Une nouvelle étude révèle que plus de 50 % des grands lacs et réservoirs dans le monde sont en train de s’assècher à cause du réchauffement climatique et des activités humaines. Même les régions humides seraient concernées par ce phénomène.

Sans surprise, une nouvelle étude menée par des chercheurs du Cires (Cooperative Institute for Research in Environmental Sciences) de l’Université du Colorado à Boulder (États-Unis) ajoute son grain de sel à une longue liste d’études sur l’assèchement des grands lacs et des réserves artificielles dans le monde.

Ces paysages qui recouvrent près de 3% de la surface terrestre sont en danger. Depuis les trente dernières années, la quantité d’eau dans la moitié des grands lacs et réserves n’a fait que décroître, et les responsables ne sont d’autres que l’activité humaine et le changement climatique. Alimentation, eau potable, production d’électricité, zones de fraicheur, plus de deux milliards de personnes seraient ainsi concernées par la disparition progressive de ces espaces.

La moitié des grands lacs et réservoirs en déclin

En regardant le globe terrestre de plus près, on aperçoit plusieurs petites taches bleues qui parsèment la surface de la Terre. À eux seuls, les quelque 2000 lacs les plus gros représentent 95% de l’eau stockée dans les réserves d’eau douce mondiale. Mais depuis une trentaine d’années, la santé de ces lacs est en déclin selon la récente étude de chercheurs américains, français et saoudiens publiée dans la revue Science. Si la santé des rivières et des fleuves est bien documentée, la recherche sur les lacs reste jusqu’à présent peu fournie. L’étude en question tente de réduire ces incertitudes.

Trente années de données satellites, entre 1992 et 2020, ont ainsi prouvé que 53 % des 1972 lacs étudiés de plus de 100km2 – 1051 lacs naturels et 921 réservoirs artificiels – connaissent une perte de leur volume d’eau. Si l’évaporation des lacs en zone aride semble évidente, l’étude démontre qu’étonnamment, les lacs présents en zones humides perdent aussi une partie de leur volume d’eau.

Des paysages du Moyen-Orient, aux steppes de Chine en passant par les glaciers d’arctiques, toutes les régions du monde sont concernées. Entre 1984 et 2015, les réserves naturelles d’eau ont diminué de 90 000 km2. Une perte qui a été compensée en grande partie (184 000 km2) par la construction de réservoirs artificiels, avec toutes les conséquences, négatives comme positives, que la construction d’un espace artificialisé implique.

À l’inverse, seuls 24% des lacs ont connu une hausse significative du niveau d’eau, dans des zones cependant très peu peuplées du plateau tibétain ou des plaines d’Amérique du Nord. Les bénéfices demeurent donc faibles par rapport aux pertes nettes pour les populations proches de ces grandes réserves d’eau.

Activités humaines et changement climatique : deux responsables majeurs dans la disparition des lacs

L’une des particularités de l’étude, c’est qu’elle offre des preuves de l’influence conjointe des activités humaines (agriculture, industries, production électrique…) et du changement climatique sur la disparition des lacs. Un quart de l’assèchement des lacs naturels serait dû à ces deux variables.

Approfondir sur les liens entre changement climatique et cycle de l’eau : En 2022, le cycle global de l’eau profondément perturbé

Si des exemples historiques sont particulièrement connus, tels que l’assèchement du lac Tchad, au carrefour entre le Niger, le Nigeria, le Cameroun et le Tchad, d’autres exemples sont mis en exergues par les chercheurs, notamment la disparition graduelle des lacs Good-e-Zareh en Afghanistan et du lac Mar Chiquita en Argentine.

L’assèchement de ces points d’eau n’a pas que des conséquences localisées, c’est généralement le climat de toute une région qui va être influencé, voire au-delà. L’augmentation de la température de ces zones réduit par exemple leur capacité à absorber le CO2, alors même que ce sont des puits important de dioxyde de carbone. Ce qui aura pour conséquences que d’augmenter les effets du changement climatique, des sécheresses, de la fonte des glaces, ou bien les perturbations dans les précipitations, en fonction de la région concernée.

Repenser la gestion de l’eau

Si les résultats de l’étude relatant l’influence du réchauffement climatique et des activités humaines sur l’assèchement des lacs n’est pas une surprise, elle est la preuve qu’un contrôle sur l’usage de l’eau permettra de réduire, au moins un peu, la disparition de ces lacs, et ainsi d’arriver à une gestion plus durable de cette ressource vitale.

Car c’est la santé des lacs au complet qui est impactée au niveau mondial. L’érosion et la sédimentation des lacs, la perte d’oxygène dû à la hausse des températures, l’eutrophisation, la pollution (métaux, médicaments, PFAS) sont autant de facteurs aggravants dans le futur face au changement climatique pour la biodiversité, les écosystèmes et les sociétés humaines.

Comprendre le terme d’eutrophisation : Eutrophisation : définition, causes, conséquences et solutions

Impact du changement climatique : Les lacs perdent leur oxygène. (2021). INRAE Institutionnel.

Yao, F.,et al. (2023). Satellites reveal widespread decline in global lake water storage. Science.

Image par Sven Lachmann de Pixabay