Des dizaines de milliers de décès prématurés dans l’Union européenne sont attribuées chaque année aux pollutions à l’ozone. Mais l’ozone ne frappe pas tout le monde au même niveau. L’âge, le sexe, la condition physique et même le lieu de vie sont autant d’éléments déterminants.

Comme chaque année à l’arrivée des beaux jours, un épais voile recouvre les grandes métropoles françaises. Un brouillard de pollution, que l’on nomme couramment le « smog » – smoke (fumée) et fog (brouillard) – composé d’une multitude de particules fines et d’ozone (O3). Ce smog est nocif à la fois pour les végétaux et la santé humaine. Il rend l’air irrespirable lors des pics de pollution et aggrave les maladies pulmonaires déjà existantes, l’asthme, les bronchites chroniques, l’emphysème pulmonaire…

Même à faible dose, en dessous des seuils fixés par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) de 100 100 μg/m3 (~50 ppb) pendant un maximum de 8 heures, une exposition répétée et/ou prolongée à l’O3 peut entraîner l’apparition de problèmes d’asthmes, rendre les poumons plus sensibles aux infections, voire mener à des décès prématurés. L‘Agence Européenne de l’Environnement (AEE) évalue que plus de 20 000 décès prématurés chaque année en Europe sont imputés aux contaminations à l’ozone.

Ce fardeau se diffuse partout, dans l’air ambiant extérieur, mais aussi dans les logements les moins étanches où l’ozone est capable de s’infiltrer. Si l’ensemble des personnes est concerné par l’ozone, la sensibilité aux contaminations diffère d’un individu à l’autre. Les agences de santé alertent chaque année lors des pics de pollution sur les dangers que représente l’ozone sur les femmes enceintes, les nourrissons et enfants de moins de 5 ans, les personnes âgées, et les personnes souffrant de problèmes pulmonaires ou avec des comorbidités.

La condition biologique et physique d’un individu n’est pas le seul facteur déterminant. Les conditions socio-économiques et l’environnement proche influent eux aussi sur l’exposition des individus aux pollutions à l’ozone.

Une vulnérabilité différenciée aux pollutions à l’ozone

Présent naturellement dans la stratosphère, l’ozone est considéré à cette couche de l’atmosphère comme un bouclier pour la biodiversité contre le rayon ultraviolet du soleil. Mais il devient un poison lorsqu’il rejoint la troposphère, la couche la plus basse de l’atmosphère terrestre.

L’ozone est formé d’une réaction entre une molécule de dioxygène (O2) et d’une simple molécule d’oxygène (O). Ce phénomène se produit en la présence d’une troisième molécule capable d’absorber la chaleur de la réaction, plus généralement lors de la période estivale, lorsque les températures sont plus chaudes.

Si ce phénomène de production d’ozone a été initialement attribué aux températures élevées, « des études récentes indiquent que les changements dans la distribution spatiale et l’intensité des émissions anthropogéniques ainsi que l’augmentation des feux de forêt peuvent également en être responsables« , comme l’indique un article scientifique des chercheurs Ilias Kavouras et Marie-Cécile Chalbot.

Cette troisième molécule indispensable à la réaction est disponible dans la troposphère sous la forme de polluants atmosphériques – composés organiques volatils (COVs) ou oxydes d’azotes (NOx) – des particules issues des industries (butane, éthanol, benzène…) et de la combustion d’hydrocarbures. La forte concentration de polluants atmosphériques facilite, de facto, la transformation chimique vers l’O3.

Cela explique en grande partie la création de smogs en ville. Les émissions issues des voitures y sont très concentrées et la bétonnisation tend à augmenter de plusieurs degrés la température dans les villes. Les citadins sont donc fortement touchés lors des pics d’ozone troposphérique. Et en même temps, l’ozone est très persistant dans l’atmosphère et peut parcourir plusieurs kilomètres et polluer d’autres espaces loin des villes.

Cette vulnérabilité face aux pollutions à l’ozone est également marquée par des inégalités. À Paris, une étude avait montré que les espaces les plus affectés par la pollution de l’air étaient concentrés dans les quartiers populaires, là où les personnes sont les plus vulnérables, où les voitures circulent plus, où les logements sont moins bien isolés…Même constat pour les zones industrielles, grandes émettrices de particules atmosphériques. Les plus proches habitants se révèlent souvent être des populations moins favorisées, où la pauvreté et le chômage sont plus manifestes.

Une situation d’inégalités environnementales qui ne devrait pas s’améliorer dans le futur avec la crise climatique.

Approfondir : Les inégalités sociales, environnementales et économiques augmentent entre les territoires en France

Le réchauffement climatique, un facteur aggravant de la pollution

La réalité du changement climatique, et plutôt du réchauffement climatique en Europe, qui connaît un réchauffement plus de deux plus élevé que la moyenne mondiale, annonce donc des pics de pollution à l’O3 plus importants encore.

Une étude publiée dans le journal scientifique One Earth arrivait à la conclusion que dans la plupart des scénarios développés par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) pour dessiner le futur climatique, les SSPs (Shared Socio-economic Pathways), la concentration en ozone et l’exposition des populations devraient augmenter à court, moyen et long terme étant donné la dynamique socio-économique mondiale actuelle dans laquelle la baisse des émissions de GES et des pollutions n’est pas la priorité absolue.

Et les plus fortement touchés par ce double phénomène vagues de chaleur / pollutions à l’ozone seront les pays les plus pauvres. Dans le troisième scénario (SSP3-7.0), le scénario de rivalités régionales (le plus pessimiste), l’étude estime que sur la période de 2071 à 2090, le monde connaîtra chaque année 34,6 jours de pollution en plus, et ces pollutions toucheront 93,5 millions de personnes chaque jour.

Le défi de réduire les pollutions à l’ozone

La réduction de l’ozone troposphérique reste une priorité de santé publique, autant pour l’humain que pour l’environnement puisque cela implique également de réduire l’empreinte des activités anthropiques sur la Nature. Depuis les années 2000, les politiques européenne ont permis une baisse progressive des contaminants atmosphériques, ce qui a participé à légèrement inverser la tendance quant aux pics de pollution.

Malgré des efforts notables du gouvernement chinois pour améliorer la qualité de l’air, notamment grâce à de vastes projets de modernisation des usines polluantes, une étude démontre que la pollution à l’ozone a, elle, augmenté de 11% entre 2015 et 2019. Et mondialement, les estimations des chercheurs ne sont guères plus rassurantes. Elles tablent plus sur une croissance de ces pollutions dans le futur que sur une diminution.

Et même avec une gestion avancée de pollutions à l’ozone, la disparition de ces particules vient aussi avec son lot de désagréments. La disparition de ces particules atmosphériques (particules fines, oxyde d’azote…) pourrait au contraire accélérer le réchauffement climatique, au moins à court et moyen terme puisque l’ozone au-dessus des villes ne fera plus bouclier face aux rayons UV.

Le lien entre pollutions atmosphériques et le réchauffement climatique : Particules atmosphériques : l’amélioration de la qualité de l’air a accéléré le réchauffement climatique

Reste que sans politiques de réduction combinée des émissions de gaz à effet de serre et de polluants atmosphériques, les sociétés humaines et la Nature continueront de souffrir des activités anthropiques.

La Haute Autorité de Santé rappelle que lors des pics de pollution atmosphérique, les personnes les plus vulnérables doivent se protéger en évitant les activités physiques et sportives en extérieur et à l’intérieur, de rester à l’intérieur et de privilégier des sorties de courtes durées.

Ban, J., Lu, K., Wang, Q., & Li, T. (2022). Climate change will amplify the inequitable exposure to compound heatwave and ozone pollution. One Earth.

Fiche mémo : Conduite à tenir en cas de pic de pollution atmosphérique – Note de cadrage. (2021). Haute Autorité de Santé.

Pollution atmosphérique à l’ozone : Décryptage | Ineris. (2020).

Zhang, J. (Jim), Wei, Y., & Fang, Z. (2019). Ozone Pollution : A Major Health Hazard Worldwide. Frontiers in Immunology.

Photo de Andrea Piacquadio, Pexels.

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