Quelle est la définition de la comptabilité intégrée ? À quoi sert-elle ? Quelles sont les différentes méthodes de la comptabilité intégrée ? Comment mettre en place une comptabilité intégrée ?

Comptabilité intégrée : définition

La comptabilité intégrée, également connue sous le nom de comptabilité en triple capital, est une approche de la comptabilité qui prend en compte les impacts économiques, environnementaux et sociaux des activités d’une entreprise en plus de ses indicateurs financiers. Elle vise à intégrer ces trois dimensions dans les pratiques comptables et financières de l’entreprise, de manière à ce que ses décisions soient plus durables et responsables.

Quels indicateurs pour la comptabilité intégrée ?

La comptabilité intégrée implique de tenir compte des coûts et des bénéfices financiers, environnementaux et sociaux des activités de l’entreprise. Les indicateurs à considérer dans une approche de comptabilité intégrée varient donc d’abord en fonction de la méthode de comptabilité utilisée, mais aussi en fonction des enjeux spécifiques de chaque entreprise. Cela peut inclure les coûts liés à la pollution, les coûts sociaux associés à la main-d’œuvre, les coûts des ressources naturelles utilisées, ainsi que les avantages économiques, sociaux et environnementaux créés par l’entreprise. Il s’agit globalement d’intégrer les indicateurs ESG (Environnement, Société et de Gouvernance) à la comptabilité globale de l’organisation.

Comptabilité intégrée : quels standards ?

Le champ de la comptabilité intégrée est encore largement en développement, et les règles et les standards ne sont pas encore institutionnalisés. Toutefois, il existe plusieurs initiatives et normes qui tentent de définir les cadres de la comptabilité intégrée. Par exemple, le Global Reporting Initiative (GRI) fournit des directives pour la production de rapports de durabilité qui peuvent servir de base à une comptabilité intégrée. L’International Integrated Reporting Council (IIRC) a aussi produit des normes pour encadrer les pratiques de reporting intégré, basées notamment sur les standards de l’IFRS.

Ces cadres fournissent un ensemble de principes et de directives pour les entreprises qui souhaitent adopter une comptabilité intégrée, y compris la définition de la stratégie et des objectifs de l’entreprise, l’identification des parties prenantes et des enjeux de durabilité pertinents, la mesure et la valorisation du capital naturel et humain, et la communication des résultats. Mais au-delà des standards de reporting, la comptabilité implique d’être capable de mettre en place une forme de bilan comptable intégrant les données extra-financières au même titre que les données financières. Pour cela, il existe plusieurs approches méthodologiques.

Les grandes méthodes de la comptabilité intégrée

Parmi les méthodes les plus avancées, développées notamment en France, on peut notamment citer 5 méthodes :

  • La méthode CARE (Comprehensive Accounting in Respect of Ecology) :
    • La méthode CARE a pour objectif d’appliquer les standards de la comptabilité financière aux capitaux extra-financiers (notamment humains et environnementaux) afin de mesurer et d’intégrer la perte de ces capitaux dans les comptes financiers des organisations. En d’autres termes, l’objectif est de comptabiliser les dommages provoqués par l’activité d’une organisation sur les capitaux naturels et humains, et de déduire ces dommages du résultat de l’entreprise, afin d’avoir une idée de la performance globale de l’activité, et plus seulement de sa performance financière. Dans le modèle CARE, les capitaux ne sont pas substituables les uns aux autres, c’est-à-dire qu’une perte de capital naturel ne peut pas se compenser par une hausse du capital financier. Cette approche vise donc à la préservation de chacun des capitaux. Dans les états financiers, on voit alors apparaître de nouveaux actifs et passifs, de nouvelles charges et classes de produits.
  • Le modèle LIFTs (LImits and Foundation Towards Sustainability Accounting Model) :
    • Le modèle LIFTs se base sur les concepts d’économie du donut et des limites planétaires. Il vise à déterminer, pour chaque entreprise, un espace au sein duquel les opérations de l’organisation sont soutenables. Cet espace se situe entre d’un côté des fondations sociales et économiques (mesurée par un certain nombre d’indicateurs sociaux et économiques auxquels l’entreprise contribue) et de l’autre des limites planétaires (par exemple, les émissions de CO2). Hors de cet espace, la comptabilité LIFTs considère que l’entreprise s’endette. L’enjeu de ce modèle comptable est donc la définition des bons indicateurs et des bonnes bornes, alignées avec les objectifs sociaux et environnementaux collectifs.
  • La méthode Thesaurus – Triple Empreinte :
    • L’objectif de cette méthode est de recenser et comptabiliser l’ensemble des flux économiques, sociaux et environnementaux dont l’entreprise est à l’origine. Ces flux sont ensuite traduits en indicateurs financiers, et ajoutés au bilan comptable. Cela permet de mesurer en gros deux types de valeurs : la valeur créée par l’entreprise (financière, sociale, environnementale) et la valeur détruite (toujours sur ces 3 dimensions). Cette méthode est donc d’une certaine façon plus proche des méthodes de comptabilité financière classiques puisqu’elle reste exprimée en valeur monétaire, ce qui rend sa mise en place plus simple dans les entreprises. Toutefois, cette méthode a le défaut de ne pas toujours parfaitement prendre en compte les dettes sociales et environnementales qui sont difficilement convertibles en valeur monétaire.
  • La comptabilité universelle
    • La méthode de comptabilité universelle ne se structure pas autour de la notion de capital, puisqu’elle considère qu’on ne peut pas affecter du capital naturel ou humain à une organisation. À la place, elle cherche à comptabiliser des charges et des produits qui ont pour contrepartie des dettes, des créations de réserve. Elle se structure donc en 4 comptabilités différentes : une comptabilité financière classique, à laquelle s’ajoute une comptabilité environnementale, une comptabilité sociale, et une comptabilité gouvernance (reprenant ainsi les grands principes de la mesure ESG). En matière environnementale, on retrouvera donc dans les charges des indicateurs comme les émissions de gaz à effet de serre, ou la production de déchets, tandis que les produits regrouperont les investissements allant dans le sens de la transition écologique. L’analyse de ces différentes comptabilité sert alors d’aide à la décision.
  • La méthode SeMA (Sense-Making and Accountability) :
    • Elle se fonde sur l’idée qu’il faut évaluer la qualité sociale et la qualité environnementale des offres, produits ou services, et les valoriser économiquement, grâce à une approche par les flux. Il s’agit alors d’identifier les impacts principaux de l’entreprise, et d’en faire la comptabilité en leur affectant une valeur sociétale. L’analyse de ces comptes permet alors de dessiner des trajectoires d’amélioration des impacts, et de mettre en valeur les progrès des modèles d’affaires de l’organisation.

Comptabilité intégrée : comment faire ?

Pour mettre en place une comptabilité intégrée dans une entreprise, il est important de commencer par une évaluation approfondie de la situation actuelle de l’entreprise en termes de durabilité et de capital naturel et humain. Il est ensuite important d’élaborer une stratégie claire pour intégrer les aspects environnementaux et sociaux dans les processus de gestion de l’entreprise, ainsi que de mettre en place des systèmes de mesure et de suivi pour évaluer l’impact de l’entreprise sur le capital naturel et humain. Former les salariés à une méthode de comptabilité intégrée, mais aussi à la récolte des données nécessaires à l’évaluation ESG de l’entreprise, est également un pré-requis important. La communication transparente et régulière des résultats de la comptabilité intégrée est également essentielle pour assurer la transparence et la responsabilité de l’entreprise envers ses parties prenantes.