Le sport fait-il maigrir ? Faut-il faire du sport pour perdre du poids ? Voyons ce que disent les études scientifiques récentes sur ce sujet.

La question du rôle du sport dans la perte de poids (et en particulier la perte de graisse) fait depuis longtemps débat. D’un côté, on sait depuis longtemps que faire du sport et de l’activité physique dépense des calories. Logiquement, le sport devrait donc participer à la perte de poids. Mais depuis quelques années, on entend régulièrement que le sport ne fait pas mincir et ne participe pas à la perte de poids. Alors, qu’en est-il vraiment ? Que disent les méta-analyses et les études scientifiques à ce sujet ? Tentons d’y voir plus clair.

Sport et perte de poids : la théorie… et la pratique

Le sport augmente la dépense calorique

En théorie, perdre du poids est simple : il suffit de consommer sous forme de nourriture moins de calories (en fait, des kilo calories) que l’on en dépense. Par exemple, si un individu consomme en une journée 1500 calories sous forme de nourriture et en dépense sur la même période 1800, il est supposé perdre du poids. C’est ce que l’on appelle être en « déficit calorique ». Grosso modo, il faut cumuler un déficit calorique de 7500 à 9000 calories pour perdre 1 kg de masse graisseuse.

Si l’on suit ce principe, on comprend pourquoi en théorie, le sport devrait nous permettre de perdre du poids : en augmentant notre dépense calorique, le sport devrait normalement accroître notre déficit calorique. Ainsi, 1 heure d’exercice cardiovasculaire modéré (type course, vélo, vélo elliptique…) consomme en théorie 400 à 800 calories selon les individus et l’intensité. Si l’on pratique un tel exercice régulièrement, on devrait donc en théorie être en déficit calorique et perdre du poids.

Le sport seul provoque peu de perte de poids significative

Pourtant, ces dernières années, les nombreuses études qui ont tenté d’évaluer comment le sport participait à la perte de poids ont pratiquement toutes démontré que l’effet était faible, ou négligeable. Par exemple, une méta-analyse publiée en 2014 dans Progress in Cardiovascular Diseases a mis en évidence que la pratique du sport sur des durées de plusieurs mois, quel que soit le type d’exercice pratiqué (exercice cardiovasculaire de longue durée, musculation, marche…) provoquait des pertes de poids faibles. En général, on observe une perte de poids d’un ou deux kilogrammes au maximum.

Une revue d’études menée en 2019 sur le même sujet montre que malgré la dépense calorique accrue provoquée par le sport, on observe en moyenne des pertes de poids faibles, et surtout, inférieures à ce que l’on pourrait attendre au regard de la dépense calorique. En d’autres termes, même si l’on dépense 8000 calories supplémentaires grâce à l’activité physique, on ne perdra pas 1 kg de graisse, mais nettement moins.

[box]Voir aussi : Les causes de l’obésité et du surpoids[/box]

Pourquoi l’activité physique seule ne fait-elle pas mincir ?

Les chercheurs estiment que ces résultats pourraient s’expliquer par des mécanismes de compensation. D’abord, il semble que l‘organisme soit capable d’adapter progressivement son métabolisme et notamment la quantité d’énergie consommée afin de rester grosso modo dans la même fourchette. Ainsi, même si on augmente sa dépense calorique par le sport, cela ne dure qu’un temps, car le corps s’adapterait progressivement. Il faut donc progressivement faire des volumes de sport de plus en plus importants pour continuer à perdre du poids. Ce qui est cohérent avec les résultats des méta-analyses qui ont étudié le sujet : le sport ne fait perdre beaucoup de poids que lorsque les volumes sont très importants.

Ensuite, il est probable que lorsque l’on augmente son activité physique, on ait aussi tendance, inconsciemment, à augmenter son apport calorique, en mangeant un peu plus que d’habitude. C’est ce qu’ont démontré plusieurs études récentes.

Au total, les adaptations métaboliques et l’augmentation de notre apport calorique, pourraient expliquer pourquoi le sport entraine des pertes de poids inférieures à ce qui pourrait être attendu compte tenu de la dépense calorique engendrée par le sport.

Le sport, inutile pour la perte de poids ? Non !

Le sport : utile pour ne pas prendre de poids

Pourtant, il ne s’agit pas de dire que le sport soit inutile pour mincir ou pour gérer son poids, bien au contraire.

D’abord, les études montrent que le sport a un rôle fondamental dans la prévention de la prise de poids. Au niveau collectif, l’augmentation du surpoids et de l’obésité est corrélée à la baisse du niveau d’activité physique. Les populations pratiquant plus d’activité physique sont moins affectées par le surpoids ou l’obésité.

On peut faire les mêmes observations au niveau individuel : les études montrent que les personnes pratiquant une activité physique régulière sont moins sujettes aux prises de poids et sont moins à risque de développer des pathologies métaboliques (obésité, diabète…).

Plusieurs facteurs pourraient expliquer ces résultats : le sport contribuerait à améliorer certaines fonctions métaboliques et hormonales (la sensibilité à l’insuline par exemple) ce qui réduirait la propension à prendre du poids. D’autres études font l’hypothèse que la pratique du sport aiderait à mieux gérer son appétit ou à réduire les effets du stress sur la prise de poids.

Le sport utile pour accompagner une perte de poids

Surtout, ce n’est pas parce que le sport « seul » ne fait pas significativement mincir que le sport ne peut pas jouer un rôle dans la perte de poids. En effet, comme on l’a vu, si on se contente de se mettre au sport, la perte de poids sera faible car on aura tendance à trop manger en réaction, et parce que le corps s’adapte. Les méta-analyses ont ainsi mis en évidence que le principal levier efficace pour perdre du poids, c’est la pratique d’un régime hypo-calorique. Toutefois si on pratique une activité physique en complément d’un régime alimentaire provoquant un déficit calorique, alors cela a toute sa place.

Plusieurs études ont ainsi montré que la perte de poids est plus importante, plus rapide et plus durable lorsque l’on combine une diète visant à réduire l’apport calorique avec la pratique sportive. Le sport a en effet des conséquences positives sur de nombreux paramètres qui sont impliqués dans la perte de poids : la sensibilité à l’insuline (on en a déjà parlé), le métabolisme des graisses, le métabolisme basal… De plus, la pratique d’une activité physique pendant une perte de poids augmenterait la part des graisses dans le poids perdu. Lors d’une perte de poids, une partie du poids perdu peut en effet provenir non pas des graisses mais de la masse musculaire. Or l’activité physique éviterait la dégradation de la masse musculaire.

En résumé, l’activité physique seule n’est pas suffisante pour engendrer une perte de poids significative. Le plus important, c’est l’alimentation. Mais l’activité physique et le sport accélèrent la perte de poids et la rendent à la fois plus facile et plus efficace.

Le sport pour éviter les reprises de poids

De plus, de nombreuses études ont montré que l’activité physique est un levier efficace pour éviter de reprendre le poids perdu à la suite d’un régime hypo-calorique.

Certaines études affirment même que la pratique d’une activité physique régulière est plus importante que l’alimentation dans le maintien d’un poids sain après une perte de poids. Autrement dit : si l’on pratique une activité physique régulière, les risques de reprendre du poids après un régime sont moins importants.

Les études épidémiologiques de grande ampleur analysant des populations ayant perdu beaucoup de poids montrent que ce sont ceux qui pratiquent une activité sportive qui parviennent à conserver les bénéfices de leur régime sur le long terme.

Le sport : des effets difficiles à évaluer mais positifs

Le sport dans les études scientifiques : une question complexe

Il faut également bien comprendre qu’il est extrêmement compliqué de mesurer les effets de l’activité physique et de la pratique sportive sur la perte de poids. D’abord, parce que la perte de poids est multifactorielle et il est très difficile d’isoler les facteurs. Comme on l’a vu, si l’on augmente son activité physique, on peut avoir tendance à manger un peu plus, ou à être un peu moins actif le reste de la journée, inconsciemment. Ce type d’interactions peut brouiller les résultats.

Ensuite, la façon dont on détermine, mesure et réalise l’activité physique influence massivement le résultat. Il est bien évident que si l’on s’exerce de façon intense et régulière, les effets ne seront pas les mêmes que si l’on pratique une activité très légère et de façon erratique. Or beaucoup d’études reposent sur des données auto-déterminées : ce sont les individus qui estiment eux-même la quantité d’activité physique qu’ils pratiquent. Or, on sait que les individus ont tendance à surestimer leur activité physique, ce qui peut amener à des résultats paradoxaux, avec des individus déclarant faire beaucoup de sport intensif (alors qu’ils en font en réalité pas autant) et pourtant ne perdent pas de poids. D’autre part, lorsque les scientifiques parviennent à proposer des outils de mesure plus précis, ils utilisent la plupart du temps des protocoles d’entraînement sportifs très standards, avec une intensité très modérée. La question est donc la suivante : observerait-on les mêmes résultats en utilisant des programmes d’entraînement sportif plus intenses ? Sur le plan épidémiologique, difficile à dire. Mais ces dernières années, des études ont démontré qu’au niveau individuel des protocoles d’entraînement très intenses pouvaient avoir des effets sur la perte de poids nettement supérieurs aux programmes d’activité classiques.

Enfin, il faut bien avoir conscience que les études généralement réalisées sur ce sujet sont de courtes durées (entre 6 et 36 semaines pour la plupart). Sur des durées si courtes, il est difficile d’évaluer les impacts à long terme. Or une grande partie des bénéfices liés à l’activité physique (notamment sur les processus métaboliques) ont lieu sur le long terme.

L’activité physique : des effets de long terme sur le fonctionnement métabolique

Comme on l’a vu, le sport a par exemple un effet positif de long terme sur la sensibilité à l’insuline. En gros, faire du sport sur le long terme permet de réduire l’incidence des pics d’insuline qui entraînent des stockages plus importants de masse graisseuse. Cela favorise et optimise aussi le fonctionnement des filières énergétiques, par exemple, en améliorant la capacité de l’organisme à dégrader les cellules graisseuses.

Selon le type d’exercice physique utilisé, le sport peut aussi augmenter à long terme la masse musculaire (c’est le cas notamment lorsque l’on pratique des entraînements de type musculation). Or la masse musculaire est un des principaux leviers du métabolisme basal, c’est-à-dire, de l’énergie, des calories, que l’on consomme au repos. Plus on a de masse musculaire, plus on dépense de calories au repos, ce qui peut faciliter la perte de poids.

Tous ces effets ne sont visibles que sur le long terme et sont donc difficiles à mesurer dans des études de quelques semaines, surtout qu’il s’agit ici de comportements difficiles à isoler et à identifier.

Sport et activité physique : des effets santé à ne pas négliger

Enfin, l’activité physique est utile associée à une tentative de perte de poids car elle a un effet bénéfique sur de nombreux autres indicateurs liés à la santé : santé cardiaque et respiratoire, mobilité, tonus musculaire…

Par exemple, la masse musculaire est bon prédicteur de divers indicateurs de santé et de longévité. L’activité physique réduit les risques de maladies coronariennes. Une étude récente a même mis en évidence que le sport pouvait « compenser » une partie des effets négatifs de l’obésité en termes de santé. Globalement, l’activité physique a donc de nombreux effets positifs sur la santé.

En résumé, dire que l’activité physique ne fait pas perdre de poids ou n’aide pas à perdre de poids est plutôt faux d’après l’état de nos connaissances scientifiques. Certes, si l’on se contente de faire du sport sans faire attention à son alimentation, les résultats seront négligeables. Il faut rappeler que c’est avant tout en adoptant une alimentation équilibrée et en créant un déficit calorique que l’on perd du poids. Mais l’activité physique est une aide précieuse pour perdre du poids et surtout elle semble très efficace pour accélérer et rendre durable la perte de poids. Il est donc très fortement recommandé d’incorporer une activité physique régulière lorsque l’on désire perdre du poids de façon efficace et durable.

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Photo par Jonathan Chng sur Unsplash