Alimentation durable : 8 conseils simples pour manger plus écologique, sain et économique
Comment manger mieux, pour la planète, pour la santé et pour son budget ? La réponse est dans la sobriété alimentaire. Dans ce quatrième article de notre dossier spécial « Transition écologique et sobriété » réalisé en partenariat avec l’ADEME, l’Agence de la Transition écologique, nous vous présentons 8 conseils pratiques pour manger plus écolo et plus sain.
Aujourd’hui, notre système alimentaire est au centre de nombreuses problématiques sanitaires, économiques, sociales et environnementales. L’alimentation mondiale, c’est à la fois des millions de personnes en situation de précarité alimentaire, et des milliards d’individus en surpoids ou obèses. C’est aussi des inégalités sociales et économiques. Des dynamiques culturelles qui se transforment vite. Et surtout, un impact environnemental considérable : émissions de gaz à effet de serre, déforestation, pollutions diverses.
Alors, comment changer ça et faire émerger une alimentation meilleure pour l’être humain et pour l’environnement ? Comment redéfinir notre alimentation pour faire émerger une alimentation plus saine, plus écologique, et peut-être plus viable sur le plan économique ? Et si la réponse était dans la sobriété alimentaire ? Et comment mettre cette nouvelle alimentation plus écologique et plus saine en pratique au quotidien ? Tentons de comprendre.
Alimentation saine et durable : vers la sobriété alimentaire
Redéfinir notre alimentation, c’est d’abord s’interroger sur les besoins qu’elle doit permettre de combler. Le rôle de l’alimentation, c’est avant tout d’apporter aux individus les nutriments essentiels à leur bonne santé et à leurs besoins physiques. L’alimentation est aussi un secteur économique, qui doit permettre à ceux qui la produisent et la distribuent de vivre dignement. Mais c’est aussi une source de plaisir au quotidien, une manière de partager via la cuisine et la gastronomie, ou encore de découvrir des saveurs d’autres cultures. L’alimentation répond donc à un besoin à la fois physique, mais aussi culturel, social économique.
Le problème, c’est qu’aujourd’hui, notre alimentation ne répond pas toujours très bien à ces besoins. Sur le plan nutritionnel, par exemple, l’alimentation contemporaine est en partie la cause d’un certain nombre de pathologies et de maladies chroniques : diabète, obésité, cancers… Aujourd’hui, 17% des Français sont obèses, 50% sont en surpoids, plus de 4 millions de personnes sont diabétiques. D’après la grande étude nutritionnelle menée en France en 2017 (INCA3), l’alimentation d’une majorité de français ne permet pas d’atteindre les recommandations nutritionnelles. Ainsi, par rapport aux recommandations nutritionnelles, les Français consomment généralement trop peu de fruits et légumes, trop peu de fibres, mais trop de graisses saturées et de sel, trop de sucres raffinés… Notre alimentation ne remplit donc plus très bien son rôle nutritionnel.
Sur le plan économique, même constat : notre système de production alimentaire ne rémunère pas toujours suffisamment les producteurs. En France, par exemple, un agriculteur sur quatre vit sous le seuil de pauvreté selon l’INSEE. Les prix de l’alimentation, en moyenne plus bas que dans le passé, varient tout de même de façon hétérogène. Résultat, l’alimentation devient un marqueur puissant des inégalités sociales et économiques : certains produits deviennent inaccessibles aux populations précaires, et les produits réputés plus sains et écologiques sont souvent plus accessibles aux populations aisées.
Sur le plan social et culturel, le rôle de l’alimentation évolue également. D’après les études de l’INSEE, les Français passent de moins en moins de temps à cuisiner ou à table chaque année. Le repas, pris de plus en plus devant la télévision, devient un moment moins social. Les jeunes apprécient d’ailleurs moins que leurs aînés le moment des repas. Culturellement, l’alimentation se diversifie, avec l’accès de plus en plus simple aux ingrédients et aux plats d’autres régions du monde, mais elle s’homogénéise aussi, avec la généralisation des fast-foods, des plats préparés et des chaînes de restauration.
En même temps, l’alimentation doit idéalement répondre à ces besoins physiques, économiques, sociaux et culturels sans remettre en cause la stabilité des écosystèmes naturels. Or aujourd’hui, l’alimentation moderne dégrade fortement la nature. Émissions de gaz à effet de serre, usage massif de pesticides, dégradation des sols et de la biodiversité ou encore déforestation sont aujourd’hui des problèmes écologiques majeurs liés à la production alimentaire. Tout compris (production agricole, transport, transformation, déchets…), l’alimentation d’un français représente un quart de ses émissions de gaz à effet de serre.
Face à ce constat, il semble évident qu’il faut repenser notre alimentation : inventer une alimentation qui réponde mieux à nos besoins nutritionnels, économiques, mais aussi sociaux et culturels, et qui préserve nos écosystèmes. En d’autres termes, une forme de sobriété alimentaire. Et si cette révolution doit être systémique, politique, elle passe aussi par la prise de conscience des citoyens et l’adoption de nouvelles habitudes de consommation alimentaire.
Comment participer à inventer cette alimentation de demain ? Voici quelques conseils simples pour le quotidien, que chacun de nous peut mettre en œuvre pour participer au développement d’une alimentation plus sobre, plus saine, plus durable.
1 – Manger moins…
Comme le montre la généralisation du surpoids dans nos sociétés, nous mangeons en moyenne trop. Notre alimentation contient de plus en plus de “calories vides” : ces aliments riches en calories, souvent riches en sucre, qui n’apportent pas ou peu de nutriments essentiels comme les vitamines, les minéraux, les fibres ou les protéines.
Les sodas, les jus de fruits ultra transformés, les glucides très raffinés sont autant d’aliments qui contribuent à augmenter notre apport calorique sans pour autant nous aider à combler nos besoins nutritionnels. En plus de dégrader notre santé, la production de ces aliments engendre des impacts environnementaux importants.
L’enjeu pour une alimentation plus durable, plus saine et plus sobre, c’est donc globalement (hors des cas évidents de précarité et de sous nutrition) de manger moins, mais surtout de manger moins de ces produits dont l’utilité nutritionnelle est très limitée. Et manger moins, cela va aussi avec le manger mieux.
2 – … manger mieux !
Mais alors comment adopter une meilleure alimentation ? Les études indiquent que nous ne mangeons pas toujours les bonnes catégories d’aliments par rapport à nos besoins nutritionnels. Ainsi, en France, on consomme trop de protéines d’origine animale, trop de sels, trop de graisses saturées, trop de sucre.
Concrètement, nous consommons trop de viande (notamment les plus grasses), trop de produits ultra-transformés très riches en sel (les plats préparés, les pizzas, les soupes en brique, les sandwiches), trop d’aliments sucrés ou de féculents raffinés.
Dans le même temps, les études nutritionnelles montrent aussi que notre consommation de fibres est insuffisante. En cause, une consommation insuffisante de fruits, de légumes, de légumineuses, et de produits céréaliers complets. Selon les recommandations, il faudrait que nous en mangions une fois et demi plus qu’actuellement.
Incidemment, les aliments que nous consommons trop (la viande, les produits transformés) sont souvent ceux qui génèrent le plus d’impacts environnementaux. Alors que ceux que nous ne consommons pas suffisamment (les légumes, les légumineuses) sont généralement les plus écologiques.
Adopter une alimentation plus saine et durable passe donc aussi par de meilleurs choix alimentaires : réduire sa consommation de produits transformés, de charcuterie, ou de produits contenant beaucoup de graisses animales ou de glucides simples. Et les remplacer par des produits comme les légumes, les légumineuses, les céréales complètes : autant d’alternatives savoureuses, durables et saines.
3 – Manger moins de produits animaux : un geste pour soi et pour l’environnement
On l’a vu, on consomme trop de viande. Mais cela est valable pour les produits d’origine animale en général, comme les fromages !
Il faut comprendre que l’élevage est le principal émetteur de gaz à effet de serre de l’agriculture. Une protéine de bœuf émet, par exemple, 36 fois plus de CO2 qu’une protéine de blé. Pourquoi ? Parce qu’un animal consomme des aliments (herbe mais aussi maïs, soja, céréales etc.) qu’il fallu produire en quantité, générant des émissions de GES, des consommations de pesticides, des rejets dans l’eau, l’air…. Et consommant des grandes quantités de terres agricoles, dont certaines sont obtenues en déforestant dans les pays dits du Sud comme le Brésil. Les ruminants rejettent également de grandes quantités de méthane, un autre gaz à effet de serre, et les animaux en général génèrent des déjections qu’il faut gérer. Si on veut réduire l’empreinte écologique de son alimentation, le plus efficace est donc de diminuer sa consommation de viande et de produits d’origine animale.
Manger beaucoup de viande, notamment les plus riches en graisses, a aussi un impact sur notre santé en favorisant le surpoids ou les maladies cardio-vasculaires. La viande transformée (charcuterie notamment) est d’ailleurs considérée comme “cancérigène pour l’Homme” par le Centre international de recherche sur le cancer depuis 2015.
En pratique, il ne s’agit pas forcément de bannir tout produit animal. Cependant, quelques petits gestes sont simples à mettre en œuvre : réduire sa consommation de viande et éviter au maximum le boeuf et l’agneau (qui sont les viandes les plus polluantes) sont des bons premiers gestes pour préserver sa santé et celle de l’environnement. Pour remplacer cet apport en protéines, on peut augmenter sa consommation de légumineuses (pois chiches, haricots secs, lentilles). Pas de restriction avec les légumineuses : on peut en consommer tous les jours. Et il existe des dizaines de recettes sans viande, ou avec moins de viande, qui sont tout aussi savoureuses que nos recettes traditionnelles qui en contiennent. L’avantage, c’est que cela coûte généralement moins cher de se nourrir avec des protéines végétales qu’avec des protéines animales.
On peut aussi réduire sa consommation de fromage, en choisissant mieux : moins de fromages industriels, dans des produits transformés, et plus de fromages artisanaux, locaux, plus savoureux. On mangera ainsi moins, mais des produits de meilleure qualité. À la fin, on peut même y gagner sur le plan financier.
4 – Mettre fin au gaspillage alimentaire
Dans le monde, environ 30% de la nourriture produite est perdue. En France, rien qu’au stade de la consommation, cela représente des pertes de 30 kg d’aliments par personne et par an dont 7kg d’aliments encore emballés. Au niveau mondial, on estime que ces pertes contribuent pour 8 à 10% des émissions anthropiques de gaz à effet de serre.
Les deux moments où ont lieu le plus de pertes sont la production et la consommation. Si nous, consommateurs, avons peu d’impact sur la première, nous pouvons agir sur la seconde. Réduire le gaspillage alimentaire passe d’abord par acheter selon ses besoins : acheter des quantités adaptées aux repas de la semaine, s’organiser pour mieux planifier courses et repas. Il s’agit aussi de vérifier régulièrement les dates de péremption de ses produits : comprendre la différence entre date limite de consommation et date de durabilité minimum, cuisiner en priorité les produits fragiles, partager ou congeler les produits proches d’être périmés au lieu de jeter… On peut aussi apprendre à cuisiner les restes : soupes de restes de légumes, salades ou gratins avec les restes de viande… De plus en plus de magasins d’alimentation proposent également des promotions sur les produits en voie d’être périmés ou sur les fruits et légumes non conformes : c’est un bon moyen de faire des économies, tout en réduisant les pertes alimentaires.
5 – Manger de saison
Un autre moyen de réduire l’impact environnemental de notre alimentation, de consommer une alimentation plus saine et plus juste, c’est de manger de saison.
Manger de saison, c’est faire la promotion d’un système agricole bien plus sobre que celui de l’agriculture intensive. La phase de production compte pour 83% de l’impact écologique d’un aliment. Manger de saison c’est donc s’assurer que le fruit ou le légume sera cultivé dans les conditions les plus propices, donc les plus écologique.
Manger de saison c’est aussi adapter son alimentation aux besoins de son corps. Les fruits et légumes d’hiver n’apportent pas forcément les mêmes nutriments que ceux d’été. Varier tout au long de l’année permet de s’assurer d’avoir de tout : des vitamines, des minéraux, des fibres. Les aliments de saison sont parfois étonnamment bien adaptés à nos besoins : en été, par exemple, lorsque notre corps nécessite de grandes quantités d’eau, on consomme des aliments qui en contiennent beaucoup comme la pastèque, le melon, les tomates, les courgettes, les concombres… Cerise sur le gâteau : les fruits et légumes de saison sont souvent considérés comme plus savoureux. Et ils sont aussi en moyenne moins chers que les produits consommés hors saison.
Et pour savoir en quelques clics quels fruits et légumes consommer à chaque saison, c’est simple, rendez-vous sur Mes Fruits et Légumes de Saison.
6 – Manger local et en circuit court
Si la recommandation de manger local arrive après celle de manger de saison, c’est parce que le transport d’un produit ne compte en moyenne que pour une part limitée de son empreinte carbone. Du point de vue écologique, le type de produit et la façon dont il est cultivé est donc plus importante que sa provenance. Pour des produits qui ne sont pas habitués au climat d’une région, il vaut souvent mieux les importer que tenter de les faire pousser localement : les circuits courts ne sont alors pas toujours plus écologiques.
Cependant pour un même mode de production, il sera en général préférable de choisir l’aliment local. Cela pour des raisons écologiques mais aussi sociales. En effet, les produits importés multiplient généralement les intermédiaires et augmentent donc l’écart entre le prix que l’on paye et celui versé au producteur. Les produits locaux, issus de circuits courts, garantissent généralement une plus juste rémunération du producteur.
7 – Eviter les emballages inutiles
En termes d’émissions de gaz à effet de serre, l’impact des emballages alimentaires n’est pas si élevé que l’on croit lorsqu’on le compare à la production d’un aliment. Il représente 5% des émissions de gaz à effet de serre d’un produit alimentaire. Mais il remplit nos poubelles : au domicile, 85% des emballages sont des emballages alimentaires ! De plus, si les emballages sont mal triés et collectés, ils peuvent finir dans la nature, où ils contribuent à la pollution des océans et d’autres problèmes environnementaux.
Si on ajoute à cela la grande consommation de ressources dont certaines non renouvelables (comme le pétrole) que génère la fabrication des emballages, on réalise la nécessité de réduire leur production. Cela passe par choisir les aliments avec le moins d’emballages possibles, se tourner vers le vrac, utiliser ses propres contenants dont la gourde, privilégier les emballages en verre qui sont plus sains et recyclables à l’infini.
Mais attention : moins d’emballage ne veut pas forcément dire pas d’emballage du tout ! Certains emballages sont utiles, notamment lorsqu’ils permettent de mieux gérer ses stocks de nourritures et donc de réduire le gaspillage alimentaire.
8 – Composter ses déchets alimentaires
Nos déchets organiques représentent 40 à 60% de notre poubelle d’ordures ménagères. Ces déchets organiques lorsqu’ils sont jetés dans la poubelle verte sont souvent incinérés. C’est autant de matière organique et de nutriments qui ne retournent jamais dans les champs. Or les terres agricoles françaises perdent en fertilité aujourd’hui.
Ce manque de qualité des sols agricoles doit ensuite être compensé par ajout d’engrais qui ont des conséquences néfastes sur la biodiversité et les écosystèmes (comme l’eutrophisation). Pour remédier à cela à son échelle, on peut composter ses déchets organiques. C’est très facile lorsque l’on a un jardin, et cela permet de cultiver mieux son espace vert, pour moins cher.
L’Agence de la Transition écologique offre de nombreux conseils pratiques pour réussir son compost. Composter en ville est de moins en moins difficile alors que de nombreuses résidences ou jardins partagés proposent des composts collectifs. Le terreau obtenu est ensuite utilisé au jardin ou donné à des agriculteurs.
En appartement, il est aussi possible de mettre en place un lombricomposteur dans lequel la décomposition des déchets est accélérée par l’action des lombrics.
Avec tous ces conseils, on peut d’ores et déjà, à son échelle, contribuer à faire émerger des habitudes alimentaires nouvelles. Cette sobriété alimentaire, qui réduit les consommations les moins utiles à nos besoins nutritionnels ou socio-économiques, a de nombreux avantages : meilleure pour la santé, pour l’environnement, elle peut aussi contribuer à améliorer l’état économique du système alimentaire. Bien-sûr, ces gestes individuels sont insuffisants pour transformer tout le système. Il faudra une véritable transformation politique et sociale pour rendre notre alimentation plus durable, juste et saine. Mais en agissant ainsi, on montre l’exemple tout en bénéficiant d’une alimentation plus saine, plus savoureuse, souvent plus économique, et qui préserve les savoir-faire gastronomiques locaux.
Photo de Markus Spiske sur Unsplash