Quelles sont les causes de la disparition de la biodiversité dans le monde ? Pourquoi les espèces vivantes disparaissent-elles ? Faisons le point.

Les études scientifiques montrent depuis plusieurs années que la biodiversité mondiale disparaît. Les espèces animales, végétales, et l’ensemble des êtres vivants sont affectés, fragilisés. Leurs habitats, les écosystèmes, sont également menacés et parfois disparaissent : déforestation, destruction des zones humides, dégradation des zones naturelles.

Mais alors, qu’est-ce qui provoque cette crise de la biodiversité ? Pourquoi la biodiversité est-elle en train de disparaître ? L’IPBES, le GIEC de la biodiversité, organisme scientifique de référence sur la biodiversité et les écosystèmes, a identifié dans son rapport en 2019 cinq causes majeures pour expliquer la disparition des espèces vivantes.

Les cinq causes majeures de la disparition de la biodiversité

L’IPBES a tenté de synthétiser l’ensemble du corpus scientifique portant sur l’érosion de la biodiversité pour dégager ces cinq causes principales. Mais il faut bien comprendre que la disparition de la biodiversité varie de façon significative en fonction des écosystèmes et des espèces. L’effondrement des populations d’insectes n’a pas nécessairement les mêmes causes que la disparition des grands mammifères ou la dégradation des récifs coraliens. Les causes de la disparition de la biodiversité doivent donc toujours être replacées dans leurs contextes spécifiques.

Mais on peut tout de même garder à l’esprit ces cinq grandes causes pour comprendre comment agir face à l’érosion de la biodiversité.

Les changements des usages des terres détruisent les habitats

La manière dont nous transformons les écosystèmes naturels est sans aucun doute l’une des premières causes de disparition de la biodiversité. Lorsque l’on transforme un espace naturel en zone urbaine ou en espace agricole, lorsque l’on coupe des forêts pour les activités humaines, on détruit durablement l’habitat des espèces qui vivaient dans ces écosystèmes. La déforestation, l’artificialisation des sols, l’urbanisation sont donc autant de facteurs qui contribuent à détruire des espèces vivantes et leurs habitats.

À l’échelle mondiale, c’est notamment avant tout l’agriculture et dans une moindre mesure l’urbanisation qui sont les premières causes de la destruction des habitats et des espaces naturels, et des changements d’usage des terres.

Mais il n’y a pas nécessairement besoin de détruire les habitats pour provoquer des phénomènes d’érosion de la biodiversité. Les interactions entre les activités humaines et les écosystèmes provoquent dans tous les cas des perturbations écologiques. La présence humaine, par exemple à cause du tourisme, ou des activités dans la nature, engendrent des bruits, des dégradations, des déchets. Tout cela peut perturber les espèces vivantes, leur reproduction, leur tranquilité. La présence de routes ou d’infrastructures humaines peut aussi participer à la fragmentation des écosystèmes, et donc empêcher les animaux de circuler normalement dans la nature.

Les changements climatiques affectent la biodiversité

Le réchauffement climatique engendre lui aussi son lot de conséquences négatives sur la biodiversité et les écosystèmes. D’abord, parce que les changements climatiques transforment profondément les milieux. Avec des températures plus élevées et des cycles de l’eau perturbés, les sécheresses se multiplient, mais aussi, paradoxalement, les inondations. Dans ce contexte, les habitats sont évidemment profondément modifiés et les espèces vivantes qui s’y développent sont affectées.

La multiplication des évènements météo extrêmes participe aussi à dégrader les écosystèmes, qui deviennent de moins en moins résilients. Et puis, des phénomènes comme la montée des eaux, l’acidification des océans ou les transformations météorologiques ont une influence très forte sur les espaces naturels : les forêts côtières, par exemple, se transforment progressivement en forêts fantômes, où les arbres meurent sous l’effet de la montée des eaux, qui ramène du sel dans les sols. Les récifs de coraux mondiaux sont aussi affectés par la montée des températures et l’acidification des océans : les coraux blanchissent et meurent, et ne peuvent donc plus être le réservoir de biodiversité qu’ils étaient.

Le réchauffement climatique favorise également le développement de certains parasites, de certaines maladies, qui affectent les arbres, les forêts, les espèces végétales, et contribuent donc à détruire certains habitats. Bref, réchauffement climatique et biodiversité sont profondément liés.

Les pollutions globales et les pesticides affectent les espèces

Les activités humaines génèrent également de nombreux polluants, qui se répandent progressivement dans les écosystèmes et ont un impact très fort sur certaines espèces. Par exemple, les PFAS, une classe de polluants très persistants que l’on appelle aussi les polluants éternels, se trouvent désormais un peu partout sur la planète. Ils s’accumulent dans les milieux, et les espèces vivantes y sont exposées en continu, ce qui les rend plus vulnérables.

Les pesticides sont aussi une pollution majeure qui joue un rôle clé dans la disparition de la biodiversité mondiale. Les études scientifiques récentes montrent ainsi que les pesticides sont l’un des leviers majeurs de la disparition des insectes : glyphosate, néonicotinoïdes, insecticides et fongicides variés sont massivement utilisés dans l’agriculture pour en renforcer la productivité. Problème, ces substances, conçues le plus souvent pour détruire des espèces jugées nuisibles (insectes ravageurs ou champignons par exemple) sont toxiques pour l’ensemble de l’écosystème. La multiplicité des produits utilisés expose la biodiversité à des impacts multiples et à une toxicité difficile à mesurer. On parle alors d’effet-cocktail pour désigner les conséquences de l’exposition à ces substances multiples, ou parfois d’exposome, pour quantifier cette exposition plurielle.

On a souvent eu tendance à négliger ces pollutions et notamment le rôle des pesticides dans la disparition de la biodiversité, mais la recherche montre aujourd’hui de façon de plus en plus claire que les pesticides pourraient être parmi les premières causes de la disparition de la biodiversité.

Les déchets plastiques ont quant à eux des conséquences majeures, notamment sur la biodiversité marine. La plupart des déchets plastiques terminent en effet leur course dans les océans, où ils affectent les poissons, mammifères marins et autres tortues. Enfin les diverses pollutions liées aux activités minières, industrielles ou pétro-chimiques ont elles aussi des impacts sur la santé des populations d’animaux, sur les micro-organismes, les insectes, etc.

L’exploitation directe de la nature : chasse, pêche, nature et disparition de la biodiversité

La biodiversité diminue également car nous sur-exploitons sans cesse la nature. La biodiversité marine en particulier, subit une crise sans précédent liée à la surpêche et aux pratiques de pêches non-durables. Chaque année, des milliards de poissons et de mammifères marins sont tués par l’industrie de la pêche, qui utilise par ailleurs des méthodes extrêmement invasives pour maximiser ses rendements. Les techniques comme le chalutage en eaux profondes, la pêche à la senne, la pêche aux explosifs permettent ainsi de pêcher de grandes quantités de poissons, ce qui engendre une pression énorme sur les populations marines. Mais ce n’est pas tout : ces techniques de pêche détruisent au passage les fonds marins, et surtout, elles ne sont pas sélectives : elles tuent sans distinction, de nombreuses espèces dont un certain nombre peuvent être menacées.

Voir aussi : Protection des océans : quels enjeux, quelles solutions ?

Même chose sur terre : la chasse constitue l’un des facteurs du déclin de la biodiversité dans les espaces terrestres. En France, par exemple, des débats ont lieu chaque année sur les autorisations données aux chasseurs de chasser telle ou telle espèce, plus ou moins menacée. Les techniques de chasse peuvent également être très controversées. Certains arguent que la chasse participe au contraire à la protection de la biodiversité en régulant les espèces, mais les études sur ce sujet ne sont pas vraiment claires. Dans les faits, on constate souvent que les acteurs de la chasse emploient des pratiques néfastes pour la biodiversité pour maintenir leurs activités de chasse : agrainage pour favoriser la reproduction des espèces chassées, « lâchers » d’animaux dans la nature afin de pouvoir les chasser, chasse en enclos, etc. Et il ne s’agit là que de la chasse légale ! Le braconnage contribue quant à lui à détruire des espèces, souvent fragiles et menacées, en toute illégalité.

Mais l’exploitation directe de la nature, ce n’est pas seulement la pêche, la chasse et le braconnage : la cueillette, ou l’exploitation d’espèces végétales dans les secteurs pharmaceutiques par exemple, font partie des facteurs qui aggravent la crise de la biodiversité.

L’introduction d’espèces invasives dans les écosystèmes

Enfin, le cinquième facteur de dégradation de la biodiversité identifié par l’IPBES est l’introduction d’espèces invasives dans les écosystèmes. À cause du commerce international notamment, des espèces arrivent dans des milieux d’où elles ne sont pas natives, et peuvent alors devenir invasive, si elles n’ont pas de prédateurs.

Elles se développent alors très rapidement et massivement, ce qui participe à fragiliser les écosystèmes locaux, et engendre souvent le déclin de certaines espèces endémiques. De nombreux exemples d’espèces invasives font régulièrement la une des médias. Par exemple, le département d’Antioquia, au Nord-Ouest de la Colombie, est connu pour ses hippopotames, importés par le trafiquant de drogue Pablo Escobar. Les animaux ont été relâchés dans la nature et s’y sont reproduits, ils seraient aujourd’hui près d’une centaine, ce qui en fait le groupe d’hippopotames sauvages le plus important hors d’Afrique. Leur présence constitue une menace pour la faune locale, et potentiellement, un problème pour les écosystèmes et la biodiversité localement.

Lapins en Australie, grenouille taureau dans le Sud-Ouest de la France, moule zébrée, ou encore ailantes sont des exemples d’espèces invasives, qui peuvent contribuer localement à détruire des écosystèmes entiers et à concurrencer les espèces endémiques.

Disparition de la biodiversité : des causes multiples et interconnectées

Si ces cinq causes sont les plus importantes identifiées par l’IPBES, il en existe bien d’autres : pollution sonore, pollution lumineuse, eutrophisation des eaux, transports, érosion des sols… Il faut de toute façon comprendre que les causes de la crise de la biodiversité sont multiples et interconnectées, elles s’alimentent souvent les unes les autres. Par exemple, l’impact des néonicotinoïdes sur les abeilles est aussi amplifié par le réchauffement climatique. Les changements dans les usages des terres contribuent aussi à la déforestation et renforcent donc le réchauffement climatique, et ces deux causes de dégradation de la biodiversité s’alimentent l’une l’autre dans un cercle vicieux.

L’étude de ces causes est donc forcément complexe, car il est difficile de faire le tri entre les différents facteurs qui affectent la biodiversité. Par exemple, la disparition des pollinisateurs est imputable à la fois aux pesticides, notamment les néonicotinoïdes, mais d’autres facteurs participent à leur disparition : des parasites comme le varroa, la pollution globale ou le réchauffement climatique par exemple. Comment savoir quel facteur est le plus déterminant ? Il faut mener des études scientifiques. Problème : une bonne partie des études scientifiques sur la disparition des abeilles sont financées par les industries de production des pesticides néonicotinoïdes, notamment celles qui incriminent les autres facteurs de la disparition des hyménoptères. Leur influence sur les résultats scientifiques font donc controverse, et certains scientifiques estiment que l’on aurait ainsi sous estimé le rôle des pesticides dans la disparition de certains insectes.

Cela montre que la compréhension des causes de la disparition de la biodiversité est complexe, et que la recherche doit encore progresser pour nous aider à mieux comprendre les enjeux. Mais une chose est sûre, l’activité humaine, agricole et industrielle notamment, ainsi que les pollutions et les pesticides et la chasse et la pêche apparaissent de plus en plus clairement comme des causes majeures de la disparition des espèces vivantes.

Photo de Zdeněk Macháček sur Unsplash

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