L’article précédent « Les innovations comme facteurs de développement de l’économie verte » proposait une synthèse de l’étude de l’OCDE publiée le 13 septembre dernier : « Fostering Innovation for Green Growth« . Une des recommandations proposée par l’OCDE pour favoriser l’émergence des innovations vertes consiste à changer les comportements des consommateurs, responsables de 60% des consommations dans les pays de l’OCDE. A titre de comparaison, 16% du PNB est utilisé pour les consommations du secteur public dans les pays de l’UE-15 (santé, transport, construction). Nous allons détailler ici comment les consommations des citoyens consommateurs peuvent favoriser l’émergence et le développement du marché des produits « verts ».

 

L’incitation des consommateurs par le prix

De nombreuses initiatives ont été lancées par les gouvernements pour modifier la demande de biens plus « verts », notamment au niveau d’incitations gouvernementales sur les prix. A titre d’exemple, le fait d’inscrire un pays dans un principe de bonus-malus ou de subventions sur le long-terme provoque une demande croissante sur des biens plus propres (ex : bonus-malus en France sur les véhicules moins émetteurs de CO2 ; récompenses lors de l’achat d’un habitat économe au Japon). Sur le plan industriel, la stratégie R&D est simplifiée et induit un investissement plus important sur le développement de ce type d’innovations si l’amélioration de ces technologies suit un rythme proche des cycles du marché. En d’autres termes, s’il fallait 30 ans pour concevoir et commercialiser des véhicules plus propres, la croissance de la demande ne serait pas suffisante pour inciter les industriels à sur-investir pour des véhicules plus propres.

 

La mise à disposition de services plus « propres »

L’étude soulève que la mise à disposition de services plus propres induit un changement comportemental des citoyens. Par exemple, le fait de proposer un transport public efficace a un impact direct sur le taux de possession de véhicules et leurs distances parcourues. D’autre part, le fait de proposer un maillage de points de collecte de recyclage optimisé augmente le taux de participation au recyclage, et d’autant plus lorsque la collecte s’effectue en porte-à-porte et est facturée au volume.

 

L’interdiction de produits moins propres

Dans certains cas, la demande pour des produits plus propres ou plus économes est dopée par l’interdiction de produits considérés comme indésirables. C’est notamment le cas des ampoules à incandescence, remplacées désormais par des lampes à basse consommation.

 

Le partage d’une information environnementale simple et comparable

Une information transparente au sujet des produits de grande consommation vient réduire la méfiance des consommateurs autour des allégations environnementales de marques encore peu scrupuleuses. Pour garantir une qualité de l’information, les parties prenantes peuvent construire des lignes de conduite au sujet d’allégations environnementales, spécifier l’information à apposer sur des labels, ou encore prévoir des possibilités de poursuite en cas de fraude. A titre d’exemple, la Finlande et la Norvège ont défini un guide d’utilisation des termes « neutre en carbone » et « efficacité énergétique« .

La mise en place de standards reconnaissables et universels

Certes, certains standards ou certaines certifications semblent obscures quant à la manière de l’obtenir pour des consommateurs très avisés. Cependant, ils fixent une qualité environnementale ou un standard de qualité pour un consommateur qui souhaite mieux consommer, sans pour autant aller dans le détail du produit. C’est le cas notamment pour les labels Energy Star aux USA pour l’électronique, ou encore pour le label « Ange Bleu » pour la production de papier en Allemagne, qui rayonnent désormais en dehors de leurs pays initiaux.

 

Eduquer le consommateur… toute sa vie !

L’étude souligne que l’éducation du consommateur ne se fait pas seulement lors de l’enfance, mais représente un processus continu tout le long de la vie. Les technologies et les manières de consommer évoluent, les personnes requièrent alors un suivi. En Corée, la mise à disposition d’une maison témoin pour guider les consommateurs vers des appareils et pièces de la maison plus économes ou plus propres contribue à la prise de conscience des consommateurs.

 

Impliquer le consommateur et changer son comportement par les « nudges verts »

L’article « Pourquoi les « nudges » vont modifier les comportements des citoyens consommateurs ? » pose les bases de ces méthodes douces lancées par les gouvernements et marques pour induire un plus comportement vertueux des citoyens. Une étude sur 10 000 foyers dans l’OCDE en 2011 montre une fois encore l’importance de responsabiliser le consommateur. Les consommations d’eau des foyers facturées au volume induisent une consommation 20% inférieure à celles de foyers non facturés. De plus, les premiers foyers s’équipent plus d’appareils économes et efficaces (lave-linge, toilettes, etc.).
Une autre étude réalisée au Royaume-Uni montre que les consommateurs attachent plus d’importance à leur place dans la société vis-à-vis des autres que de manière absolue. De ce fait, proposer des moyens de comparaison sociale sur des sujets environnementaux augmente l’implication des consommateurs, qui se sent alors plus dans le « standard » s’il constate que ses pairs ou ses personnes de référence adoptent des comportements plus vertueux. Une étude plus poussée est en cours par l’OCDE pour tenter de mieux comprendre les facteurs de changements comportementaux dans les foyers.
D’autres exemples de nudges sont aussi proposés mais déjà détaillés dans ce blog. A savoir :

  • rendre les arguments sur les produits « verts » bénéfiques sur le long terme (200€ d’économie d’électricité au bout de 3 ans) pour masquer l’investissement initial supérieur à un produit moins propre
  • mixer information environnementale avec bénéfice client (économique ou santé)
  • dans certains cas, proposer comme choix par défaut le plus vertueux, car la plupart des consommateurs se contentent des premiers choix

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Crédit image : Flickr, Licence CC, Hervé KERNEIS