La RSE et la finance sont-elles vraiment compatibles ? Comment les directions financières s’adaptent-elles ? Comment s’y retrouver dans les différentes méthodes ?  Décryptage avec Gregory Schrobiltgen, membre de la communauté People4Impact et expert de la finance durable, dans le podcast Trajectoire, produit par Birdeo, People4Impact et Youmatter.

Longtemps, la RSE est restée très cloisonnée dans l’entreprise. Perçue comme l’empêcheur de bosser en rond, le département RSE était celui qui venait demander des données ESG, tenter d’imposer de nouvelles normes mais qui ne parlait pas trop aux autres départements de l’entreprise. La finance en particulier, est longtemps restée hermétique aux enjeux RSE.

Mais peu à peu, les choses changent. Sous la pression de parties prenantes qui exigent de plus en plus que l’entreprise s’engage sincèrement dans la transition, les directions financières sont contraintes de s’intéresser à la RSE. Et ce rapprochement change la donne. Les méthodes, les pratiques et les objectifs des directions financières sont en train d’évoluer, de se transformer.

Alors, que traduisent ces évolutions ? La RSE et la finance sont-elles vraiment compatibles ? Et qu’est-ce que cela implique pour la transition des entreprises ? On fait le point avec Gregory Schrobiltgen, expert finance et RSE, dans ce neuvième épisode du podcast Trajectoire, produit par Birdeo, People4Impact et Youmatter.

Finance et RSE : vers le rapprochement ?

Alors, la RSE et la finance, vraiment compatibles ? À priori, on pourrait penser que non : le monde de la RSE réclame du temps long, s’intéresse à l’extra-financier et bouleverse les hiérarchies traditionnelles du monde de l’entreprise, qui place le profit au-dessus de tout le reste. À l’inverse, le monde de la finance brille plutôt par son court-termisme, et la primauté presque sacrée qu’elle accorde aux performances économiques.

Pourtant, de plus en plus ces deux mondes se croisent. La RSE, c’est un changement de business model. Et qui mieux que la direction financière pour incarner en actes une transformation profonde des modèles économiques ? De plus en plus, les entreprises prennent conscience que l’extra-financier et le financier sont liés, intrinsèquement, et qu’ils s’alimentent l’un l’autre, en bien comme en mal.

Le monde de la finance commence donc, très lentement, à bouger pour intégrer les enjeux sociaux et environnementaux, et cela se traduit dans le monde de l’entreprise par le rapprochement des fonctions : on voit désormais apparaître des fonctions « direction RSE et finance » « direction de la finance durable ».

Vers une normalisation des méthodes de la finance RSE

Progressivement, cette tendance aboutit à une certaine homogénéisation des normes en matière de finance ESG. La comptabilité intégrée commence à se structurer, et les différences méthodes et outils pour réunir au sein d’une même comptabilité les enjeux financier et extra-financier sont de plus en plus aboutis.

La taxonomie européenne, qui veut établir une définition plus précise des activités « durables », tente aussi de mettre de l’ordre dans le monde encore chaotique de la finance ESG.

En bref, un socle de travail commun commence à se mettre en place et un référentiel plus structuré autour de la finance RSE émerge.

Encore un long chemin à parcourir

Malgré tout, pour les directions financières comme pour les directions RSE, ces évolutions restent des défis immenses à relever. Si les initiatives se structurent pour donner un cadre à ces nouvelles pratiques financières, le monde de l’évaluation financière et extra-financière continue de ressembler à une jungle. TCFD, CDSB, et maintenant ISSB, ou encore CSRD sont autant d’acronymes représentant chacun des initiatives, souvent privées, qui voudraient mettre en place leur référentiel. Difficile donc de s’y retrouver.

Pour en savoir plus : Tout savoir sur la CSRD

Le chemin reste long avant d’arriver à des méthodes d’évaluation et de comptabilité multi-capitaux universellement reconnues, permettant un basculement de la finance vers une prise en compte réelle des enjeux environnementaux ou sociaux. Mais dès aujourd’hui, les entreprises, notamment les plus grandes, sont amenées à plancher en urgence sur ce sujet. Car désormais, la finance est sous le feu de toutes les critiques et de toutes les attentions, et elle ne pourra plus échapper à l’injonction de ses parties prenants sur la prise en compte de la réalité écologique et sociale.

Voir aussi : CSRD : quelles entreprises sont concernées ?