pour les pertes et dommages a été créé, et le fond pour l’adaptation climatique devrait être renforcé.

Du point de vue symbolique, ces avancées sont considérables, puisqu’elles actent la responsabilité éthique et juridique des pays développés (qui ont contribué à plus de 70% des émissions de CO2 depuis deux siècles) dans la crise climatique. Elles montrent aussi la nécessité pour les pays qui ont le plus profité de la mondialisation et l’industrialisation de réparer les dommages engendrés par cette crise climatique

Encore des promesses de moyens… qui ne seront pas tenues ?

Problème, encore une fois, aucun engagement contraignant n’a été pris par les Etats signataires pour remplir ces fonds. Or c’est bien là l’enjeu : chaque année, les pays du monde subissent plusieurs centaines de milliards d’euros de pertes liées aux catastrophes climatiques qui se multiplient. Les catastrophes climatiques engendrent déjà près de 250 milliards d’euros de pertes par an dans le monde, un chiffre qui pourrait doubler d’ici 2050.

Qui paiera pour compenser ces pertes ? Dans quelles proportions ? Qui viendra contrôler que les engagements financiers soient bien tenus pour financer ces pertes ? L’accord de la COP ne le dit pas. On risque donc de se retrouver dans une situation similaire à celle qu’a connu le Fond Vert depuis 13 ans : un compte en banque que personne ne remplit.

1.5 degrés : un objectif maintenu… mais sans y mettre les moyens

Parmi les autres points « positifs », on peut citer le maintien de l’objectif de 1.5 degré, qui était réapparu dans les accords de la convention des Nations-Unies sur le changement climatique à Glasgow. Garder cet objectif ambitieux dans le texte est un signal positif, qui symbolise l’urgence de la crise climatique.

Mais c’est là tout le paradoxe : si l’on voulait aujourd’hui atteindre cet objectif, les actions à mener seraient extrêmement radicales en termes de réduction des émissions. Comme le montrent les analyses récentes, le budget carbone restant à l’Humanité avant de franchir le seuil de 1.5 degré est de plus en plus limité. D’après Carbon Brief, le budget carbone disponible avant de franchir ce seuil serait d’à peine 260 milliards de tonnes de CO2, soit moins de 6 ans aux rythmes d’émissions actuels. Il faudrait donc réduire de façon extrêmement drastique les émissions de l’ensemble des pays du monde pour espérer respecter cet objectif, faute d’avoir entrepris de vrais changements plus tôt.

Pour cela, il faudrait donc véritablement changer de paradigme.

Toujours rien sur l’enjeu du changement de paradigme

Or précisément, sur les enjeux cruciaux de ce changement de paradigme, le texte de l’Accord de Charm-el-Cheikh reste désespérément vide. Comme on pouvait s’y attendre dans une négociation organisée dans un pays gazier et pétrolier, politiquement proche des pays du Golf, où les lobbyistes du pétrole n’ont jamais été aussi nombreux, le sujet crucial des énergies fossiles a été évité. En clair : aucun engagement de réduction de l’usage des énergies fossiles n’a été pris, ni aucun engagement d’arrêt des financements de ces sources d’énergie… qui représentent près de 75% de nos émissions de gaz à effet de serre.

L’enjeu essentiel de la lutte contre les inégalités n’a pas non plus été réellement abordé : il est donc fort probable que, faute d’une action systémique, l’écart de richesses entre les plus riches et les plus pauvres continue de croitre, et avec lui, les inégalités environnementales, et l’acceptabilité de la transition écologique. La question de la sobriété, ou de la remise en cause de nos modèles de croissance intenables ont été ignorées. Le dialogue avec les collectivités et les acteurs locaux a été extrêmement limité, faute de représentants officiels de ces organisations à la COP.

Bref, l’accord de la COP27 ne montre décidément aucun signe d’une prise de conscience qu’il faut changer radicalement de modèle.

Une pente glissante : guérir plutôt que prévenir

On peut donc même dire que cette COP marque un pas de plus sur une pente extrêmement dangereuse. Plutôt que d’aborder le problème à la racine, cet accord international se contente d’y appliquer un pansement. On créé des Fonds pour financer les pertes et les dommages, tout en n’agissant pas sur les causes premières de ces dommages. Guérir plutôt que prévenir, voilà donc la voie que semblent avoir choisie les dirigeants réunis en Egypte.

Et si cette pente est dangereuse, c’est que sans prévention, sans atténuation, la crise risque d’être une telle intensité que rien ne pourra la guérir. Ni les milliards d’euros, ni la compensation, ni l’adaptation, ni la croissance et l’innovation que ces dirigeants cherchent aujourd’hui à tout prix à préserver.

Année après année, le constat reste donc le même : pendant que la crise climatique avance à un rythme toujours plus intense, la COP, elle avance à tous petits pas, sans changer de direction.

Photo par Brendan O’Donnell sur Unsplash

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