L’UNESCO vient de rendre un rapport préconisant la patrimonialisation de la haute-mer. Une première qui pourrait mener à la protection des fonds marins internationaux et contribuer à mieux protéger les océans.

L’ONU et l’UNESCO souhaitent classer des fonds marins exceptionnels

Les océans couvrent 70% de la surface du globe, et sont tout sauf un vaste désert ! A l’image de ce que l’on peut trouver sur la terre ferme, de nombreux « sites remarquables » existent dans les océans et méritent donc une protection équivalente à celle existante sur terre. C’est du moins l’avis de l’UNESCO qui a rendu public son rapport intitulé « Le patrimoine mondial de haute mer : une idée qui fait son chemin ».

océan et préservation de la haute mer, UNESCO

L’objectif est très simple : profiter des négociations en cours à l’ONU sur la Convention des Nations Unies sur le Droit de la Mer (Convention de Montego Bay) pour permettre la reconnaissance de « sites de valeur universelle exceptionnelle ». Cette notion est au cœur de la Convention pour la protection du patrimoine mondial, convention ayant fondé l’UNESCO, chargée de la préservation de ce patrimoine mondial. L’UNESCO reconnaît donc des lieux exceptionnels mais toujours dépendant d’un Etat, ce qui n’est pas possible pour la haute mer, qui est justement une zone hors de toute juridiction étatique.

Vers une protection juridique de la haute mer ?

Si ce type de reconnaissance vient à exister, ce serait une première pour des zones de haute-mer qui bénéficient de très peu de protection juridique. En effet, la Convention des Nations Unies sur le Droit de la Mer (CNUDM) qui établit les règles en matière de droit sur les océans, ne dit pratiquement rien sur les zones à protéger puisque cette notion n’existait pas lors de sa création, en 1982. De même la CNUDM se borne à délimiter les limites des eaux relevant des juridictions nationales : elle a donc créé la haute mer, sans prévoir de réglementations s’y imposant.

Selon Dan Laffoley, conseiller principal en sciences et conservation marines pour l’UICN (Union Internationale pour la Conservation de la Nature), qui a participé à la rédaction du rapport, « La Haute Mer présente une valeur exceptionnelle mondiale, bien qu’elle bénéficie de peu de protection. Cet espace est exposé à des menaces telles que la pollution et la surpêche. C’est pourquoi il est crucial de mobiliser la communauté internationale afin de garantir sa conservation sur le long-terme».

Cinq sites exceptionnels pour illustrer la nécessité de protéger la haute mer

Comme exemples de ces sites qui pourraient faire l’objet d’une protection pour le bien de toute l’humanité figurent cinq endroits dont vous n’avez vraisemblablement jamais entendu parler, mais qui s’avèrent être de pures merveilles naturelles et donc fragiles, pouvant être détruites par les activités humaines comme la surpêche ou le réchauffement climatique.

le Dôme thermal du Costa Rica (Pacifique), une oasis océanique unique au monde qui sert de lieu de ponte et d’habitat à de nombreuses espèces menacées. Un phénomène d’upwelling (remontée d’eau froide) se produit à cet endroit tout les ans et provoque une explosion de vie marine.

océan dôme thermal du costa rica

le Café des requins blancs (Pacifique), le seul lieu connu de rassemblement des requins blancs dans le Pacifique nord, les représentants de cette espèce étant d’habitude solitaires. On ne sait toujours pas pourquoi ils se réunissent à cet endroit.

la mer des Sargasses (Atlantique), qui abrite un écosystème unique organisé autour d’une concentration d’algues flottantes, qui pourrait également s’avérer être l’unique zone de reproduction de l’anguille européenne.

le Champ hydrothermal de la Cité perdue (Atlantique), un lieu situé à 800 mètres de profondeur et surplombé de monolithes de carbonate pouvant atteindre 60 mètres de haut, dus aux remontées de gaz issus de la croûte terrestre.Au contact de l’eau, les particules entraînées par les gaz forment ces immenses piliers en précipitant. Il excite les appétits des société minières pour les métaux qu’il pourrait renfermer.

océan champs hydrothermaal de la cité perdue

l’Atlantis Bank, une île fossile immergée située dans les eaux subtropicales de l’océan Indien. On y trouve un lagon, des fossiles et même une plage elle aussi fossilisée, 700 mètres sous la surface ! Elle s’est enfoncée sous l’eau rapidement, il y a plusieurs millions d’années. C’est l’unique exemple d’île fossile au monde.

océan atlantis bank, plan de l'île

Si ce rapport n’est qu’un avis rendu par l’UNESCO, il pourrait mener à terme à une vraie réflexion de la part des instances de l’ONU sur la nécessité d’enfin protéger ces zones inestimables. Un statut de protection strict permettrait également de faciliter leur étude et d’en apprendre plus sur leur rôle écologique ou leur formation. L’idée que les océans sont vitaux pour l’humanité fait son chemin à travers les grandes organisations internationales, en espérant que celles ci se donnent (vite) les moyens de leur ambition.

Reste à savoir comment cette protection sera établie, et surtout comment les contrôles pourront être effectués dans ces vastes océans où aucune juridiction n’a réellement de prise.

Voir aussi : Protection des océans : tout ce qu’il faut savoir

[box]Sources :

UNESCO, Le patrimoine mondial de haute mer : une idée qui fait son chemin, Rapport du patrimoine mondial 44, Août 2016

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Crédits images : Fonds marins sur Shutterstock, Science et Avenir, UNESCO