Depuis plusieurs années, les offres d’électricité « vertes » ou « renouvelables » se multiplient. Comment fonctionnent-elles et comment garantissent-elles que l’électricité utilisée par le consommateur final est bien issue des énergies renouvelables ?

Des coopératives énergétiques les plus engagées aux grands énergéticiens, tous les fournisseurs d’électricité proposent aujourd’hui des offres d’électricité « vertes » à leurs clients, professionnels ou particuliers. Selon l’Ademe, celles-ci constituent même 70 % des offres d’électricité en France. Mais si 62% des particuliers sont prêts à souscrire à ce type d’offre, selon le baromètre énergie-info du médiateur de l’énergie, une minorité a franchi le pas. Résistance au changement, difficulté à se repérer face à l’offre pléthorique ou à leur potentiel surcoût ? La crise énergétique a clairement freiné les ardeurs (72% des foyers étaient intéressés en 2020/2021) et, de fait, la plupart des offres sont supérieures au tarif réglementé même si leur prix varie de -8% par rapport à ces derniers à +14%, selon la dernière publication de l’observatoire de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) sur les marchés de détail de l’électricité et du gaz. Mais c’est peut-être aussi leur difficulté à comprendre d’où vient précisément l’électricité consommée in fine qui freine. Car alors que les consommateurs intéressés souhaitent que leur choix participe à développer les énergies renouvelables et sa part dans le mix électrique national, le système de certification n’est pas si simple. Explications.

L’électricité est dite verte si elle est produite à partir de sources renouvelables telles que le soleil, le vent, l’eau, la biomasse… Les producteurs utilisent alors des panneaux photovoltaïques, des éoliennes ou des centrales hydrauliques par exemple. Mais qu’elle soit issue de sources renouvelables ou non, l’électricité est injectée sur le même réseau de distribution électrique. C’est donc la même électricité qui est livrée à tous les clients raccordés au réseau électrique français, quels que soient le fournisseur et le type d’offre.

Impossible donc de certifier l’origine des électrons qui arrivent jusqu’à une prise électrique. C’est pour contourner ce problème et assurer la traçabilité des énergies renouvelables que le mécanisme des garanties d’origine a été mis en place.

Les garanties d’origine : le système de certification

Défini par le code de l’énergie, la garantie d’origine (GO) est un certificat électronique destiné à prouver au client final qu’une partie de l’énergie injectée dans le réseau de distribution a été produite à partir de sources renouvelables ou par cogénération. Il précise également le mode de production (éolien, solaire…), la date ou encore le pays de production.

Autrement dit, à chaque MWh d’origine renouvelable produit, il y a aujourd’hui un certificat équivalent délivré, qu’on appelle une garantie d’origine. Ce mécanisme est reconnu dans tous les pays de l’Union européenne et régi par une directive européenne. Transposée en 2011 en droit français, l’Etat a désigné la société EEX pour tenir à jour le registre national des garanties d’origine. Elle seule est en mesure de les délivrer à des producteurs selon un processus strict. Le certificat ne peut être émis qu’une seule fois pour une quantité donnée d’énergie et est valable pendant un an à partir de la date de production des MWh “verts”. Passé ce délai, il devient obsolète. Ces GO sont ensuite achetées sur un marché dédié, notamment par les fournisseurs d’électricité qui souhaitent “garantir l’origine” de leur énergie, même si, en réalité, l’énergie consommée ne change pas. C’est l’une des principales critiques autour des garanties d’origine.

En choisissant une offre d’électricité « verte », un consommateur n’a donc pas la garantie que le fournisseur achète directement de l’électricité produite par des installations d’énergies renouvelables (EnR) et encore moins de la durabilité des installations (sur les questions de biodiversité par exemple) mais seulement qu’il achète des certificats émis par des producteurs d’EnR. Ces derniers attestent en effet simplement que pour chaque MWh consommé, un MWh de renouvelable est injecté sur le réseau.

Par ailleurs, les garanties d’origine étant reconnues dans tous les Etats de l’Union européenne, les fournisseurs peuvent acheter des certificats provenant d’autres pays européens. Enfin, leur prix actuellement très bas (autour de 7 €/MWh en 2023), ne permet pas vraiment de financer le développement de nouvelles installations d’énergies renouvelables, souligne l’ADEME.

Un label et de la sobriété pour aller plus loin

Mais pour l’Association nationale de défense des consommateurs et usagers CLCV, ce système est trompeur pour le consommateur et certaines de ces offres peuvent s’apparenter à du « greenwashing ». Alors le consommateur qui souscrit l’offre « pense faire un geste « spécifique » pour l’écologie, il n’en est rien. Il consomme de l’électricité comme tout le monde et n’apporte pas de financement additionnel » pour développer les énergies renouvelables, estime l’association. Qui demande la suppression des certificats d’origine et un contrôle plus stricte des offres.

Pour donner davantage de garantie au consommateur, l’Agence nationale de la transition écologique a mis en place en 2021 le label VertVolt. Attribué aux offres des fournisseurs d’électricité (9 labellisés après audit en 2023), il distingue deux niveaux d’engagement. Le premier palier, baptisé « engagé », garantit que le fournisseur achète une quantité d’électricité équivalente à celle qu’il vend au client, à des producteurs d’énergies renouvelables en France. Le deuxième « très engagé », demande en plus qu’au moins 25 % de cette électricité apporte une additionnalité financière (permettant le développement de nouvelles installations sans coût pour les finances publiques) ou sociétale avec des projets impliquant les acteurs locaux (citoyens, collectivité) dans leur capital et gouvernance. C’est notamment le cas de la majeur partie des offres Enercoop ou d’Octopus Energy, qui développent leurs propres moyens de production en plus d’être fournisseurs. En misant sur le Made in France, le label vise aussi à favoriser le développement des énergies renouvelables sur le territoire. Un coup de pouce bienvenu puisque la France est le seul pays à ne pas avoir atteint ses objectifs en la matière fixés par l’Union européenne. Reste à faire connaître ce label : seuls 11% des foyers interrogés dans le cadre du baromètre info-énergie en ont entendu parler.

Et pour avoir une consommation d’électricité réellement durable, l’Ademe rappelle que le premier principe est la sobriété. Dans un avis sur ces offres, elle précise notamment aux entreprises et collectivités que si « la souscription d’une offre d’électricité verte est certes un engagement, (…) il n’est en rien comparable à d’autres actions beaucoup plus structurantes vis-à-vis de la consommation d’énergie (économies d’énergie, démarche ISO 50001, investissement dans des moyens de production de chaleur renouvelable…)« .

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