Le littoral français est de plus en plus menacé par la montée des eaux et l’intensification des événements climatiques extrêmes. Afin de combattre cette menace, l’entretien et la réhabilitation des dunes sont perçus comme des réponses adaptées pour atténuer l’érosion du littoral français, et donc protéger les populations locales.

En février 2023, l’immeuble Le Signal était mis à terre. Situé à Soulac-sur-Mer (Gironde) cet édifice construit à la fin des années 1960 trônait fièrement face à l’océan. Une place de rêve au plus près de la façade atlantique. Un lieu de vie pour certains, un monstre de béton pour d’autres. Rattrapé par le changement climatique et la montée des eaux, il devenait dangereux de vivre dans ce bâtiment. Victime de l’érosion du littoral, l’immeuble qui se situait à sa construction à près de 200 mètres de l’océan, sur la fin, les vagues venaient s’échouer presque à ses pieds.

L’érosion du littoral est un phénomène constant et généralisé sur la plupart des fronts marins français. Mais c’est surtout un phénomène qui s’accélèrent depuis quelques décennies, grandement influencé par les activités humaines et les effets du changement climatique.

Afin d’éviter de nouvelles destructions de bâtiments, et de ne pas connaître un nouveau désastre comme la tempête Xynthia en 2010, l’une des clefs est d’entretenir les dunes, de les faire grandir pour qu’elles créent une muraille imprenable contre les flots marins.

Les dunes, des écosystèmes en danger

En France, plus de 30 km2 de terre ont disparu depuis 50 ans, 126 communes sont ainsi concernées par les risques de submersion.

Ces espaces mordus par les eaux sont une perte sèche, tant pour les écosystèmes que pour les sociétés humaines qui se sont agglutinées sur les littoraux à partir de 1960. En France, le boom immobilier de ces années et l’artificialisation abrupte des côtes ont entraîné une transformation importante du territoire Français. À la place des bancs de sable, des marais et des forêts ont été construits d’immenses stations balnéaires, des routes, des magasins, des immeubles, pour se rapprocher de l’océan.

Si la loi « littoral » de 1986 a quelque peu ralenti le rythme de nouvelles construction, les littoraux restent les territoires les plus artificialisés de France. Selon Milieumarinfrance, le service public d’information sur le milieu marin, « entre 2006 et 2012, l’artificialisation a progressé deux fois plus vite sur le littoral que dans l’intérieur des terres« . Sédimentation, essor démographique et touristique, perte d’espaces agricoles, l’empreinte de l’Homme s’est révélée de plus en plus pesante sur ces écosystèmes côtiers.

À cela s’ajoute un nouvel enjeu, celui de la gestion du changement climatique. Les événements climatiques extrêmes – tempêtes, vents violents, fortes houles, marées – accélèrent l’érosion de la ligne de sable. Un phénomène qui ne compte pas ralentir dans les prochaines décennies. La montée des eaux, les vagues de chaleur, les tempêtes obligent dès aujourd’hui les territorialités à proposer des plans d’adaptation afin d’éviter autant la disparition des écosystèmes que de maintenir les activités du littoral.

La façade maritime française ne représente que 4% du territoire, mais accueille 10% de la population. L’érosion des dunes rend donc vulnérables des millions de personnes qui sont et seront touchées directement ou indirectement par la submersion et l’ensablement.

Les dunes françaises, des écosystèmes pas si « naturels »

On pourrait croire ces milieux à la fois semi-désertique et forestiers que forment les dunes comme espaces naturels, forgés par les la Nature elle-même. Si c’est le cas dans certaines région dans le monde, en France, de nombreuses dunes ont été façonnées par à la main de l’Homme.

Des archives du Moyen-âge font l’état de villages et de bâtiments complètement engloutis sous les sables des côtes bretonnes jusqu’aux frontières de l’Espagne. Parmi ces bâtiments, la Basilique Notre-Dame-de-la-fin-des Terres, située dans la fameuse ville de Soulac, la même qui voit ses littoraux s’éroder aujourd’hui, sera ensevelie en quelques décennies lors du XVIIIe siècle. La Basilique ne sera dégagée qu’en 1858.

Cet attrait pour les côtes naît grâce à la création de dunes capables d’endiguer ces phénomènes d’ensablement. Nicolas-Thomas Brémontier (1738-1809), un ingénieur des Ponts et chaussées, inventera ces palissades en bois, typiques des paysages côtiers. Grâce à un vaste projet d’ensemencement de graines de pins, de genêts et d’ajoncs, les végétaux se développeront, protégés par les palissades.

Palissades utiles à la fixation des dunes, Photo de Erda Estremera sur Unsplash

Elles permettront de fixer durablement les dunes et d’éviter aux villages jusqu’à présent touchés par les sables. Des écosystèmes nouveaux et riches vont apparaître à l’image des forêts maritimes et des dunes grises, celles qui dispose d’un vaste couvert végétal.

Les dunes ont donc des rôles mixtes, capables à la fois de ralentir l’avancée des sables sur les villes et villages, de réduire l’érosion marine des côtes, de servir de zone tampon face au risque de submersion, d’accueillir de la biodiversité et enfin de permettre l’existence de zones d’activités pour les populations locales (tourisme, industrie forestière…).

Entretien et restauration des dunes, comment on fait ?

Les récents événements climatiques extrêmes sur les littoraux ont rappelé l’importance des dunes pour l’adaptation des collectivités face au changement climatique. Une expérience menée sur les plages californiennes, des plages fortement touchées par l’activité touristique, a démontré qu’en seulement 6 ans, même avec un entretien minime, les dunes ont été capable de se reconstruire d’elles-mêmes. L’expérience a permis une accumulation de sable de 1730m3, à titre d’exemple, une piscine olympique de 2 mètres de profondeur fait 2500 m3.

Un volume de sable non négligeable auquel s’ajoute, en plus du retour de la végétation, la réapparition d’invertébrés dans la zones, mais également celle d’oiseaux, notamment une espèce menacée, le pluvier neigeux.

Cette gestion « souple » dans le développement des dunes, qui utilise les processus naturels (vent, dynamique végétale) pour permettre au sable d’être piégé offre des avantages visibles rapidement.

Les brise-vents (ganivelles), les couvertures de branchages, la plantation d’espèces résistantes à l’ensablement, ou le remodelage mécanique sont autant de techniques préconisées pour les territorialités dans le but d’entretenir les zones concernées par l’érosion. En France, près de 1,6 million d’euros sont destinés chaque année aux travaux de reconstitution dunaire.

Mais ces efforts demeureront superflus sans un réel travail de lutte contre l’artificialisation des dunes, et de protection et la sensibilisation des populations à ces écosystèmes fragiles.

Dupouy, E. (2020, mai 6). Les dunes côtières et rivages sableux méditerranéens sont menacés en France. UICN France.

Guide de gestion des dunes et des plages associées. (2019, janvier 23). Office National Des Forêts.

Johnston, K. K., et al. (2023). Using dune restoration on an urban beach as a coastal resilience approach. Frontiers in Marine Science.

La protection des dunes : Une histoire qui a de l’avenir ! (2019, novembre 4). Office National Des Forêts.

MIG Dunes : L’ONF dresse le bilan de l’année 2018. (2019, décembre 31). Office National Des Forêts.

Notre-Dame de la Fin des Terres : La basilique sous le sable de Soulac, (2017), France 3 Nouvelle-Aquitaine (Vidéo).

Photo by Luis Rodrigues, Plexels.

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