Qu’est-ce que l’agriculture biologique ? À quel cahier des charges répond-elle ? Par quelles normes est-elle encadrée ? Avantages et inconvénients de l’agriculture bio ?

Définition de l’agriculture biologique

L’agriculture biologique se définit par un système de gestion et de production agricole alliant un haut niveau de biodiversité à des pratiques environnementales qui préservent les ressources naturelles, notamment en interdisant l’usage des pesticides de synthèse au profit de pesticides d’origine naturelle. Elle intègre également des normes rigoureuses en faveur du bien-être animal. Elle répond à une demande croissante de produits naturels par les consommateurs, tout en contribuant à la préservation de l’environnement dans le cadre d’un développement rural durable.
Le terme d’agriculture biologique ne peut s’appliquer qu’aux catégories de produits suivantes :

  • Produits non transformés : légumes, céréales, fruits, coton, fleurs, animaux, œufs, lait…
  • Produits transformés pour l’alimentation humaine : fromage, pain, plats cuisinés…
  • Alimentation destinée aux animaux : tourteaux de soja bio…
  • Matériels pour la reproduction végétative et semences.

Agriculture biologique : cahier des charges

Pour obtenir et conserver la certification en agriculture biologique (à solliciter auprès d’un organisme agréé), l’opérateur doit appliquer un cahier des charges strict, adapté à chaque type de production et respectant les principes suivants :

  • Aucune utilisation de produit chimique (engrais, pesticide…) dits « de synthèse », bien que des pesticides et engrais dits « d’origine naturelle » soient autorisés.
  • Aucune utilisation d’OGM.
  • Recyclage des déchets et rejets organiques.
  • Rotation des cultures pour la régénération des sols.
  • Lutte contre les nuisibles par des agents biologiques.
  • Élevage extensif avec alimentation bio et priorité aux médecines douces et à la prévention.
  • Bien-être animal (surface des espaces de vie, parcours extérieur, pâturage, interdiction de l’élevage hors-sol…).
  • Respect de l’environnement et préservation des ressources naturelles.
  • Entretien et développement de la biodiversité (culture et élevage d’espèces variées, maintien ou plantation de haies…).

À noter qu’une période transitoire (jusqu’à trois ans selon le type de production) est imposée pour la conversion d’une exploitation conventionnelle en agriculture biologique certifiée.

Voir aussi : Pesticides : définition, exemples, risques

Des pesticides autorisés en agriculture bio ? Quels sont les produits autorisés en agriculture biologique ?

Contrairement à une idée répandue, l’agriculture biologique n’interdit pas l’utilisation de pesticides et d’engrais : la plupart des exploitations en agriculture bio utilisent d’ailleurs des engrais et/ou des pesticides (pour en savoir plus voir : Les pesticides sont-ils autorisés en agriculture bio ?) Le sulfate de cuivre par exemple est un pesticide utilisé en bio, qui entre notamment dans la composition de la bouillie bordelaise. Au total, il y plusieurs centaines de pesticides et engrais autorisés en bio, qui sont listés aux annexes I et II du Règlement CE n°889/2008.
La différence entre agriculture biologique et agriculture conventionnelle tient à l’origine des produits (engrais et pesticides) utilisés. En agriculture biologique, les pesticides et engrais doivent être « d’origine naturelle » (c’est à dire qu’il doit s’agir de produits que l’on peut trouver dans des matérielles naturelles, comme le sulfate de cuivre minéral), alors qu’en agriculture conventionnelle, ils peuvent être synthétiques (c’est à dire fabriqués en laboratoires).

Réglementation de l’agriculture biologique : normes et labels

Au niveau de l’Union européenne, le Règlement (CE) N° 834/2007 du Conseil du 28 juin 2007, complété en 2008 de deux règlements de la Commission, fixe le cadre juridique, les principes et les normes de la production biologique, de son contrôle et de sa commercialisation dans l’UE. Ces textes ont vocation à terme à remplacer tous les cahiers des charges nationaux, à l’exception de quelques cas particuliers de production locale.
Depuis juillet 2010, le logo du label bio européen, dit euro feuille, doit obligatoirement figurer sur tous les produits issus de l’agriculture biologique conditionnés dans l’Union, ainsi que la mention de l’organisme certificateur. Les logos des labels nationaux (en France, le logo AB) sont facultatifs.

Agriculture biologique : quels avantages et quels inconvénients

Les avantages de l’agriculture biologique pour les consommateurs et les inconvénients

L’agriculture bio comporte des avantages a un certain nombre d’avantages pour les consommateurs. D’abord, l’agriculture biologique grâce à son cahier des charge particulier oblige les producteurs à respecter certains critères qualité spécifiques. D’une manière générale, l’agriculture biologique est plus extensive que l’agriculture conventionnelle : par exemple, les animaux d’élevages en agriculture bio bénéficient généralement de surfaces plus importantes, avec des accès obligatoires au plein air pour certains animaux. Les veaux élevés en agriculture bio par exemple bénéficient de 4m2 par tête pour un veau de 300 kg contre seulement 1.8 en agriculture conventionnelle. Cette approche extensive permettrait selon certains spécialistes d’obtenir des produits plus qualitatifs, plus savoureux par exemple. Cette notion étant essentiellement subjective il est toutefois difficile de l’évaluer.
En revanche, les rendements de l’agriculture bio sont en général inférieurs à ceux du conventionnel, ce qui entraîne des coûts d’exploitation (et donc des prix de vente) plus élevés. D’une manière générale, les prix de vente au consommateur de l’agriculture biologique sont donc souvent supérieurs aux prix de vente de l’agriculture traditionnelle. Cela pose donc un certain nombre de problèmes, notamment aux consommateurs pauvres qui ont de fait des difficultés à se nourrir en bio. Bien sûr, la différence de prix n’est pas forcément très importante sur certains produits, notamment ceux qui se cultivent facilement sans pesticides. Mais certains produits, notamment la viande ou les produits laitiers, sont sensiblement plus chers en agriculture biologique car ils nécessitent un travail plus important afin de respecter le cahier des charges bio.

Agriculture biologique et composition nutritionnelle

De nombreuses études ont tenté d’évaluer les différences nutritionnelles entre les produits issus de l’agriculture biologique et ceux issus de l’agriculture conventionnelle. Ces études ont révélé des résultats contrastés.
Plusieurs études ont relevé une présence accrue de certains nutriments dans les produits issus de l’agriculture biologique, notamment les acides gras essentiels omega-3 dans la viande ou les produits laitiers, ou encore les composés dits anti-oxydants. Certaines méta-analyses considèrent ces différences significatives quand d’autres estiment qu’elles auraient une importance nutritionnelle marginale. Certaines ont aussi identifié un contenu plus élevé en composés phénoliques ou anti-oxydants dans les produits céréaliers ou les fruits, mais identifient ces différences comme « modestes ».
D’une manière générale il y a donc des indices concordants qui laissent penser que la composition nutritionnelle des aliments issus de l’agriculture biologique pourrait être un peu plus complète que celle des aliments issus de l’agriculture conventionnelle, sans que cette différence soit importante.

L’agriculture biologique et résidus de pesticide

D’autre part, les études ont régulièrement démontré que les produits issus de l’agriculture biologique contient moins de résidus de pesticides ou de produits potentiellement nocifs que les produits issus de l’agriculture conventionnelle. Le cadmium en particulier fait partie des composés qu’on retrouve en moins grande quantité dans les produits bio. Bien que les résidus de pesticides trouvés dans l’agriculture conventionnelle soient très bas (et bien en dessous des limites sanitaires en vigueur) certains consommateurs s’inquiètent d’un potentiel effet-cocktail encore assez peu évalué par les autorités sanitaires et scientifiques. La consommation d’aliments issus de l’agriculture biologique permettrait donc d’appliquer le principe de précaution et de limiter les risques d’exposition à ces effets-cocktails.

Agriculture biologique et santé

Plusieurs études ont également tenté d’évaluer l’effet de la consommation de produits issus de l’agriculture biologique sur la santé. D’une manière générales, la plupart concluent à de faibles effets positifs, sans pouvoir dire avec certitude si ces résultats sont significatifs (voir par exemple ici, ici ou encore ). En effet, la consommation de produits biologique étant souvent corrélée à des comportements santé plus vertueux (meilleur régime alimentaire, pratique du sport, attention générale portée à la santé, niveau de vie plus élevé) il est généralement difficile de savoir si les différences observées sont dues à la stricte consommation d’aliments biologiques ou à l’ensemble de ces facteurs. La plupart de ces études concluent à la nécessité de mener des études plus approfondies pour confirmer un éventuel bénéfice santé de la consommation d’aliments bio.

Agriculture biologique et cancers

Une étude a également démontré que la consommation régulière de produits issus de l’agriculture biologique était associé à une fréquence moindre (25% inférieure) de certains cancers précis chez certaines populations spécifiques (notamment les femmes). Contrairement à ce qui a pu être affirmé dans beaucoup de média, cette étude ne démontre pas que la consommation d’aliments issus de l’agriculture biologique réduit les risques de cancers. Mais elle met en lumière que l’on observe chez les populations consommant régulièrement bio moins de cancers de type lymphome non hodgkinien et moins de cancers du sein chez les femmes ménopauséesDifficile toutefois de savoir si ce bénéfice « santé » est lié directement à la consommation de produits biologiques ou puisse être corrélé à d’autres facteurs sociaux économiques (comme le niveau de vie, le régime alimentaire ou d’autres pratiques santé), et ce bien que l’étude ait tenté de neutraliser ces biais. D’autre part, cette étude fait l’objet de contestations méthodologiques dans la communauté scientifique.
En dehors de cette étude, peu ont mis en évidence un lien entre consommation de produits bio et diminution des risques de cancers. En 2014, une étude de grande ampleur menée en Grande-Bretagne a ainsi démontré que la consommation régulière de produits issus de l’agriculture biologique n’était pas corrélée à une diminution du risque de cancers, sauf concernant les lymphomes non hodgkiniens.
Vraisemblablement, on a de bonnes raisons de penser que la consommation de produits bio ne réduit pas significativement le risque de développer des cancers, mais qu’elle pourrait limiter le développement des lymphomes.

Agriculture biologique et environnement

L’agriculture biologique aurait aussi un certain nombre de bénéfices pour l’environnement. Le premier d’entre eux est évidemment de limiter la quantité de pesticides utilisés. Bien que certains intrants (dits « d’origine naturelle ») soient autorisés en bio, l’agriculture biologique réglemente plus strictement leur utilisation. Ainsi, les effets potentiellement nocifs que pourraient avoir les pesticides sur la biodiversité et les écosystèmes seraient limités grâce à l’agriculture biologique.
Toutefois, l’agriculture biologique est parfois pointée du doigt pour un certain nombre de points.
D’abord, les rendements de l’agriculture bio sont en général inférieurs à ceux du conventionnel, ce qui entraîne des coûts d’exploitation (et donc des prix de vente) plus élevés. La charge de travail des exploitants est en outre accrue par l’impossibilité du recours aux produits chimiques. Les opérations de désherbage sont ainsi plus strictement réglementées et plus complexes en agriculture bio, et nécessitent généralement plus de travail. En résumé, pour produire la même quantité de nourriture en agriculture biologique qu’en agriculture conventionnelle, il faut généralement plus d’effort et de travail humain.
Cette perte de rendements pose aussi un certain nombre de questions d’ordre écologique. En effet, si les rendements de l’agriculture biologique sont plus faibles, cela signifie qu’il faut comparativement plus de terres agricoles pour produire la même quantité de nourriture qu’en conventionnel. En théorie, cela signifie donc aussi que la pression humaine sur les écosystèmes augmenterait. Une grande étude de synthèse menée sur l’agriculture biologique a ainsi montré qu’il faudrait environ 30% de terres cultivées en plus pour nourrir la planète en agriculture exclusivement biologique.
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