S’il est écolo pour les trajets domicile-travail, il l’est beaucoup moins pour les trajets longue distance, rapportent des études. Explications.
Cet été, pour partir en vacances, vous pensez peut-être opter pour le covoiturage. Plus pratique, plus économique et avec une offre variée : cette pratique de partage de voiture en échange d’un dédommagement comporte de nombreux avantages… Covoiturer serait aussi bon pour le climat. C’est ce qu’avancent de nombreuses entreprises de covoiturage et beaucoup d’articles. Blablacar a même annoncé, dans une étude de 2019, permettre d’économiser chaque année 1,6 millions de tonnes de CO2. Une autre application, Citygo vante les mérites du covoiturage pour “limiter son empreinte carbone”. Cela semble logique à première vue. Cependant, des études montrent que l’impact du covoiturage dépend beaucoup des trajets concernés. Alors, le covoiturage : l’alternative écologique parfaite ? Pas si simple…
Qui sont les covoitureurs ?
Le premier constat à faire, c’est qu’en France, les voitures roulent souvent vides. Le taux de remplissage moyen est de 1,6 personne par voiture. Il grimpe à 2,2 personnes par voiture pour les trajets longue distance mais dégringole à 1,08 pour les trajets domicile-travail. Cela signifie que sur dix voitures qui se rendent au travail, moins d’une d’entre elles sera occupée par 2 personnes. Le covoiturage a pour objectif d’éviter ces trajets en solitaire en permettant de remplir les véhicules. C’est pour l’instant une pratique assez marginale puisqu’en 2015, elle ne représentait que 0,4% des transports routiers individuels, selon le CGDD.
Pour savoir si le covoiturage est écologique, il faut déterminer s’il permet d’éviter des trajets en voiture. Pour cela, il faut se demander si les covoitureurs auraient pris leur voiture et voyagé tout seuls si le covoiturage n’existait pas. D’après une étude de l’Ademe de 2015, 67% des conducteurs auraient tout de même pris leur voiture sans le covoiturage et 16% des passagers. 24% des conducteurs et 69% des passagers auraient pris le train. 8% des conducteurs et 12% des passagers n’auraient pas voyagé.
Quand le covoiturage se substitue au train
Le covoiturage aurait donc tendance à se substituer au train. C’est surtout vrai pour les trajets très fréquentés, montre une autre étude de l’Ademe. Elle montre que plus le nombre de personnes dans la voiture est élevé, plus les passagers auraient été enclins à prendre le train à la place. Cela s’explique par le fait que les trajets très remplis sont ceux très empruntés, souvent entre des métropoles, pour lesquels il existe une offre de TGV. On assiste dans ce cas à un fort effet rebond. Le covoiturage par son côté pratique et son faible coût encourage des personnes à prendre la voiture au lieu de voyager en train ou de ne pas voyager du tout. D’après Aurélien Bigo qui a réalisé une thèse sur “Les transports face au défi de la transition énergétique”, cet effet rebond serait tel qu’il annulerait les bénéfices du covoiturage en termes d’émissions.
Un gros potentiel pour les trajets domicile-travail
En revanche, pour les trajets domicile-travail et les trajets en zone rurale, il y a un vrai potentiel de réduction des émissions. En effet, sur ces trajets, l’offre de transport en commun étant pauvre voire inexistante, le risque de détourner des passagers du train est beaucoup plus faible. Ce sont des trajets que l’on effectue “de toute façon”. L’effet rebond est donc limité. Pour Aurélien Bigo, développer le covoiturage sur ces trajets serait un levier efficace de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Beaucoup de plateformes se sont déjà spécialisées dans ce type de covoiturage comme Klaxit, Karos ou BlaBlaCar Daily. Le développement de cette dernière pourrait, selon BlaBlaCar, permettre d’éviter l’émission de 1,88 millions de tonnes de CO2. On peut citer Ecov, Ecosyst’m ou la coopérative Mobicoop qui ne prend pas de commission sur les voyages. Les pouvoirs publics ont un grand rôle à jouer pour encourager le covoiturage sur les trajets courts en soutenant ces plateformes et en aménageant des infrastructures. On pourrait également envisager la création d’une plateforme publique qui réunirait toutes les offres de transport bas carbone, dont le covoiturage.
En bref, pour les trajets longs, préférez le train (ou la marche et le vélo) qui reste le mode de transport au plus faible impact carbone. Pour les trajets domicile-travail, en zone rurale et lorsqu’il n’y a pas d’offre de transport en commun, le covoiturage est une alternative écologique.
Photo de David Emrich sur Unsplash