Pourquoi entendons-nous parler de la fonte du « permafrost », ou de la fonte du « pergélisol » ? Qu’est-ce que c’est ? Pourquoi sa fonte inquiète la communauté scientifique et les décideurs publics ?

Le pergélisol, ou permafrost en anglais désigne un sol emprisonné depuis au moins 2 années dans les glaces. Le permafrost couvre 20% de la surface terrestre totale, et se situe logiquement dans les espaces les plus froids du monde.

Avec le réchauffement climatique, ces espaces gelés fondent et libèrent tout un monde jusqu’à présent enfoui dans les sols. Une situation qui inquiète grandement la communauté scientifique, à tel point que la fonte du pergélisol est considérée comme une « bombe à retardement ».

Le permafrost, qu’est-ce que c’est ?

Le permafrost se situe entre deux couches aux propriétés différentes. En haut, la « couche active » est une couche superficielle du sol qui dégèle en été et se regèle lors des périodes froides. La couche superficielle accueille donc un écosystème riche en été, insectes, animaux… En-dessous du pergélisol, se trouve un sol qui lui n’est pas gelé, réchauffé par la chaleur de la Terre.

On peut trouver le permafrost notamment sur la grande majorité des terres du Groenland, de l’Alaska, et également dans le Grand Nord Canadien et en Russie dans sa partie sibérienne. Certains pergélisols sont trouvables au cymes des chaînes de montagne et dans les sédiments marins organiques dans les eaux peu profondes.

La formation d’une grande partie du pergélisol s’est déroulé il y a 8 000 à 12 000 ans, mais les scientifiques estiment que certains permafrosts ont pu se former il y a plusieurs millions d’années.

Pourquoi le permafrost menace-t-il l’humanité ?

La communauté scientifique comprend encore mal l’influence précise qu’a la fonte du pergélisol sur les écosystèmes avoisinants. Mais on estime déjà que sa fonte aura des conséquences terribles, notamment celle d’aggraver les effets du réchauffement climatique.

Ces terres gelées et totalement imperméables emprisonnent depuis des milliers d’années de la matière organique, végétale comme animale. Avec le réchauffement climatique, le pergélisol fond, et les bactéries reprennent leur travail de décomposition de la matière. Cette activité bactérienne va émettre principalement du dioxyde de carbone (CO2), mais aussi une certaine part de méthane (CH4), les deux gaz à effet de serre (GES) les plus préoccupants dans la crise environnementale.

On estime que le pergélisol contient au moins le double de carbone que l’atmosphère. Ces sols emprisonneraient en outre au moins quatre fois la quantité de CO2 émise par les activités humaines, d’où son qualificatif de « bombe à retardement ». Plus il y aura un dégèle du pergélisol, plus les GES rejoindront l’atmosphère, plus la température augmentera et donc plus le pergélisol se réchauffera.

Outre les émissions massives de gaz à effet de serre, se sont aussi les changements profonds dans les écosystèmes qui sont inquiétants. Le dégèle va modifier drastiquement les territoires des différents hémisphères sur plan géologique, biochimique et climatique.

La fonte du permafrost  pose aussi des difficultés sociales en premier lieu pour les 3 à 4 millions d’habitants vivant dans l’hémisphère Nord sur les 20 millions de km2 de pergélisol. Et les conséquences de la fonte du permafrost seront aussi multiples qu’imprévisibles.

On peut déjà dire que des villes entières dans l’hémisphère Nord sont déjà touchées par la fonte du pergélisol. Événements climatiques, dommages sur les infrastructures, érosion des sols, récurrence croissante des feux de forêt, dégradation de la ressource en eau sont autant de risques de la fonte du permafrost, et c’est sans compter sur les différents virus emprisonnés depuis plusieurs milliers d’années dans les glaces qui seront libérés lors de la fonte.

Quand est-ce que le permafrost sera fondu ?

Mais alors, est-ce que la fonte du permafrost est un danger imminent ? Comme le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) le rappelle dans son dernier rapport en date, les effets du dégel du permafrost seront probablement lents. Ce ne sera pas une catastrophe globale et direct, mais la fonte du permafrost entraînera toute une suite de répercussions qui s’accumuleront. Mais les modèles restent encore trop imparfaits pour estimer l’évolution précise des écosystèmes suite à la fonte du permafrost.

Des politiques d’adaptation et d’atténuation en amont – la baisse massive des émissions de gaz à effet de serre reste l’un des leviers principaux – sont donc indispensables pour le bien des populations et des écosystèmes locaux, et ainsi éviter des coûts humains, écologiques et économiques importants.