Qu’est-ce que la finance durable ? Quelle est la définition officielle de la finance durable ? Quels sont les labels et les réglementations de la finance durable ? On fait le point sur les enjeux de la finance durable.

Définition de la finance durable

La finance durable, parfois appelée finance ou investissement responsable, est une approche de l’investissement qui prend en compte les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) dans la sélection et la gestion des investissements. Cette approche vise à aligner les investissements avec les objectifs de développement durable de l’ONU, ainsi qu’à minimiser les risques financiers et non-financiers associés à l’impact environnemental et social des entreprises.

La finance durable est parfois appelée finance verte ou finance responsable. La difficulté est que ces termes n’ont pas de définition claire et qu’ils sont parfois confondus.

Histoire de la finance durable

Les premières évocations d’une finance plus durable remontent aux années 1960, lorsque les investisseurs ont commencé à s’intéresser aux questions de responsabilité sociale des entreprises, la RSE. Dans les années 1980, les premiers fonds d’investissement proposant des critères de financement éthiques, durables ou responsables commencent à apparaître : en 1982, l’Eglise de Suède crée le premier fonds éthique, par exemple. Ce fonds sera suivi par plusieurs autres fonds financiers, souvent d’origine religieuse, comme le fonds Nicole Reille dans les années 1980.

Dans les années 1990, les normes de développement durable commencent à se mettre en place : en 1992, le Sommet de la Terre de Rio consacre le principe du développement durable, et en 1998, l’ISO publie la norme ISO 14001, relative au management environnemental, ainsi que plusieurs autres normes relatives à la responsabilité des entreprises, visant à encourager le basculement vers un système économique (et donc une finance) plus responsable.

Dans les années 2000, de plus en plus d’initiatives apparaissent pour tenter de mettre en adéquation le monde de la finance avec les objectifs collectifs de transition écologique et sociale. Les Principes pour l’Investissement Responsable (PRI) sont ainsi lancés en 2006 sur une initiative de l’ONU, pour promouvoir l’investissement responsable dans le monde entier. Les PRI ont pour objectif de sensibiliser les investisseurs institutionnels aux problématiques environnementales, sociales et de gouvernance (ESG) et de les encourager à intégrer ces critères dans leurs processus de décision d’investissement. Les premiers labels, mis en place par des agences de notation, sont mis en place pour distinguer la finance dite durable de la finance classique. En France, le premier label ISR est mis en place par Novethic en 2009. Durant cette période, de nombreuses initiatives ont vu le jour pour promouvoir la finance durable, telles que les Green Bonds, les Social Bonds et les Sustainability Bonds.

En 2015, les Nations Unies adoptent les Objectifs de développement durable (ODD). La même année, la COP21 à Paris aboutit à l’Accord de Paris, qui engage les pays à limiter le réchauffement climatique à 2°C et contient des propositions pour encourager le secteur financier à s’engager pour le climat. De plus en plus d’acteurs internationaux mettent donc en place des référentiels supposés encadrer la finance durable. En 2018, la Commission européenne présente par exemple son plan d’action pour la finance durable.

En 2020, la Commission européenne publie la Taxonomie européenne, qui établit une classification des activités économiques durables. La même année, la SFDR entre en vigueur, obligeant les gestionnaires d’actifs à publier des informations sur la prise en compte des critères ESG dans leur processus d’investissement. En 2021, la Commission européenne propose la directive CSRD pour renforcer les obligations de reporting en matière de durabilité des entreprises, afin notamment de servir de référentiel à l’évaluation des investissements durables.

Comment définir la finance durable, concrètement ? Labels et référentiels de la finance durable

Il existe différents labels et référentiels pour la finance durable, tels que le label ISR (Investissement Socialement Responsable) en France, ou encore les standards de durabilité ESG développés par des organisations telles que l’Initiative Financière du Programme des Nations unies pour l’environnement (UNEP FI), le Global Reporting Initiative (GRI) et le Carbon Disclosure Project (CDP). Parmi les principaux labels européens, on trouve :

  • Label ISR (Investissement Socialement Responsable) : créé en France en 2009, puis officialisé en 2016 sous l’égide du Ministère de l’Économie, il garantit que les fonds labellisés prennent en compte des critères ESG dans leur processus d’investissement. Les fonds ISR peuvent avoir une approche d’exclusion ou d’inclusion positive, c’est-à-dire qu’ils peuvent exclure certaines entreprises ou privilégier celles qui ont de bonnes pratiques en matière ESG, mais rien ne les y oblige.
  • Label Greenfin : créé en 2015 par le ministère de la Transition écologique et solidaire en France, il garantit que les fonds labellisés contribuent à la transition énergétique et écologique, et fonctionne quant à lui sur des mécanismes d’exclusion plus stricts.
  • Label Finansol : créé en France en 1997, il garantit que les fonds labellisés soutiennent des projets à fort impact social, environnemental ou de développement durable.
  • On peut aussi citer les fonds articles 6, 8 et 9 : ces articles font référence à la directive européenne SFDR et encadrent les obligations des investisseurs en matière d’information et de prise en compte des critères ESG dans la sélection des investissements. En résumé, les fonds articles 6 sont des fonds qui ne prennent pas en compte les critères ESG, les fonds articles 8 sont des fonds qui intègrent les critères ESG dans leur processus d’investissement, et les fonds articles 9 sont des fonds qui ont un objectif d’investissement durable. Mais ces critères et objectifs sont définis par les fonds eux-même.

Voir aussi : Finance durable : la jungle des labels et des règlementations

Les réglementations sur la finance durable

En termes de régulation, il existe plusieurs initiatives visant à encourager les entreprises et les investisseurs à adopter des pratiques durables. Par exemple, l’Union européenne a mis en place la Taxonomie de l’UE pour le développement durable, qui fournit un cadre pour déterminer quelles activités économiques peuvent être considérées comme durables. L’UE a également adopté des règlements relatifs à la divulgation d’informations ESG pour les entreprises et les investisseurs. La SFDR, et dans une moindre mesure, la CSDD (ou CS3D) sur le devoir de vigilance des entreprises pourraient constituer un incitatif pour les acteurs financiers à faire leur transition vers une finance plus durable.

Mais d’une manière générale, les réglementations sur la finance durable sont lacunaires, car rien n’incite ou ne contraint les acteurs financiers à adopter des pratiques d’investissement réellement durables. Les réglementations communautaires et internationales sont ainsi complètement incitatives : elles se fondent sur l’idée que l’exigence de transparence poussera les investisseurs et les épargnants à choisir des fonds plus durables. Mais les études montrent que cette transparence est aujourd’hui bien insuffisante en l’absence de critères fiables pour définir ce qu’est ou n’est pas un investissement durable. Par exemple, une note de la Banque de France montre que les fonds labellisés ISR ne sont en réalité pas vraiment plus verts que les autres, et que leur performance climatique est à peine meilleurs que les fonds non labellisés. De plus en plus études montrent ainsi que la finance durable est plutôt inefficace, peut-être même contreproductive, dans la mesure où elle n’est pas clairement encadrée. Une grande partie des acteurs de la finance durable sont ainsi accusés de greenwashing.

La finance durable en quelques chiffres

En termes de chiffres, l’investissement responsable a connu une croissance rapide ces dernières années. Selon le rapport Global Sustainable Investment Review 2020, l’investissement durable a atteint un total de 35 300 milliards de dollars en 2020, en augmentation de 15% par rapport à 2018. Cette croissance est principalement due à l’augmentation de la demande des investisseurs pour des produits d’investissement plus durables, ainsi qu’à la prise de conscience croissante de l’importance de l’impact environnemental et social des investissements. Mais on peut aussi penser qu’une partie de cette croissance est liée au fait que les labels de finance durable sont en réalité très laxistes : de nombreux fonds peuvent ainsi être labellisés « durables » sans pour autant être adossés à des critères réellement fiables de durabilité.