Les Français sont-ils prêts à changer de mode de vie pour protéger l’environnement ? Pas sûr, d’après un sondage Kantar, qui montre que beaucoup ne veulent pas faire plus d’efforts.
Selon un sondage publié par Kantar en 2021, 87% des Français se disent « concernés » par le réchauffement climatique. Ces données rejoignent celles, publiées année après année, qui montrent que les préoccupations environnementales augmentent dans la société.
La crise environnementale, le réchauffement climatique, la pollution de l’air font désormais partie des préoccupations quotidiennes de nombreux citoyens. L’inquiétude grandit dans les populations au sujet de ces crises, dont les conséquences sont établies de plus en plus clairement par les scientifiques. Pourtant, dans le même temps, le sondage Kantar montre aussi que peu de citoyens sont prêts à changer de façon significative leurs modes de vie pour contribuer à la protection de la planète.
Les citoyens conscients de la crise écologique globale
D’abord, le sondage Kantar montre que la plupart des Français sont sensibilisés aux enjeux de la crise environnementale : 83% des Français pensent, à raison, que le réchauffement climatique a d’ores et déjà un impact à l’échelle globale, et 80% à l’échelle nationale. Cela montre que les citoyens ont globalement conscience de la menace environnementale, et qu’ils savent bien que des conséquences dramatiques se dessinent si la crise climatique et écologique globale se poursuit.
Ces dernières années, la multiplication des incendies, de sécheresses, des événements météorologiques extrêmes a sans aucun doute participé à cette prise de conscience. Sans parler des actions menées par les lancers d’alertes, les associations et certains média, qui contribuent à informer et mettre sur le devant de la scène les enjeux environnementaux.
Cela rejoint les sondages menés également par l’ADEME et de nombreux autres organismes, qui montrent bien que chacun désormais a conscience de la crise écologique.
Une perception lointaine de la crise écologique
Néanmoins, cette prise de conscience ne signifie pas pour autant que les citoyens ont tous réellement en tête la dimension des problèmes environnementaux ou leurs conséquences. Par exemple, une bonne partie des citoyens ont du mal à voir l’impact des crises environnementales sur leur propre existence. Ils ne sont que 62% à penser que le réchauffement climatique les affecte déjà personnellement ou à l’échelle de leur communauté locale.
Quand on leur demande quelle zone sera la plus affectée par le réchauffement climatique, c’est l’Afrique qui est d’abord citée, suivie de l’Asie du Sud-Est. L’Europe n’arrive qu’ensuite, et beaucoup répondent qu’en réalité, ils ne savent pas. Cela indique qu’une bonne partie des sondés ont tendance à voir encore la crise écologique comme un problème lointain, tant sur le plan géographique que sur le plan temporel. La crise écologique existe, certes, mais elle affecte surtout les autres, en quelque sorte.
Forcément, il est alors plus difficile de se projeter dans l’action : si le réchauffement climatique est un problème lointain, sa résolution passera après celle des autres problèmes quotidiens : pouvoir d’achat, inflation, santé, etc.
Peu veulent réellement agir face à la crise écologique
Au sujet du passage à l’action en lien avec la crise climatique et les enjeux écologiques, les citoyens sont d’ailleurs partagés. Ils semblent avoir conscience de la nécessité d’une action plus forte pour l’environnement, mais ne veulent pas forcément être ceux qui portent cette transformation.
D’abord, beaucoup estiment faire déjà de nombreux efforts : en moyenne, les français se donnent la note de 6.2/10 en matière d’engagement personnel sur les sujets écologiques. Ils se considèrent donc plus engagés par exemple que les collectivités locales (5.4/10) ou que les autres citoyens autour d’eux (5/10). Sans surprise, les citoyens voient bien que les entreprises sont les acteurs les moins engagés sur les enjeux de transition écologique. 76% des interrogés se considèrent déjà fiers de ce qu’ils font en matière de protection de l’environnement.
D’ailleurs, quand on leur demande s’ils seraient prêts à faire plus, à mettre en place de nouvelles actions en faveur de l’environnement, moins d’un français sur deux (49%) répond clairement « oui ». Et quand on leur demande quelles actions ils jugent « très importantes » pour la préservation de la planète, ils ont tendance à ignorer les gestes les plus significatifs. Par exemple, 54% des Français jugent « très important » de réduire les déchets et améliorer le recyclage, alors qu’ils ne sont que 14% à le penser pour l’interdiction des véhicules thermiques, ou 19% pour la réduction de la consommation de viande.
Or, précisément, du point de vue environnemental, il est bien plus important de réduire son usage de la voiture thermique ou sa consommation de viande, que de trier ses déchets, même si cela reste indispensable.
Plus de réglementations, changer de mode de vie, miser sur l’innovation,
Les chiffres laissent penser que les sondés n’envisagent pas vraiment de transformer leurs modes de vie pour la transition écologique. Ainsi, les sondés sont très partagés lorsqu’on leur demande si la protection de l’environnement doit passer par un effort collectif et individuel pour changer son mode de vie, ou par l’innovation et le progrès technique pour préserver nos modes de vie.
21% choisissent clairement la transformation de nos sociétés, 21% misent à fond sur l’innovation et le progrès technologique. Une bonne partie, entre deux, penche tout de même vers la confiance dans le progrès et l’invention de solutions techniques. Pourtant, le GIEC est clair sur ce sujet : on ne luttera pas contre le réchauffement climatique sans transformer radicalement nos modes de vie, et sans sortir notamment des logiques de surproduction et de surconsommation.
Cela dit, les citoyens semblent aussi convaincus que le changement passera surtout par la loi. Ainsi, 76% des français déclarent qu’ils seraient prêts à accepter des régulations plus strictes en matière environnementale, pour les encourager à faire plus d’efforts… Tout en disant, paradoxalement, qu’ils préfèrent l’encouragement et la persuasion que la coercition légale.
La prise de conscience est donc en partie là : les Français savent que les impacts de la crise écologique sont déjà là, et qu’il faut agir. Mais ils n’ont pas encore pleinement intégré la profondeur des changements de mode de vie à mettre en oeuvre. Et il faut dire que les discours politiques et économiques, qui se focalisent bien souvent sur les petits gestes et la promesses de solutions technologiques, n’aident pas mettre en avant le changement de modèle que nous devons pourtant accomplir.
Voir aussi : La place des entreprises dans la transition durable en question
Photo de Noralí Nayla sur Unsplash