Les entreprises agissent-elles vraiment pour lutter contre le réchauffement climatique ? Que deviennent les grandes promesses qu’elles font régulièrement dans le débat public à ce sujet ? Une étude de l’Université de Newcastle répond à cette question.

Chaque année, de nombreuses entreprises s’engagent à lutter contre le changement climatique, à protéger l’environnement, à réduire leur impact sur la planète. Cette année encore, de nombreuses entreprises se sont exprimées sur ce sujet, notamment à l’occasion du One Planet Summit. Mais qu’advient-il de ces engagements et de ces promesses une fois le bruit médiatique apaisée ?

C’est ce qu’a voulu savoir une équipe de chercheurs de l’Université de Newcastle, dans une étude longue de plus de 10 ans menée sur de nombreuses entreprises de tailles variées en Australie.

Engagement des entreprises sur le climat : révolution ou greenwashing ?

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Pour cela, les chercheurs ont cherché à faire analyser comment les entreprises formulent et mettent en oeuvre leurs engagements climatiques. Ils ont identifié 3 phases clefs dans ce processus. La première phase, c’est le « framing » : à un moment donné, l’entreprise annonce un programme de lutte contre le réchauffement climatique audacieux. Les mots employés ? « Innovation » « opportunité » « leadership » « stratégie gagnant-gagnant ». Les annonces faites ? Plus d’énergie renouvelable, des stratégies pour réduire l’impact carbone des activités, une taxe carbone interne… Jusque-là tout va bien.

La deuxième phase, c’est la phase de « localizing » (localisation) : identifier le ou les endroits dans le processus économique où l’on peut faire des économies d’énergie, utiliser des matériaux écolo ou encore faire de l’efficacité énergétique, créer un département dédié à la lutte contre le réchauffement ou à la RSE. Durant cette phase, ou localise et on commence à mettre en oeuvre. Là encore, ça peut aller: certaines initiatives commencent à être mises en place… jusqu’à la troisième phase.

La troisième phase, c’est la phase de « normalization ». L’étude montre que toutes les entreprises arrivent à un moment ou un autre à une phase de normalisation, où elles tendent à retourner progressivement au business as usual. En effet, au delà de l’effet d’annonce initial, il y aurait une phase où la réalité économique reprendrait ses droits. L’entreprise donnerait alors progressivement de moins en moins d’importance à ses engagements climatiques par rapport à ses préoccupations de marché : rentabilité, rémunération des actionnaires, compétitivité…

Quand la logique économique tue l’engagement écologique

Pour les chercheurs, ce résultat est plutôt logique. En effet, la logique économique d’une entreprise va rarement dans le même sens que la logique écologique. Certes, faire des économies d’énergie par exemple permet de réduire ses coûts. Mais étant donné les prix actuels de l’énergie (qui sont très bas), l’incitatif d’une entreprise à réduire ses consommations énergétique est faible par rapport à l’investissement que cela demande initialement. De la même façon, réduire ses émissions de CO2 doit en théorie avoir un certain nombre d’avantages en termes d’image et de résilience à long terme. Mais dans les faits, à court terme, il reste beaucoup plus rentable de ne pas s’en préoccuper (ou pire d’investir dans des énergies fossiles dont le prix est aujourd’hui encore très bas) que d’investir dans les énergies renouvelables, intermittentes, contraignantes et relativement chères.

Les interviews menées dans le cadre de l’étude mettent clairement en évidence ce décalage entre volonté de rentabilité économique et engagement écologique. Un manager de l’une des entreprises étudiée déclarait ainsi : « Tout ça (la lutte contre le changement climatique NDLR) c’était très bien quand les temps étaient faciles. Aujourd’hui les temps sont durs, donc on doit se recentrer sur les choses importantes ».

La croyance dans le marché pour résoudre la crise climatique : une illusion

europe changement climatique

Pour les auteurs de l’étude, ces résultats indiquent qu’il faut « repenser la façon dont nous confions le futur de nos sociétés aux marchés et aux entreprises« . En effet, leur expérience montre qu’en l’absence de contraintes ou d’incitatifs réglementaires extrêmement forts, les acteurs économiques comme les entreprises  peinent à mettre en oeuvre des changements significatifs sur leurs façons de produire. La croyance que la crise écologique peut être résolue par l’action individuelle (des entreprises ou des consommateurs) ou par le marché semble donc bien contredite par la réalité des faits.

Le problème c’est que depuis des années, l’ensemble des politiques globales et individuelles mises en place sur les sujets climatiques se basent sur cette idée sous jacente que ce sont les acteurs économiques qui vont lancer le changement. Cette étude a au moins le mérite de montrer que cette idée aux accents néo-libéraux s’essouffle rapidement devant la réalité économique. La conclusion des auteurs est donc que sans régulations et sans sacrifices économiques, il est peu probable que les acteurs économiques mettent un jour un vrai changement de comportements sur la question de la lutte contre le réchauffement climatique. Mais ce changement réglementaire étant lui aussi très complexe à atteindre, Christopher Wright, co-auteur de l’étude conclut : « Je suis pessimiste par rapport à l’avenir ».

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