Publié le 15 juillet 2020
La crise sanitaire liée au COVID19 nous a montré que pour que de nouvelles habitudes soient adoptées, les consignes doivent être dites, lues, vues, entendues, répétées. Il en va de même pour le climat : c’est en tout cas l’avis du C3D qui lançait en mai dernier 8 gestes barrières pour le climat à destination des entreprises et des citoyens.
Pour illustrer ces gestes barrières pour le climat, quatre membres du C3D nous dévoilent leurs avancées et leurs ambitions. Dans cet article, Charlotte Migne, Directrice Développement Durable chez FM Logistic, témoigne de l’action de son entreprise sur le geste barrière N°2 : « J’utilise des énergies décarbonées pour l’ensemble des usages de l’énergie », avec notamment le projet de production d’hydrogène bas-carbone et local.
La logistique, un secteur énergivore mais des actions d’efficacité énergétique déjà lancées
En tant que logisticien et organisateur de transport, nous avons un impact environnemental sur l’ensemble de la supply chain. Nos postes d’émission les plus importants sont le transport, à hauteur de 95 % de notre impact carbone, et nos quelque 170 entrepôts à hauteur de 5 % ; le transport utilisant massivement du gazole et les entrepôts utilisant principalement de l’électricité, notamment pour l’éclairage et le contrôle de la température dans les entrepôts.
Pour réduire ces deux postes, FM Logistic travaille depuis longtemps sur la mutualisation et l’optimisation du chargement des remorques pour le transport en s’appuyant sur son modèle multi-clients, et sur des programmes d’efficacité énergétique et l’achat d’énergie verte pour les entrepôts.
Dans un second temps, nous avons tout naturellement cherché à équiper nos entrepôts en énergie renouvelable, notamment solaire. Étant plutôt un « petit » consommateur d’énergie, mais un producteur à potentiel (avec 4,5 millions de mètres carrés de toiture d’entrepôts), nous voulons utiliser le surplus d’électricité verte produite que nous ne consommerons pas pour les besoins de nos bâtiments pour le transformer en hydrogène par électrolyse de l’eau.
L’hydrogène bas carbone produit a ensuite deux usages : celui de carburant propre pour le transport et la manutention, notamment pour nos chariots élévateurs. Il pourra également être distribué pour les besoins régionaux en énergie verte de la logistique, des industries locales et des collectivités afin d’alimenter leurs camions de collectes de déchets ou leurs bus de transport public. La plateforme logistique devient ainsi une source d’énergie propre et de distribution pour un écosystème régional.
D’après nos premiers calculs, nous pourrions produire dès 2022 un volume d’hydrogène d’environ 250 tonnes par an sur un seul site, soit l’équivalent de la consommation de 20 camions, 20 utilitaires et 100 chariots élévateurs par jour.
Du premier pilote de production locale d’hydrogène bas carbone au déploiement européen
Ce projet est actuellement en test près de Madrid, à Illescas. Il se limite pour le moment aux besoins propres de l’entreprise, c’est-à-dire qu’il n’y a pas de revente à un écosystème local. Ce premier essai nous permettra de confirmer qu’il n’y a pas de barrière technique à la production d’hydrogène sur nos sites à partir d’énergie solaire.
En France, nous sommes actuellement dans la phase d’étude de faisabilité, qui se prolongera jusqu’à la fin de l’année, avec un objectif de déploiement au 2ème semestre 2021. La zone choisie pour développer ce premier hub d’hydrogène bas carbone est en cours d’étude. Deux zones sont actuellement ciblées pour ce projet : une dans L’Oise et l’autre dans le Centre Val-de-Loire.
L’idée est ensuite de construire un projet européen en poursuivant le déploiement du projet en Espagne, en France et potentiellement dans d’autres pays méditerranéens ou en Europe de l’est.
Des freins avec lesquels composer pour tendre vers le déploiement des énergies décarbonées
L’enjeu principal réside dans la constitution d’un écosystème local de consommateurs d’hydrogène permettant de sécuriser que l’hydrogène produit sera consommé par FM Logistic ou vendu à des tiers. Il est important que les consommateurs soient locaux, pour éviter le transport de l’hydrogène sur de longues distances, qui représente une part importante de son coût final et de son impact environnemental. Ceci est la condition sine qua non pour atteindre un prix de l’hydrogène vert compétitif avec celui de l’hydrogène gris (c’est à dire produit à partir d’énergies fossiles).
La seconde difficulté est la disponibilité de véhicules logistiques utilisant l’hydrogène. Il n’existe pas à l’heure actuelle de semi-remorques roulant à l’hydrogène en France, ce qui est évidemment un frein au développement du transport hydrogène.Nous sommes en contact avec des constructeurs qui développent des véhicules utilitaires ou poids lourds à hydrogène. Des prototypes sont actuellement en cours de réalisation et devraient voir le jour fin 2021 / début 2022.
Avec ce projet, FM Logistic espère faire de la plateforme logistique une source d’énergie renouvelable pour contribuer à des boucles d’énergie locale, et aller au-delà de son objectif interne de neutralité carbone, afin de participer à la transition énergétique de tout son secteur.
Retrouvez l’ensemble des 8 gestes barrières pour le climat et signez la pétition portée par Fabrice Bonnifet, Président du C3D.
Crédit image : Solaire sur Shutterstock.