Véritable fléau pour les animaux marins, les « engins de pêche abandonnés, perdus ou rejetés » restent une véritable préoccupation dans la lutte contre la pollution. Afin de réduire les pollutions de l’industrie de la pêche, une toute récente étude s’est essayée à estimer le nombre de déchets qui rejoignent chaque année les océans.

Industrie majeure de nombreux pays, la pêche est aussi vectrice de pollutions importantes dans les océans. Filets de pêche, lignes, hameçons, bouées, cages rejoignent fréquemment les eaux et viennent se perdre sur les rivages, ou dans la gueule d’un poisson ou d’une tortue ayant eu le malheur de croiser leur route.

Des scientifiques du Commonwealth Scientific and Industrial Research Organisation (CSIRO) et de l’Université de Tasmanie (Australie) ont tenté de chiffrer l’étendue de la pollution de ces « engins de pêche abandonnés, perdus ou rejetés » (ALDFG). Grâce à plus de 450 entretiens réalisés avec des pêcheurs aux quatre coins du globe, ils ont déterminé dans une nouvelle étude publiée dans Science Advances que près de 2% de l’ensemble du matériel de pêche mondial rejoint chaque année les océans.

Des km2 de matériels de pêche

740 000 km2 de lignes de pêche, c’est l’estimation des scientifiques à l’issue des rencontres avec les pêcheurs. Mises bout à bout, c’est 18 fois le tour de la Terre ! Une situation affolante alors que les lignes de pêche ne représentent qu’un type de déchets parmi d’autres. Les scientifiques estiment la perte chaque année de près de :

  • 2963 km2 de filets maillants, de la forme d’un mur ou d’une nappe suspendue dans l’eau ;
  • 75 049 km2 de senne, un autre type de filet pour la pêche de poissons en surface ;
  • 218 km2 de chaluts ;
  • 25 millions de pièges divers ;
  • et 14 millions d’hameçons.

Équipements plus vieux, plus abimés, moins souvent renouvelés et outils moins performants rendent proportionnellement les petits équipages plus vulnérables face à la casse ou à la perte. Mais les grands navires restent, malgré tout, les plus polluants. Ils perdent moins mais produisent logiquement plus de déchets lorsqu’il y a perte.

Ces ALDFG ne représentent pas qu’un problème de pollution, mais aussi une atteinte directe à la vie marine, et participe de ce fait, aux déséquilibres de nombreux écosystèmes marins.

Entre pollution plastique et surpêche

Elles seraient près de 700 espèces à être directement concernées par les débris marins. Pire, 92 % de ces débris seraient du plastique, faisant de cette matière, l’un des premiers dangers pour certaines espèces comme les tortues de mer et les mammifères marins qui se retrouvent asphyxiés ou intoxiqués par les débris.

Pourtant la sauvegarde de ces espèces est d’une grande importance. La baisse de certaines populations marines à une répercussion non négligeable sur l’ensemble du système trophique (chaîne alimentaire), et in fine, sur nous en tant qu’humain. Et les dommages sont nombreux : extinction de certaines espèces, décroissance des capacités de stockage du carbone par les océans, perte financière pour les grandes nations de la pêche, perte culturelle, sociale et famines pour certaines populations dépendantes de cette activité… Et cela est sans compter les autres formes de pollutions chimiques, comme l’eutrophisation des eaux, notamment en Bretagne avec les fameuses algues vertes.

Aux dangers des pollutions s’ajoutent aussi ceux de la surpêche, que ce soit à cause des techniques destructrices telles que le chalutage de fond, ou bien de l’abus des ressources halieutiques. Selon le rapport de l’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) sortie en 2020 sur la situation de la pêche dans le monde, « La part des stocks de poissons exploités à un niveau biologiquement durable à l’échelle mondiale est passée de 90 pour cent en 1974 à 65,8 pour cent en 2017 ».

De nombreuses pêcheries tiennent aujourd’hui compte de ces conséquences désastreuses sur leur activité. Parallèlement, un nombre de plus en plus important de pays resserrent la vis autour des politiques de protection des écosystèmes et de la réduction des ALDFG.

Une baisse généralisée de la pollution ?

L’étude table finalement sur une baisse globale des ALDFG par rapport à une méta-analyse publiée en 2019 et menée sur la littérature scientifique entre les années 1975 et 2017. Les chercheurs expliquent cette différence par la vente de matériels de pêche plus performants et plus durables, et par des politiques plus strictes sur leur utilisation.

Mais une politique plus stricte implique aussi une plus grande crainte des pêcheurs quant à de potentielles sanctions. L’article émet l’hypothèse que les pêcheurs aient eux-mêmes minimisé les pertes par peur de jugements sur leur activité.

Le travail réalisé ici par les scientifiques est une première étape importante de quantification de l’ampleur des pollutions de la pêche, et offre par la même occasion aux autorités publiques et aux associations de protection de la vie marine des outils utiles à la sensibilisation et de création de politiques publiques en faveur d’une réduction des ALDFG.

Les données récoltées lors de l’étude ne concernent cependant que les pertes issues de la pêche commerciale. Dans le monde, ils seraient près de 220 millions d’individus à pêcher pour le plaisir, soit 5 fois plus que les pêcheurs professionnels. Mais pour le moment, les pollutions venant de la pêche récréative restent un sujet encore trop peu étudié.

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