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Lundi 18 novembre dernier, Pénélope Bagieu publiait sur son blog une infographie évoquant le sujet de la pêche en eaux profondes, méthode de pêche tristement populaire pour son impact sur l’environnement. Depuis quatre jours maintenant, un mouvement, né sur le web, se développe autour d’une pétition pour interdire cette méthode de pêche.

Le contexte

Pénélope Bagieu, dessinatrice de bande dessinée, s’est fait connaître grâce à son blog Ma vie est tout à fait fascinante qui reprend avec humour et illustrations la vie quotidienne des français.

Lundi dernier, elle réalise et publie une infographie en forme de coup de gueule contre la pêche en eaux profondes et invite ses lecteurs à signer une pétition réalisée par Bloom, association œuvrant pour la conservation marine.

Cette infographie, en pleine actualité, rappelle ainsi l’importance de la vie marine et les conséquences dramatiques sur l’environnement de cette technique de pêche qui racle le fond des océans. Pour rappel, en 2012, la Commission Européenne avait proposé l’interdiction de la pêche en eaux profondes. Le 10 décembre prochain, le Parlement Européen devra se prononcer sur un nouveau règlement relatif à cette pêche.

A retenir de l’infographie

  • Sous l’eau, une nouvelle espèce est découverte toutes les deux semaines ;
  • Aujourd’hui, les scientifiques n’ont échantillonné que 1% des océans ;
  • Sur terre, le chalutage en eaux profondes correspondrait à la destruction de Paris en 1 jour et demi ;
  • Le chalutage est 3 000 fois plus destructeur que n’importe quelle autre activité humaine marine ;
  • Il existe dans le monde 11 navires de pêche en eaux profondes dont 9 sont français ;
  • Entre 2000 et 2010 la pêche en eaux profondes a reçu des subventions à hauteur de 10 millions d’euros. Selon Claire Nouvian, fondatrice de Bloom« Acheter son poisson dans des enseignes pratiquants cette méthode de pêche équivaut à le payer deux fois : d’abord en amont par le biais de nos impôts puis en aval sur notre panier de ménagère. »

Le début d’un bad buzz

Dans cette infographie, une entreprise est très clairement pointée du doigt : Intermarché. (Rappelons que d’autres enseignes de distribution sont visées par l’association Bloom).

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L’impact de la diffusion de cette infographie est impressionnant, pour très vite devenir hautement virale.

En quelques chiffres :

  • Grâce à Pénélope Bagieu, plusieurs millions de lecteurs ont été sensibilisés au travers de son blog et près de 115 000 personnes sur Twitter ;
  • La pétition lancée par Bloom adressée à François Hollande n’avait jusqu’alors recueilli que 26 000 signatures. Avec l’infographie et à moins de 20 jours du vote de la Commission Européenne, la pétition a atteint plus de 420 000 signatures (au 22 novembre 2013). L’association Bloom recense jusqu’à 10 signatures par seconde, le succès est tel que le serveur qui hébergeait la pétition a sauté cette semaine.

Sur les réseaux sociaux, on observe un véritable engouement pour ce combat. Depuis la sortie de l’infographie, il y a 4 jours :

  • La pétition a été tweetée près de 5 600 fois, pour une audience potentielle de 4 millions de personnes. Pour donner une idée, cela revient à l’équivalent de l’audience de TF1 en prime time pour une émission comme Masterchef ;
  • L’article contenant l’infographie a été tweetée plus de 6 600 fois pour être « liké » plus de 292 000 fois sur Facebook soit une audience potentielle de plus de 3,5 millions de personnes ;
  • D’autres articles de blogs regroupent plus d’un millier de tweets ;
  • La marque Intermarché a été citée plus de 1 200 fois sur Twitter pour atteindre une audience potentielle proche du million.

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Et pendant ce temps, que fait Intermarché ?

Actuellement la marque est très peu présente sur les réseaux sociaux, elle n’a par exemple pas de compte Twitter… ou tout cas pas d’officiel. Ca vous rappelle quelque chose avec Findus et son faux compte créé pour l’occasion ? Les consommateurs ont donc décidé de s’en prendre à la page Facebook de la marque. Des centaines de messages sont en train de s’accumuler auxquels la marque ne répond pas.

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Après 3 jours d’absence, l’enseigne a décidé de se manifester le 21 novembre pour répondre aux nombreuses critiques et appels au boycott. Une discrète conférence de presse au port de Lorient jeudi matin s’est organisée pour répondre aux questions des journalistes, accompagné d’un communiqué de presse sur le site de la Scapêche, leur flotte de pêche. Le directeur général de la Scapêche y dénonce des contre-vérités dans cette affaire et défend ces pratiques qu’il estime responsables.

Malgré ce premier pas, les critiques restent très vives sur les réseaux et ne semblent pas avoir permis à la marque de se racheter auprès de ses clients. Reste à savoir si ce buzz aura un impact sur la fréquentation et les futures ventes de l’enseigne.

Et en réalité… quel est l’impact d’Intermarché sur l’environnement ?

A ce sujet, deux avis s’opposent, d’un côté, l’association Bloom qui milite depuis des années contre la pêche en eaux profondes, de l’autres Blue Fish, l’association créée en avril dernier par les pêcheurs de Lorient et de Boulogne-sur-Mer qui défend cette technique. Leurs avis divergent sur des sujets comme l’impact de cette technique de pêche, le stock de poisson, les fonds marins, sur l’emploi ou encore sur les autres espèces, mais les deux concèdent une responsabilité du chalutage profond dans la destruction de l’écosystème marin.

De plus, en 2012, le groupe des Mousquetaires avait déjà connu des problèmes concernant la vente des poissons. En effet, le groupe s’était vu interdire la reconduite d’une campagne publicitaire prétendant à une pêche «responsable» dans le cas de la pêche en eaux profondes. Un jury de déontologie publicitaire critiquait la formulation « pêche responsable » et l’usage d’un logo dont le graphisme jouait sur la ressemblance avec le label indépendant MSC, qui certifie une pêche durable. Cette décision était la première à considérer le chalutage en eau profonde comme une technique non durable.

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Entre désir de conservation des emplois et protection de l’environnement, ce Buzz jouera-t-il un rôle dans la prise de décision politique du 10 décembre ? Rendez-vous dans une vingtaine de jours !