Et si la génération Y était capable de transformer vraiment le business mondial et de le faire passer « du bon côté » ? Comment les nouvelles attentes de ces consommateurs jeunes et digitaux vont-elles influencer les entreprises et les pousser à faire la transition vers des modèles d’entreprises plus responsables, plus justes, plus respectueux de l’environnement et de la société ? Décryptage.
La génération Y ne va pas tarder à prendre le pouvoir. Elle arrive doucement sur le marché du travail, elle rentre dans la vie active, commence à briguer les postes à responsabilité. Elle représente une part de plus en plus grande des consommateurs, des travailleurs et des électeurs mondiaux.
Mais cette génération se veut différente de celles qui l’ont précédée dans bien des domaines. Plus ouverte, plus mobile, plus connectée, plus diversifiée… la génération Y est d’ores et déjà en train de transformer le monde. Les millennials comme on les appelle, ont déjà commencé à faire évoluer le monde du travail. Ils sont la génération du travail nomade et du télétravail, la génération du digital, des objets connectés, des start-up. Ils sont la génération de l’économie collaborative, des uberisations, du travail indépendant.
Mais à y regarder de plus près, la Génération Y est peut-être aussi celle qui transformera enfin les entreprises et les fera passer du bon côté : celui du développement durable, de la justice sociale et du « care ». Elle est peut-être celle qui fera du monde de l’entreprise un univers plus juste, plus équitable, guidé par autre chose que le seul profit. C’est en tout cas ce que suggèrent de plus en plus de sondages menés auprès de cette Génération unique.
La génération Y : la génération des entreprises durables
Les jeunes nés dans les années 80-90 seront la première génération d’adultes à faire face aux conséquences concrètes du réchauffement climatique. Ils subiront les conséquences du changement climatique sur la planète et sur la météo, ils subiront les conséquences du réchauffement climatique sur les entreprises, mais aussi sur la société en général. Ils seront les premiers à perdre de l’argent et du confort de vie à cause d’un réchauffement climatique causé par les générations précédentes. Ils subiront de plein fouet les conséquences sanitaires de la pollution de l’air, celles de la croissance des inégalités sociales, des crises politiques et économiques…
Pour toutes ces raisons, la génération Y semble plus sensible que les autres aux questions du développement durable, de l’éthique, de la justice sociale. Les jeunes nés après les années 1980 (selon un sondage mené par les Conseillers économiques de la Maison Blanche) sont plus susceptibles que les générations précédentes de vouloir contribuer à améliorer la société. 84% d’entre eux font des donations à des oeuvres caritatives, ils s’investissent dans des causes philanthropique de façon plus régulière que leurs aînés.
Ils veulent changer de société, changer de mode de vie, et ils projettent évidemment leurs attentes sur les entreprises. Et cela pourrait bien pousser ces dernières à changer, enfin. Selon un sondage mené par Global Tolerance, 62% des jeunes ne veulent travailler que “pour des entreprises et organisations qui cherchent à délivrer un impact environnemental et social positif”. Ils seraient 84% à considérer comme un critère d’achat essentiel la politique de l’entreprise en matière de développement durable. Les millennials cherchent désormais des entreprises qui font un effort pour protéger l’environnement, qui réduisent leurs émissions de gaz à effet de serre, qui font la promotion de l’éthique et de l’équité. 75 % des jeunes de la génération Y considèrent qu’il est important pour une entreprise de « payer sa dette à la société ».
Aujourd’hui, ces consommateurs d’un nouveau genre représentent un quart de la population mondiale, et près de 200 milliards de pouvoir d’achat annuel, un pouvoir d’achat qui devrait croître : d’ici 2030, les millennials représenteront 75% des actifs dans le monde. C’est donc ce nouveau public que les marques doivent séduire. Mais pour séduire, elles vont devoir se transformer. En effet, seuls 1% des millennials se disent influencés par la publicité et le marketing traditionnels. Les entreprises vont donc devoir trouver de nouvelles façon de s’attirer les faveurs de ces consommateurs exigeants. La génération Y lit les blogs et les réseaux sociaux avant d’acheter (33% des jeunes déclarent être majoritairement influencés par les blogs pour leurs infos et leurs achats) et se laisse peu influencer par les médias traditionnels (TV, journaux, radio…). Pour se démarquer, pour attirer ces jeunes, les entreprises vont donc devoir montrer ce qu’elles font de mieux. Elles vont devoir développer leur « réputation », mais pas seulement sur la qualité de leurs produits, ou leur capacité à innover. Ce qui comptera désormais, c’est leur réputation en matière sociale, environnementale, d’éthique, ou encore de relation-client.
Nécessairement, les entreprises qui veulent toucher ces jeunes vont devoir faire des efforts : être plus green, être plus éthiques et plus justes. Nécessairement, cela va forcer les entreprises à s’attaquer sérieusement aux problèmes sociaux et environnementaux. Et tout cela devrait contribuer à rendre le monde de l’entreprise (un peu) meilleur.
La génération Y : transparence et authenticité
Les millennials attendent aussi que les entreprises transforment leurs modes de communication. Ils attendent plus de transparence : 43% des jeunes considèrent que l’authenticité d’une marque est plus importante que le contenu qu’elle communique. S’ils ne font pas confiance à une marque, ils ne prennent même pas la peine de lire ou de regarder le message qu’elle diffuse. 62% des digital native disent vouloir s’engager directement avec les marques sur les réseaux sociaux, de façon plus directe et toujours plus transparente, sans passer par les canaux corporates traditionnels que sont la pub et le marketing. Ils veulent un rapport plus personnel avec leurs marques.
La communication avec les jeunes de la génération Y sera donc plus horizontale, plus directe, plus co-construite. 42% des millennials veulent d’ailleurs avoir un rôle plus fort dans la co-construction des produits qu’ils achètent : ils veulent donner leur avis, faire des feedbacks, avoir un rôle et un regard sur tout le processus de production, afin de savoir ce qu’ils achètent… Désormais, les entreprises ne pourront plus entretenir un climat d’opacité permanente autour de leurs processus de productions : ils devront être clairs sur ce qu’ils mettent dans leurs produits, sur la façon dont ces produits sont fabriqués, sur les conditions de vente. Les affaires comme celle de Volkswagen montrent déjà les prémices de cette tendance : lorsqu’une entreprise est prise à mentir ou à cacher des informations à ses consommateurs, sa réputation et sa performance s’en ressentent presque immédiatement.
Face à des consommateurs de plus en plus « acteurs », les entreprises vont donc devoir s’ouvrir, devenir plus flexibles, plus transparentes.
La génération Y et l’investissement pour une société durable
Enfin, la génération Y ne donnera pas son argent n’importe comment : elle sera celle de l’investissement qui a du sens. Selon Accenture, les jeunes générations vont hériter d’au moins 30 milliards de dollars de leurs parents rien qu’aux Etats-Unis d’ici à 2030. Avec ces actifs, ils pourraient devenir des investisseurs. Et là encore, la Génération Y va changer la donne : d’après une étude menée par Spectrem Group, 45% des millennials possédant du capital voudraient pouvoir l’utiliser pour aider les autres et la société. Ils seraient 67% à considérer qu’investir doit être le reflet de leurs valeurs sociales, politiques et environnementales.
Lorsque les millennials commenceront à s’investir dans la finance et dans la bourse, ce ne seront donc plus les grosses compagnies tournées uniquement vers le profit qui attireront leurs investissements. Au contraire, la génération Y investira son capital dans des entreprises qui correspondent à leur engagement, des entreprises plus responsables, plus durables, plus justes. Il y a fort à parier que demain, ce ne seront plus seulement les cours boursiers qui décideront de l’avenir financier des entreprises, mais aussi leur capacité à valoriser les actions positives qu’elles mènent au quotidien.
Bientôt, l’engagement sociétal des entreprises deviendra un critère pour obtenir des financements, pour attirer les capitaux. La tendance a d’ores et déjà commencé : actuellement les gestionnaires de patrimoines, les fonds de pension et les acteurs financiers en général se tournent de plus en plus vers l’Investissement Socialement Responsable (ISR). Les actifs dans ce type d’investissements sont encore loin d’atteindre les montants que l’on connaît dans la finance en général, mais la tendance est là : 21 000 milliards d’actifs en 2014, soit 62% de plus qu’en 2012. Et plus la Génération Y aura d’actifs, plus cette tendance va se poursuivre. À terme, les millennials pourraient bien pousser également la finance à devenir « responsable ».
Le monde de l’entreprise est donc peut-être dans une période charnière, une période de transition. Les entreprises vont devoir se transformer face à l’émergence d’une génération qui réclame un vrai changement de modèle. La génération Y est porteuse d’un espoir : l’espoir que bientôt la fracture entre les entreprises et la société va se réduire, que tous les acteurs économiques et sociaux vont pouvoir co-construire une société meilleure et plus durable. Ces espoirs aboutiront-ils à une vraie révolution dans le monde de l’entreprise ? Seul l’avenir le dira, mais une chose est sûre : certaines transformations ont déjà commencé !