Statistiques et chiffres sur l’immigration en France et dans le monde : on fait le point pour avoir les idées claires sur ce sujet de société.

Le sujet des migrations et de l’immigration est en permanence à la une des médias. On entend sur ce sujet tout et son contraire. Mais alors, quels sont les chiffres à connaître pour se repérer dans ce débat, au-delà des préjugés et des discours préfabriqués ?

Voici donc quelques données sur les migrations, à l’échelle du monde et de la France, pour alimenter les réflexions et les échanges citoyens.

Aperçu statistique des migrations dans le monde

Commençons par les migrations à l’échelle mondiale, pour essayer de comprendre leur ampleur et leurs origines. D’abord, il faut comprendre qu’il existe plusieurs types de migrations : les migrations forcées (il s’agit alors de personnes déplacées, notamment à cause de conflits ou de catastrophes) et les migrations volontaires (notamment économiques).

D’après Rapport Mondial sur l’Immigration de l’ONU, il y aurait en 2019 environ 270 millions de migrants dans le monde, soit moins de 3.5% de la population mondiale. Parmi ces migrants, environ un tiers seraient des personnes déplacées, forcées de migrer pour leur sécurité (violences, conflits, catastrophes), soit 80 millions de personnes. Un peu moins de 190 millions de personnes seraient des migrants dits « économiques », parmi lesquels on trouve une grande variété de profils et de parcours.

Source : Rapport Mondial sur les Migrations de l’ONU

Plus de 80 millions de personnes déplacées

En 2020, selon le Haut Commissariat aux réfugiés, en raison de persécutions, de violences, de conflits, de violations des droits humains, on comptait 82,4 millions de personnes déracinées à travers le monde. Rapporté à la population mondiale, cela représente 1 personne sur 95. La plupart de ces personnes déplacées sont originaires de pays en guerre (Syrie, Yemen, Centrafrique, République Démocratique du Congo, Sud Soudan) ou de pays qui subissent des vagues de violences communautaires ou religieuses (Birmanie).

48 millions soit plus de la moitié sont des déplacés internes c’est-à-dire qu’ils sont restés à l’intérieur de leur pays, et presque 26,4 millions soit plus du quart ont le statut de réfugié. Précisons qu’un réfugié est une personne à qui est accordée une protection, en raison des risques de persécution qu’elle encourt dans son pays d’origine à cause de son appartenance à un groupe ethnique ou social, de sa nationalité ou de ses opinions politiques.

Source : Tendances mondiales 2020 du Haut Commissariat aux Réfugiés

En 2020, il y a eu 11,2 millions de personnes supplémentaires déplacées.

En raison des multiples crises dans le monde, qu’elles soient nouvelles ou de longue durée, 11,2 millions de personnes ont été contraintes de se déplacer, soit 200 000 personnes de plus qu’en 2019. Cela inclut les personnes qui se déplacent pour la première fois, ou régulièrement, à l’intérieur et à l’extérieur des frontières de leur pays d’origine.
9,8 millions étaient des déplacés internes et 1,4 million ont recherché une protection en-dehors de leur pays d’origine.

Source : Tendances mondiales 2020 du HCR

Près de 9 personnes réfugiées sur 10 sont accueillies dans des pays pauvres ou en voie de développement.

En 2020, les pays en développement ont accueilli 86% des réfugiés. Les personnes qui fuient leur pays cherchent le plus souvent asile dans un pays voisin : 73% des réfugiés dans le monde vivent aujourd’hui dans un pays voisin de leur pays d’origine. Au cours de cette même année, les réfugiés internationaux provenaient majoritairement de Syrie (6,7 millions), et la Turquie a été le premier pays d’accueil avec 3,7 millions de réfugiés.

L’idée reçue selon laquelle ce seraient les populations des pays les plus pauvres, la « misère du monde » pour reprendre les termes de Michel Rocard en 1989, qui migrerait vers les pays riches est donc largement à nuancer. D’autant plus que pour migrer, il faut un minimum de moyens, notamment pour financer le voyage, les papiers, parfois les passeurs… Au final, il y a relativement peu de migration directe des pays les plus pauvres vers les pays les plus riches.

Source : Tendances mondiales 2020 du HCR

Les migrations économiques dans le monde

190 millions de personnes sont considérées comme des migrants économiques dans le monde. Mais parmi ces populations, on trouve des profils très différents. Les pays d’origine de ces migrants sont majoritairement des pays dits « en développement » : Inde, Chine, Mexique, Bengladesh, Pakistan, mais on trouve aussi dans le top 20 de pays d’origine des migrants économiques des pays considérés comme plus avancés (Ukraine, Russie, Royaume-Uni, Allemagne…). La notion de migrant économique recouvre aussi différents types de travailleurs : des travailleurs « pauvres » ou « peu qualifiés » mais aussi des travailleurs « qualifiés » voire « très qualifiés ».

De loin, la première destination des migrants économiques dans le monde reste les Etats-Unis, suivis de l’Allemagne, de l’Arabie Saoudite, de la Russie et du Royaume-Uni. 68% des travailleurs migrants ont pour pays de destination un pays « développé », à haut revenu, 29% ont pour destination des pays à revenu intermédiaire. Parmi ces migrations économiques, une partie sont légales et une partie sont illégales, sans qu’il soit possible de le quantifier avec précision.

Source : Tendances mondiales 2020 du HCR

Et en France, quels sont les chiffres ?

En 2020, les immigrés représentaient 10,2% de la population.

Pour bien comprendre ce chiffre, reprenons les définitions d’immigré et d’étranger. En France, le Haut conseil à l’intégration a défini un immigré comme étant une personne née à l’étranger et résidant en France. La personne peut acquérir ou non la nationalité française au cours de sa vie, mais sera toujours comptabilisée parmi les immigrés.

Un étranger est une personne qui réside en France mais ne détient pas la nationalité française. Ainsi, beaucoup d’étrangers sont immigrés mais pas tous car certains étrangers sont nés en France mais n’ont jamais migré vers la France puisqu’ils y sont nés. C’est le cas des enfants nés en France de parents étrangers avant leurs 18 ans (âge à partir duquel ils peuvent acquérir la nationalité française).

Donc on comprend que de nombreuses personnes en France sont dites immigrées même si elles résident depuis très longtemps en France et/ou qu’elles ont la nationalité française

Si on reprend les chiffres, on a donc 10,2% de la population totale en France composée d’immigrés soit 6,8 millions de personnes. 36% d’entre eux soit 2,5 millions ont acquis la nationalité française. La population étrangère vivant en France s’élève à 5,1 millions de personnes, soit 7,6 % de la population totale. Elle se compose de 4,3 millions d’immigrés n’ayant pas acquis la nationalité française et de 0,8 million de personnes nées en France de nationalité étrangère.

Source : Estimations de la population 2020, INSEE

La moitié des immigrés vivant en France sont originaires de seulement sept pays.

Concernant l’origine des immigrés en France : 49% des immigrés résidant en France proviennent de sept pays : l’Algérie (12,7 %), le Maroc (12 %), le Portugal (8,6 %), la Tunisie (4,5 %), l’Italie (4,1 %), la Turquie (3,6 %) et l’Espagne (3,5 %).

Source : Estimations de la population 2020, INSEE

Typologie des titres de séjour accordés en France pour l’immigration légale

En France, en 2019, environ 277 000 personnes immigrées se sont vues accorder un titre de séjour pour le territoire français. C’est ce que l’on appelle l’immigration légale. Au sein de cette immigration légale, une partie est liée à un motif économique.

Les migrations économique en France

Toutefois, depuis 1974, suite à la crise pétrolière, la France a fortement réglementé la migration de travail. Aujourd’hui encore, les autorisations de travail sont délivrées selon certains critères comme le taux de chômage dans le secteur d’activité et géographique concerné. Les autorisations concernent donc les emplois ou les zones géographiques où il y a un manque de travailleurs. Et puis, certains métiers sont par principe fermés aux étrangers (hors Union européenne) : ces derniers ne peuvent, par exemple, accéder à la fonction publique qu’en tant qu’agents contractuels ou vacataires, jamais en tant que titulaires (exception faite des postes d’enseignants-chercheurs). Il en va de même avec certaines professions « réglementées » qui nécessitent des diplômes ou certificats certificats et dans certains cas, une reprise complète des études est nécessaire. Contrairement à une idée répandue, les migrants économiques ne « volent » donc pas le travail des Français, mais travaillent plutôt dans des secteurs où l’on manque de travailleurs.

En 2019, environ 39 000 personnes avaient obtenu un titre de séjour au motif de travail, soit moins de 15% des titres de séjours délivrés.

Source : Chiffres de délivrance des titres de séjour, Ministère de l’Intérieur

L’immigration pour motif non économique en France (asile, réfugiés, rapprochement familial, études)

Cela signifie que l’immigration légale en France est essentiellement liée aux droits de l’Homme : droit d’un immigré à avoir sa famille auprès de lui (Convention européenne des droits de l’homme), droit d’asile (Convention de Genève), etc.

L’essentiel de l’immigration légale se répartit entre les étudiants (90 000 par an), le regroupement familial et le mariage d’un Français avec un non-national (90 000 par an), et enfin les personnes accueillies pour des raisons humanitaires (environ 30 000 personnes en 2020).

Source : Les migrations à rebours des idées reçues, journal du CNRS, 2018

80 000 personnes ont effectué une demande d’asile en 2020 en France. L’origine de ces demandeurs d’asile est très variable puisqu’elle dépend du contexte géopolitique mondial. Toutefois, en 2020, trois pays asiatiques étaient en tête des pays d’origine des demandeurs d’asile en France : Afghanistan, Bangladesh, Pakistan.

Chaque année, une partie des personnes disposant d’un titre de séjour en France repartent dans leur pays. C’est le cas notamment des étudiants ou de certains travailleurs. De ce fait, si en 2019 277 000 personnes sont entrées sur le territoire, cela ne veut pas dire que le solde migratoire (la somme des personnes entrées et des personnes sorties du territoire) soit de 277 000. En fait, en moyenne, chaque année, pour 4 étrangers entrant légalement sur le territoire, un étranger repart de France. Le solde migratoire se situe donc autour de +200 000 personnes en 2019.

Source : Chiffres clés de l’immigration, INSEE

L’immigration illégale en France : chiffres et statistiques

Chaque année, la France reçoit également des migrants dits « illégaux ». On utilise ce terme pour désigner les personnes entrées sans autorisation sur le territoire Français. Par définition, il est très complexe de quantifier l’immigration clandestine. Pour estimer le nombre de personnes présentes en situation irrégulière sur le territoire français, on peut se baser sur les chiffres d’accès à l’Aide Médicale d’Etat (AME), les estimations des démographes, ou tirer des estimations des interpellations et contrôles d’identité recensés par les autorités.

Une étude de 2019 du Pew Research Center a mené une telle analyse et estime que la France abriterait autour de 300 à 400 000 migrants en situation irrégulière, un chiffre stable depuis 2016. Parmi eux, autour de 50 000 seraient en attente de décision sur leur statut de demandeur d’asile. Une partie seraient aussi des déplacés n’ayant pas fait leur demande de régularisation. Entre 200 et 300 000 seraient en situation irrégulière sans correspondre aux critères d’une catégorie légale d’immigré.

Chaque année, environ 30 000 personnes présentes illégalement sur le territoire français seraient reconduites dans leur pays ou à la frontière. Un nombre équivalent serait régularisé.

Source : Rapport sur les migrations irrégulières en Europe, Pew Resarch Center

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